Le nouveau dispositif réglementaire de soutien à la production de biogaz, composé d'un décret et de deux arrêtés, est paru au Journal officiel du 28 février. Il devrait permettre de débloquer un certain nombre de projets qui ne pouvaient bénéficier simultanément des aides pour la revente d'électricité et de celles pour l'injection de biométhane dans le réseau.
La Commission de régulation de l'énergie (CRE) avait rendu, le 27 septembre 2012, un avis favorable sur les projets de textes, sous réserve de la prise en compte d'un certain nombre d'observations. Parmi celles-ci, l'augmentation de la durée du contrat d'achat de 15 à 20 ans, que la commission assortissait d'une baisse des tarifs et primes de 5%, n'a toutefois pas été suivie par le Gouvernement.
"Le nouveau dispositif permet aux producteurs de biogaz de valoriser simultanément leur production sous forme d'électricité et sous forme de biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel, en leur accordant le double bénéfice des dispositifs de soutien existants pour la production d'électricité à partir de biogaz (tarif d'obligation d'achat) et pour la production de biométhane injecté (tarif d'achat garanti)", explique Delphine Batho, la ministre de l'Ecologie.
Alors que, jusque-là, les producteurs de biogaz étaient contraints de choisir l'une ou l'autre forme de valorisation. "Cette exclusivité avait pour conséquence d'empêcher la réalisation de certains projets de méthanisation ou bien d'en limiter la taille", explique le ministère de l'Ecologie. En cause ? Des contraintes locales comme l'absence de débouchés suffisants pour la chaleur produite ou la saturation des réseaux de distribution de gaz naturel.
Dans un tel cas, "la double valorisation permet d'injecter une quantité de biométhane moins importante, pour ne pas saturer le réseau de gaz naturel de la zone, et de valoriser une proportion plus importante de la vapeur produite par l'installation de cogénération, augmentant ainsi son efficacité énergétique et le montant de la prime qui lui est associée", indique la CRE.
"L'injection s'avère plus difficile en été", précise Olivier Théobald, ingénieur à l'Ademe. Autoriser la double valorisation permet de "basculer sur la valorisation énergétique la plus performante en fonction de la demande du réseau".
Le signal du décollage ?
"Le nouveau cadre tarifaire permettra l'émergence de nouveaux projets de méthanisation et l'utilisation de nouveaux gisements de déchets comme source de production d'énergie", se félicite Delphine Batho.
Le premier centre de valorisation de biodéchets à bénéficier du dispositif de soutien devrait être le projet Methavalor à Morsbach (Moselle), indique le ministère. Le site pourra désormais valoriser simultanément sa production de biogaz sous forme d'électricité et de chaleur (cogénération), sous forme de biométhane injecté dans les réseaux ou sous forme de biométhane carburant.
Mais au-delà de ce projet qui était dans les starting-blocks, la modification du dispositif permettra-t-elle un véritable décollage de la filière ? "Cela va débloquer une minorité de projets en cours concernés par la double valorisation, admet Caroline Marchais, déléguée générale du Club Biogaz, en particulier pour des stations d'épuration ou des décharges". Mais, selon la spécialiste, la double valorisation nécessite aussi un double investissement que les tarifs d'achat actuels ne permettent pas de couvrir.
Les 300 projets de sites de production de biométhane identifiés sur le territoire métropolitain, selon une récente circulaire de la ministre de l'Ecologie, ne devraient donc pas tous éclore demain. D'une part, parce que cette réforme ne les concerne pas tous. D'autre part, parce que le délai de réalisation d'un projet va de trois à cinq ans. La vague d'injections de biométhane dans le réseau ne sera donc pas immédiate. A moins que le plan national biogaz, qui sera présenté dans le cadre du débat national sur la transition énergétique, permette d'accélérer le calendrier…