Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Le bruit coûte au moins 57 milliards d'euros par an à la France

Le coût sanitaire et l'impact économique du bruit s'élèvent à 57 milliards d'euros par an, selon une étude réalisée pour le Conseil national du bruit (CNB). Ce premier chiffrage doit permettre de mieux évaluer l'intérêt des politiques de lutte.

Risques  |    |  P. Collet

En France, le bruit coûte au moins 57 milliards d'euros par an, selon une étude de E&Y co-pilotée par le Conseil national du bruit (CNB) et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). "Ce chiffre est important, certains diront effrayant", prévient le député Christophe Bouillon (Seine-Maritime, PS), président du CNB, qui souhaite mettre en balance les coûts sociaux du bruit et ceux associés à leur réduction. Lorsqu'il a défendu des amendements visant à associer l'isolation thermique et phonique, "certains ont dit : «ça coûte cher»", rappelle l'élu qui évalue à six milliards d'euros la facture pour résorber les "points noirs". Prenant exemple sur la pollution de l'air intérieur, il explique qu'avant qu'apparaissent les premières évaluations des coûts sanitaires, le sujet n'était pas pris en compte. "Ce genre de travaux fait bouger les lignes."

Ce rapport est une première qui fixe une base qui pourra être élargie à l'avenir. Sur le plan méthodologique, l'étude évalue le nombre de Français exposés et prend en compte le coût par personne associé à chaque type de nuisance.

Un coût sanitaire de 20 milliards d'euros

Le coût de 57 milliards est considéré comme minimal car il ne tient pas compte de toutes les sources de bruit, ni de tous les contextes. L'étude a pris en compte trois grandes catégories de nuisances sonores, à partir de l'ensemble des études disponibles : les bruits liés aux transports, ceux en milieu professionnel et ceux associés au voisinage. "Il s'agit de chiffres prudents", explique Cyrus Farhangi, consultant chez E&Y et auteur de l'étude, d'autant que les synergies ne sont pas évaluées. Or, certains Français cumulent les expositions sur leur lieu de travail et à leur domicile, rappelle Christophe Bouillon.

La seule part des coûts sanitaires est de l'ordre de 20 milliards d'euros par an. Pourtant, l'étude laisse de côté certains montants, comme ceux associés au rallongement des durées d'hospitalisation. Une étude de l'Agence régionale de santé (ARS) du Centre a notamment démontré que la cicatrisation ou le risque d'infection nosocomiale était plus élevé en milieu hospitalier bruyant. René Gamba, président de la commission technique du CNB, explique que ce n'est pas le bruit en lui-même qui impacte la santé, mais le stress qu'il génère. Ce dernier fatigue les personnes et entraîne des troubles métaboliques, physiques et psychologiques.

Le transport en tête des coûts

Sur les 57 milliards de coût annuel, les transports totalisent 20,6 milliards. Il ne s'agit ici que des coûts du bruit des transports au domicile des personnes, précise l'étude. Les nuisances supportées durant les trajets, notamment, ne sont pas prises en compte. En France, neuf millions de personnes sont exposées à des niveaux critiques pour leur santé, c'est à dire à des niveaux supérieurs à 65 décibels (dB) pour les transports par route et par rail et 55 dB pour l'aérien. Plus globalement, 20,5 millions de Français sont impactés significativement par le bruit des transports, c'est-à-dire par des niveaux supérieurs à 45 dB. Ce chiffrage est "assez robuste", estime Cyrus Farhangi, car il s'appuie sur des données publiques, telles que celles tirées des plans d'exposition au bruit ou d'organismes publics.

Le coût direct est évalué à 11,5 milliards. Environ 90% de celui-ci est lié au transport par route. C'est en particulier vrai du transport de marchandises (poids lourds et utilitaires), qui représente la moitié du coût direct du transport par route. Bien que ne représentant que 20% du trafic, ces véhicules ont des émissions sonores dix fois plus élevées que celles des voitures particulières. Autre chiffre édifiant : un tiers des nuisances sonores liées au transport sont attribuées à l'Ile-de-France. La moitié de ces coûts directs sont liés aux troubles du sommeil, 40% à la gène ressentie et 6% aux maladies cardiovasculaires. A ce premier montant, il faut ajouter 9,1 milliards d'effets indirects associés à la perte de productivité ou à la perte de valeur des biens immobiliers exposés.

Pas de densification des villes sans calme

Au travail, le premier impact est la perte de productivité. E&Y a estimé que les 58% de salariés affectés (environ 14 millions de personnes) perdent cinq jours de travail par an sur les quelque 220 jours travaillés. Le montant atteint 18 milliards d'euros. A l'école, le décrochage scolaire associé au bruit coûte six milliards d'euros par an, lorsqu'on prend en compte la moindre productivité des travailleurs moins bien formés. Pour aboutir à ce chiffre, E&Y évalue à 15% les difficultés des élèves liées au bruit en classe. A cela s'ajoute 1,1 milliard d'euros associé à des accidents du travail liés, par exemple, à une mauvaise transmission d'information en milieu bruyant. Enfin, "un bon millier de travailleurs sont atteints de surdité chaque année", pour un coût de 900 millions d'euros.

Restent les bruits de voisinage qui "touchent la population la plus fragile", souvent en milieu urbain dense. L'étude la plus robuste sur le sujet montre que les Français classent cette nuisance au même niveau que le bruit associé aux transports. Par analogie, E&Y évalue à 11,5 milliards le coût associé.

L'une des leçons de l'étude est la confirmation de l'importance des nuisances sonores en zone urbaine. Pour René Gamba, le problème est à prendre au sérieux, car "on ne densifiera pas la ville si on ne la calme pas". Et de rappeler que certains Français acceptent des temps de trajets domicile travail importants pour bénéficier d'un logement au calme. Le problème ne touche pas que les grandes agglomérations, puisque toutes les infrastructures ayant un trafic supérieur à trois millions de véhicules par an sont concernées. Toute agglomération de 100.000 personnes et plus est concernée. Ici, il ne s'agit pas de réaliser des "zones calmes" qui seraient épargnées, mais bien de limiter le bruit dans l'ensemble des zones urbaines, défend le président de la commission technique du CNB.

RéactionsAucune réaction à cet article

Réagissez ou posez une question au journaliste Philippe Collet

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires

Partager