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Actu-Environnement

Un cadre juridique Européen régissant le piégeage et le stockage du carbone se dessine

Deux ans après la publication du rapport du GIEC sur le captage et le stockage du CO2, les recherches mondiales se poursuivent tandis que la commission vient de proposer un nouveau cadre réglementaire favorisant le développement de cette technique.

Gouvernance  |    |  C. Seghier
Les propositions destinées à stabiliser les émissions mondiales de gaz à effet de serre sont nombreuses : améliorer l'efficacité énergétique dans le bâtiment, dans l'industrie et dans les transports, encourager les énergies renouvelables à l'aide de subventions, de contraintes réglementaires ou de tarifs imposés afin de les rendre concurrentielles par rapport aux énergies fossiles ou modifier la fiscalité en diminuant les subventions aux énergies fossiles et en imposant une taxe carbone.

Une technologie potentielle pour réduire l'effet de serre

La solution du captage et du stockage du CO2 (CCS) est également en mesure de contribuer à stabiliser les émissions mondiales de gaz à effet de serre. Le CCS désigne une succession de procédés technologiques visant à capter le dioxyde de carbone présent dans les gaz rejetés par l'industrie, à le transporter et à l'injecter dans des formations géologiques.
Encore au stade expérimental, le captage et le stockage du CO2 constituent actuellement une voie de recherche en complément d'actions d'efficacité énergétique et de diversification des sources d'énergie pour stabiliser la concentration de gaz à effet de serre dans l'atmosphère. Un rapport spécial du GIEC (Groupe International d'Experts sur le Climat) diffusé en septembre 2005 a examiné le rôle qu'il pouvait jouer dans la lutte contre le réchauffement climatique. Sa principale application réside dans la réduction des émissions de CO2 dues à la production d'électricité à partir de combustibles fossiles - essentiellement charbon et gaz. La technologie peut en outre s'appliquer aux secteurs qui émettent beaucoup de CO2 comme la cimenterie, le raffinage, la sidérurgie, la pétrochimie ou la transformation du pétrole et du gaz. Selon le rapport, ces technologies pourraient abaisser de 30 % ou plus le coût de la lutte contre les changements climatiques. De plus, le stockage du CO2 dans des formations géologiques pourrait représenter 15 à 55 % de la totalité des réductions d'émissions requises (entre 220 et 2 200 milliards de tonnes de CO2) d'ici à 2100 pour pouvoir stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère.
Rédigé par des experts aux compétences unanimement reconnues, ce rapport a donné un nouveau souffle à la recherche dans ce domaine et aujourd'hui, les sites pilotes se multiplient. Les chercheurs estiment que cette technologie pourra être déployée industriellement à partir de 2020.

Une multiplication des expérimentations à grande échelle

Depuis deux ans des avancées notables ont été réalisées sur le plan technologique et industriel notamment sur le captage du CO2, étape la plus coûteuse de la chaîne technologique. Différentes expérimentations de captage et stockage du CO2 sont menées au niveau international notamment aux États-Unis, au Japon, en Europe et en France. La première expérience à grande échelle de stockage dans un aquifère salin a été engagée en mer du Nord où, depuis 1996, le pétrolier norvégien Statoil injecte du CO2 par an dans un aquifère salin situé sous le fond de la Mer du Nord (projet Sleipner*). Il a été encouragé par la taxe norvégienne sur le dioxyde de carbone, nettement plus élevée que le coût du stockage d'une tonne de CO2.
Un autre projet In Salah** en Algérie (Statoil, BP et Sonatrach) a quant à lui été lancé par le système interne d'échange de droits d'émission de carbone de BP.
D'autres projets sont également en cours à l'instar du projet Vattenfall à Schwartze Pumpe en Allemagne, qui devrait être opérationnel à la mi 2008, et du projet de Total dans le bassin de Lacq, en France. Enfin, l'Institut Français du Pétrole (IFP) et le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM) viennent, avec la société d'ingénierie Géostock, de créer Geogreen, une société spécialisée dans l'évaluation des capacités de stockage et de confinement des sites géologiques.

Des procédés complexes et encore très coûteux

Trois modes de captage existent mais ils sont à des stades de développement différents. Le premier mode consiste à capter le CO2 dans les fumées de combustion grâce à un solvant chimique qui est ensuite régénéré par distillation. De nouveaux solvants ont été identifiés mais cette méthode reste encore coûteuse et fait l'objet de recherche notamment dans le cadre du projet européen Castor.
Une autre option, plus adaptée aux nouvelles installations industrielles consiste à réaliser la combustion en présence d'oxygène à la place de l'air ce qui permet d'obtenir des fumées plus concentrées en CO2 qu'on peut alors séparer à moindre coût. Reste cependant à mettre au point un procédé de séparation de l'oxygène de l'air moins coûteux et moins consommateur d'énergie ou de trouver un oxyde métallique capable de fournir de l'oxygène grâce à des cycles d'oxydo-réduction. C'est notamment l'objet des recherches menées en France par l'IFP dans le cadre du projet européen Encap et du projet français ANR CLC-MAT.
Le captage du CO2 peut également être associé à la fabrication d'hydrogène. Au lieu de brûler directement le combustible fossile, celui-ci est converti en gaz de synthèse duquel on extrait de l'hydrogène pour la production d'électricité et du CO2. Cette voie cristallise de nombreux espoirs car elle permettrait un déploiement à grande échelle de la technologie de l'hydrogène. Le programme européen Hypogen y est dédié et vise à développer un démonstrateur d'ici à 2014.

Après captage, le CO2 est transporté vers une formation géologique adaptée, dans laquelle il sera injecté afin de l'isoler à long terme de l'atmosphère. De nombreuses recherches se penchent donc également sur le transport, les conditions d'injection du CO2 et surtout sur le choix des zones de stockage et leur pérennité.

Quatre grands mécanismes interviennent pour piéger le CO2 dans les formations géologiques bien choisies. Le premier est un piégeage structurel, dû à la présence d'une roche couverture imperméable qui empêche le CO2 de s'échapper au départ. Le deuxième, dénommé piégeage du CO2 résiduel, est le mécanisme par lequel le CO2 est piégé par les forces de capillarité dans les interstices de la formation rocheuse ; il intervient environ 10 ans après l'injection. Le troisième mécanisme est le piégeage par solubilité, par lequel le CO2 se dissout dans l'eau présente dans la formation géologique et coule, puisque le CO2 dissous dans l'eau est plus lourd que l'eau normale. Ce mécanisme prend de l'importance entre 10 et 100 ans après l'injection. Enfin, le piégeage minéral est le phénomène qui intervient lorsque le CO2 dissous réagit chimiquement avec la formation rocheuse pour produire des minéraux.

Aujourd'hui, trois solutions de stockage sont envisagées : les anciens réservoirs d'hydrocarbures, liquides ou gazeux, dont le potentiel de stockage est estimé entre 675 et 900 milliards de tonnes de CO2, les veines de charbon non exploitées (15 à 200 milliards de tonnes de CO2) et les aquifères salins profonds (1.000 à 10.000 milliards de tonnes de CO2). Ces différentes solutions continuent à être explorées sur les sites pilotes qui ont vu le jour en Europe, au Japon ou encore en Australie et aux Etats-Unis.
En France, les recherches, menées par le Bureau de Recherche Géologiques et Minières (BRGM) et l'IFP, se tournent vers les grands aquifères du bassin parisien qui pourraient stocker 26.000 millions de tonnes de CO2 environ. Trois projets pilote y sont envisagés : un pilote de captage à partir d'une chaudière au charbon, un pilote de captage à partir d'une installation industrielle et un pilote de stockage dans un aquifère à grande profondeur (2.000 m). Les bassins d'Aquitaine et du Sud-Est sont également évoqués mais pour l'instant aucune donnée ne permet d'évaluer leur potentiel. Le BRGM évoque également la possibilité de mettre en place un pilote de captage et de stockage de CO2 issu d'une usine de production de biocarburants dans un aquifère profond salin dans le Loiret.

Un cadre règlementaire naissant

La technologie CCS a bénéficié d'avancées réglementaires et politiques au cours de ces dernières années. La convention de Londres sur l'interdiction d'immersion des déchets a en effet été amendée afin d'autoriser sous certaines conditions l'injection de CO2 sous le fond des mers et une réglementation globale est actuellement en cours d'élaboration au niveau européen.
Dans ce contexte, le 23 janvier, l'exécutif européen a présenté plusieurs communications visant à intégrer le processus de CSC dans son paquet sur le climat et l'énergie : un projet de proposition pour une directive qui fixe un cadre juridique au CSC, une communication sur les projets de démonstration, une révision des lignes sur les aides d'Etat qui ouvre la voie à une aide publique, et un projet d'analyse d'impact.

Certains obstacles qui entravaient au développement de la technologie devraient ainsi être levés : les lignes directrices de l'UE portant sur l'autorisation des Etats membres à financer des secteurs ont été étendues afin de permettre l'introduction de la technologie CSC. En outre, le CO2 capturé et stocké sera calculé comme « non émis » au titre du système européen d'échange d'émissions (système européen ETS).

Toutefois cette technologie se heurte encore à des coûts relativement élevés dont le montant global comprenant le captage, la compression, le transport et le stockage, est évaluée entre 40 et 70 $US par tonne de CO2 alors que l'objectif est d'atteindre un plancher de 20 à 30 euros la tonne, un coût qui serait compatible avec le cours espéré de la tonne de CO2 sur le marché européen d'échange de quotas d'émissions. D'ailleurs, dans le cadre du projet européen Castor, coordonné par l'IFP et financé à hauteur de 8,5 M€ par la Commission européenne (6eme PCRD), la technique de la postcombustion, qui s'intègre aux installations existantes en prélevant le CO2 au niveau de la cheminée des usines, est expérimentée au Danemark pour tenter de diminuer le coût de capture du CO2 .

Cette technologie se heurte aussi à l'incertitude concernant le comportement du CO2 dans les structures géologiques pendant des milliers d'années. Une fois séquestré, le principal risque est la fuite du CO2, accompagnée d'une pollution locale due à un taux de CO2 excessif. Le BRGM travaille ainsi à la définition de critères de sécurité du stockage, indispensables pour garantir un impact proche de zéro sur les personnes, les biens et l'environnement que ce soit à court et moyen terme (50 ans) qu'à long terme (1.000 ans). Les travaux portent par exemple sur le confinement du gaz, l'étanchéité des réservoirs, ou encore l'impact du gaz sur les roches.

Le projet de la commission propose quant à lui qu'un plan de surveillance soit établi pour vérifier que le CO2 injecté se comporte comme prévu. Des quotas d'émission devront être restitués en cas de fuite de CO2 pour compenser le fait que, dans le SCEQE, le CO2 stocké aura été considéré comme n'ayant pas été émis par sa source. Enfin, les dispositions de la directive sur la responsabilité environnementale concernant la réparation des dommages environnementaux locaux s'appliqueront en cas de fuite. Des inspections de routine devront également être effectuées au moins une fois par an pour passer en revue tous les effets environnementaux susceptibles d'être provoqués par le complexe de stockage.
La proposition prévoit que les sites de stockage passent à long terme sous le contrôle des États membres. L'exploitant restera toutefois responsable d'un site tant que celui-ci présente un risque de fuite significatif. La décision relative au transfert de responsabilité étant la deuxième décision essentielle dans le cycle de vie d'un site de stockage (la première étant la décision d'autorisation du site), elle sera soumise à l'évaluation de la Commission.
Enfin, concernant le choix des sites, les États membres auront le droit de déterminer quelles régions de leur territoire peuvent être utilisées pour le stockage du CO2 toutefois des permis d'exploration devront être délivrés lorsqu'une cette recherche s'avèrera nécessaire. Une analyse poussée du site potentiel devra ensuite être réalisée selon des critères qui sont définis en annexe de la proposition de directive*** et qui comprennent une modélisation du comportement probable du CO2 après injection. Cette analyse initiale sera réalisée par l'exploitant potentiel qui soumettra ensuite toutes les informations obtenues à l'autorité compétente de l'État membre concerné dans sa demande de permis.

Rappelons que le développement de cette technologie n'exonère pas de diminuer les émissions de CO2 et de poursuivre l'amélioration de l'efficacité énergétique.

Réactions6 réactions à cet article

Est-ce qu'un oubli ?

Pourquoi ne parlez-vous pas du pilote de captage et stockage de CO2 financé par Total, dans le bassin de Lacq???

Une concertation publique vient d'être menée avec les riverains et associations locales, et tout un dossier a été réalisé expliquant le projet et ses impacts potentiels, vous avez là matière étoffer vos recherches. Et le tout est disponible sur Internet.

De plus c'est une première dans le Monde car toute la chaîne du CSC, intégrant pour la première fois un procédé d’oxycombustion, sera testée à une échelle encore jamais réalisée.

nelson | 08 février 2008 à 14h35 Signaler un contenu inapproprié
Re:Est-ce qu'un oubli ?

Le projet du Lacq est mentionné... il serait peut-être utile que tu lise avec plus d'attention

Anonyme | 08 février 2008 à 14h46 Signaler un contenu inapproprié
Re:Est-ce qu'un oubli ?

Bonjour

En plus de ne pas avoir lu avec attention. tu ne sembles pas avoir remarqué qu'un artucle a été écrit sur ce sujet, il y'a quelques temps.

Le lien était sur la droite :

https://www.actu-environnement.com/ae/news/total_captage_stockage_co2_2257.php4

Anonyme | 09 février 2008 à 11h16 Signaler un contenu inapproprié
Encore du gâchis.

Ne vaudrait-il pas mieux utiliser tous cet argent (public) dans les économies d'énergies ? Parce que la marge est encore énorme (facteur 4).

rené-pierre | 14 février 2008 à 11h27 Signaler un contenu inapproprié
un scandale de plus!

Les choses se précipitent: les pétroliers et charbonniers ont réussi à convaincre les autorités publiques que toutes les solutions seraient bonnes contre le réchauffement. Et l'on cherche bien sûr à privilégier les solutions techniques, gérées en vase clos par les techniciens, qui permettent d'éviter toute réflexion en amont et toute remise en cause de nos gaspillages énergétiques phénoménaux. Donc, continuons à utiliser les énergies fossiles, on mettra le CO2 sous le tapis. Après des siècles d'utilisation des océans comme poubelle, c'est désormais le sous-sol qui sert de dépotoir: déchets chimiques (Stocamine, Crétacé 4000 à Lacq aussi!), parfois extrêmement toxiques (les REFIOM envoyés en mine de sel en Allemagne), bientôt déchets radioactifs et aujourd'hui, le CO2.
Résultat, on ne se pose plus (ou si peu) la question de la prévention de la pollution.
Ceci n'est pas nouveau, bien sûr, c'est l'habillage marketing de toutes les industries polluantes, mais que les décideurs publics se fourvoient dans ces embrouilles, et surtout l'argent public (européen ou de l'Ademe) serve à financer des recherches et du développement là-dedans, c'est scandaleux!
D'autant que votre article l'explique bien:une fois que ça marchera et qu'on aura réduit les coûts, les industriels rentabiliseront bien l'affaire en revendant les quotas d'émission ainsi gagnés! Une opération juteuse pour eux, financée sur fonds publics. Ce n'est pas si nouveau, mais ce qui est grave, c'est que le problème du changement climatique mérite d'autres réponses que ces bidouillages spéculatifs.
Et puis, si on a encore un tout petit peu de sens moral, on pensera aux populations riveraines de ces stockages qui vont vivre au-dessus de bombes toxiques à retardement. Je conseille un excellent n° de La recherche de l'année dernière qui faisait bien le point sur les risques.

ml lambert | 14 février 2008 à 15h35 Signaler un contenu inapproprié
QUESTION AU PRESIDENT FRANCAIS

Le problème des glaces aux pôles Nord, c’est que leur fonte annoncer par des scientifique pour 2015 (j’ai pas noté le lien url de l’article donc c’est bien pire que ce que j’annonce dans la lettre à Sarkozy), va perturber les courants halo-thermique par ajout d’eau douce(gulf-stream, courant du labrador…) lesquels montrent déjà des ralentissements.
Si ces courants s’arrêtes, la répartition de la chaleur des océans aux niveau planétaire va cesser et tout va s’emballer.
Je m’explique, aujourd’hui même si il y a de grosse disparité de température en fonction des saisons et de l’endroit où on se trouve, ces écarts sont considérablement réduits par ces courants halo-thermique qui transporte la chaleur des eaux chaudes vers les eaux froides comme un radiateur.
Si ces courants s’arrêtes les hivers seront très froids (bien inférieur à zéro) et les étés très très chaud, quand aux région équatoriales les températures vont littéralement s’envoler… Les eaux équatoriales vont prendre plusieurs degré et amorcer un relargage monstre de CO2 dissout (Confère document joint à la lettre à Sarkozy N°6 ou sur mon blog).
Si ceci arrive (relargage monstre de CO2 dissout) et on parle de centaines de milliards de tonnes de CO2, la vie risque d’être terriblement perturber… En faite il y aura une extinction de masse (d’où le terme de stérilisation carbonique), une tel stérilisation a déjà eut lieu il y a 251 millions d’années et a éradiquer à l’époque 70% des espèces terrestre et 90 à 95% des espèces marines.

Ps : je vous ferrez remarquer que malgré mes nombreux commentaires et agissements pour prévenir les populations francophones depuis des mois je n’ai fait l’objet d’aucun dépôt de plainte car je peux prouver tout mes dire.

SOSTERRIEN | 28 novembre 2009 à 14h39 Signaler un contenu inapproprié

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