La transformation du Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement) a connu une nouvelle étape significative juste avant l'été : le décret modifiant son statut a, en effet, été publié au Journal officiel. « Nous voulions faire du Cerema, un établissement public qui soit à la fois un établissement public local et un établissement public national. Cela n'existait pas dans le corpus du droit français. Nous avons donc beaucoup travaillé avec des juristes et avec le conseil d'État et les parlementaires pour bâtir cet établissement hybride, cogouverné par les collectivités et l'État », détaille Pascal Berteaud, directeur général du centre d'études.
L'histoire du Cerema est particulière. L'établissement résulte de la fusion, en 2014, de onze services de l'État. Ses missions d'alors : assurer à la demande de l'État des activités de conseil, d'assistance, de contrôle, d'innovation, d'expertise, d'essai et de recherche. Avec, à la marge, des missions également réalisées pour le compte des collectivités locales.
Une baisse des subventions et des effectifs
Mais dès sa création, le nouvel établissement est confronté à la complexité du processus d'intégration des différents services et, dans le même temps, à une baisse des subventions de l'État ainsi que de ses effectifs. De 2014 à 2021, le Cerema a ainsi perdu 584 équivalents temps plein annuel travaillé (ETPT). Et durant la même période, la subvention de l'État (SCSP) a fondu de près de 38 millions d'euros, selon le Sénat, atteignant, pour 2021, 191,1 millions d'euros. « La diminution constante des moyens financiers et humains imposée au Cerema a créé un climat social tendu, les personnels, comme les élus associés à la gouvernance, ne comprenant pas quel était le projet de l'État pour l'établissement », a constaté, de son côté, une mission conjointe du CGEDD et de l'IGA, en juin 2021. Avec un besoin d'ingénierie pour les collectivités, partiellement compensé par ces dernières, selon la mission. « La forte diminution des effectifs et de la subvention versée au Cerema avait débouché sur une crise, à l'automne 2017, qui s'était traduite par la démission de son président, puis de son directeur général », a rappelé le Sénat dans son rapport général sur le projet de loi de finances pour 2022.
En 2019, l'établissement s'est alors engagé dans un processus de transformation à travers le projet Cerem'Avenir et a recentré ses activités autour de six domaines. Avec une volonté de développer celles au profit des collectivités locales. « Sur les six domaines d'activité définis par le projet, deux s'adressent presque exclusivement aux collectivités, l'ingénierie des territoires et les mobilités, les quatre autres relevant de compétences partagées », a noté la mission CGEDD-IGA.
Une activité resserrée
« Les adhésions des collectivités seront à des niveaux particulièrement faibles. Par exemple, pour un conseil départemental, cela pourrait être de l'ordre de 2 500 euros », précise Pascal Berteaud. Ensuite, le processus d'adhésion des collectivités pourra être ouvert jusque courant janvier, avant l'élection des représentants en février. Cette nouvelle gouvernance devrait finalement être mise en place à partir de mars 2023.
Et pourrait entraîner des effets inattendus. L'adhésion des collectivités et leur participation à la gouvernance pourraient ainsi constituer un terrain propice pour ouvrir des débats sur des sujets sensibles, comme la gestion du recul du trait de côte. « Le Cerema peut aussi donner l'occasion à l'État et aux collectivités de se mettre autour de la table pour discuter techniques et essayer d'objectiver les choses », estime Pascal Berteaud.
Une nécessaire stabilisation des effectifs
La réussite du « nouveau » Cerema implique toutefois une réévaluation de la subvention de l'État et un maintien des effectifs, selon la mission CGEDD-IGA. « Pour permettre la mise en œuvre dans de bonnes conditions du projet stratégique, comme pour asseoir la crédibilité du projet de transformation de l'établissement en agence commune à l'État et aux collectivités locales, en particulier vis-à-vis du Parlement et des élus locaux, le maintien à leur niveau actuel du nombre d'emplois (2600) et de la subvention pour charge de service public (SCSP) à 200 millions d'euros, apparaît comme une condition essentielle », estimait-elle, en juin 2021. Pour mémoire, la SCSP est de 189 millions, en 2022.
Pour le Cerema, toutefois, le principal enjeu reste les effectifs. « Autant il y a cinq ou six ans, le Cerema était très mal sur le plan financier et budgétaire, autant depuis deux ans, il est à l'équilibre, indique Pascal Berteaud. Le débat que nous avons aujourd'hui avec le gouvernement n'est pas tellement sur les moyens financiers, mais sur l'enjeu à maintenir a minima l'effectif du Cerema au niveau actuel. » Un enjeu essentiel pour apporter une ingénierie de qualité aux collectivités confrontées à de nombreux enjeux environnementaux.