Etablir une stratégie nationale dédiée aux matières premières, garantir l'approvisionnement français, allonger la durée de vie des appareils et valoriser au mieux leurs déchets, développer l'écoconception et renforcer les efforts d'innovation. Telles sont les pistes proposées dans le rapport "Transitions vers une industrie économe en matières premières" débattu ce mardi 14 janvier 2014 par le Conseil économique, sociale et environnemental (Cese).
Le document, issu d'une autosaisine de la section des activités économiques présidée par Jean-Louis Schilansky, président de l'Union française des industries pétrolières (Ufip) et membre du collège des entreprises au Cese, s'intéresse aux ressources métalliques et minérales. Globalement, le rapport "invite à généraliser la transition engagée [vers un fonctionnement plus circulaire de l'économie] en se focalisant sur l'amont grâce à l'éco-conception tout en exploitant au mieux les potentialités du recyclage et en ouvrant des perspectives de relocalisation territoriale grâce à l'écologie industrielle".
La consommation de matières minérales a été multipliée par dix au cours du XXème siècle et devrait l'être par trois d'ici 2050, la Chine contrôle 90% du marché des terres rares et l'extraction de minerais pose de nombreux problèmes écologiques. Autant de questions, parmi tant d'autres, qui font dire à Yves Legrain, représentant de la CFDT au Cese et rapporteur de cet avis, qu'"on ne peut pas continuer sur le rythme actuel". Sur le plan de la méthode, il convient donc d'inclure une stratégie spécifique aux minerais dans la stratégie nationale de transition écologique. Une stratégie qui doit être adoptée formellement par le Parlement et suivie par le Conseil national de transition écologique (CNTE).
La course aux matières premières
En premier lieu, le Cese considère qu'il faut garantir les approvisionnements en matières premières de l'économie française. Pour cela, il "préconise de sécuriser l'accès aux matières premières et notamment aux minerais stratégiques grâce à une « diplomatie des matières premières » conduite au niveau européen". L'objectif est ici de contrebalancer le pouvoir des grands pays miniers, facteur de "fragilité" pour les pays européen.
La deuxième solution préconisée consiste à préserver les gisements de déchets et à conserver les matériaux sur le territoire. Constatant que la France est structurellement exportatrice de produits à recycler, le Cese propose de s'appuyer sur "un engagement des industriels sur des objectifs d'utilisation de matières premières recyclées par catégories de produits".
Enfin, le rapport encourage le recours à la chimie du végétal pour la production de matières premières renouvelables. Une option qui "qui nécessite de fixer les arbitrages politiques entre les usages concurrents de la biomasse", prévient le Cese.
Réemployer et recycler
Du côté des produits, le Cese recommande un allongement de leur durée de vie afin de rendre possible leur réemploi, leur maintenance et leur réparation. Pour cela, il propose d'"[étendre] la durée légale de conformité de 2 à 5 ans pour certaines catégories de produits, en informant le consommateur des conditions de réparabilité des produits et en facilitant l'accès aux pièces détachées".
De même l'écoconception des produits est mise en avant afin de réduire les coûts de recyclage. 80 à 90% des coûts de recyclage découlent de la conception des produits, rapporte le Cese qui préconise diverses mesures en faveur de l'écoconception et en particulier "augmenter l'éco-contribution en la modulant en fonction de critères d'écoconception " ou "la prise en compte de critères d'écoconception dans les écolabels".
Quant au recyclage, il est lui aussi pris en compte et le Cese préconise "la réduction progressive du stockage des déchets valorisables, [de] supprimer les modulations de la taxe générale sur les activités polluantes, [de] soutenir les investissements pour augmenter les capacités de valorisation et [de] rassembler les données sur les flux de déchets et les matières recyclées". Plus précisément, il pointe "la nécessité d'une stratégie industrielle pour le recyclage des métaux rares et précieux". Lorsque le recyclage "n'est pas techniquement ou économiquement possible", le rapport suggère de les utiliser pour produire des combustibles solides de récupération.