Le Conseil d'Etat a annulé mercredi 7 novembre l'arrêté de la ministre de l'Ecologie de février dernier, qui avait autorisé la chasse de trois espèces d'oies à des fins scientifiques au début de leur période de retour vers leur lieu de nidification.
Etudes scientifiques sur l'origine et les déplacements migratoires
L'arrêté du 3 février 2012 avait autorisé "aux fins d'études scientifiques sur l'origine et les déplacements migratoires" un prélèvement pour l'oie cendrée, l'oie rieuse et l'oie des moissons, dans treize départements. Ces prélèvements étaient limités à quinze oies par département pour la période du 1er au 10 février 2012.
L'Association pour la protection des animaux sauvages (Aspas) avait annoncé dans la foulée un recours contre ce texte et contre celui mettant fin au moratoire de la chasse du courlis cendré et de l'eider à duvet sur le domaine public maritime, estimant que "les cadeaux électoraux de Nicolas Sarkozy aux chasseurs [étaient] illégaux".
Le Conseil d'Etat vient de donner raison à l'association requérante en annulant l'arrêté litigieux.
Les prélèvements ne s'inscrivaient dans aucun programme de recherche
La directive de 2009 relative à la conservation des oiseaux sauvages fixe un objectif de protection complète de toutes les espèces d'oiseaux sauvages en période de reproduction mais aussi en période de retour des espèces migratrices vers leur lieu de nidification. Conformément à cet objectif, la Haute juridiction administrative française avait contraint en décembre 2011 le ministère de l'Ecologie à fixer une date de clôture de la chasse aux oies antérieure au 31 janvier. La ministre avait obtempéré en signant un arrêté avançant la date de fermeture du 10 février au 31 janvier. Mais, quelques jours plus tard, elle signait un deuxième arrêté autorisant un prélèvement dérogatoire à des fins scientifiques jusqu'au 10 février.
Certes, la directive prévoit des possibilités de dérogation mais sous certaines conditions bien définies : absence d'autres solutions satisfaisantes, dérogation visant "des fins de recherche et d'enseignement, de repeuplement, de réintroduction" ou d'"'élevage se rapportant à ses actions".
Or, le Conseil d'Etat relève que les prélèvement autorisés par l'arrêté "ne s'inscrivent dans aucun programme de recherche, et notamment pas dans le programme d'amélioration des connaissances sur l'oie cendrée en France lancé en 2010 et coordonné par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage", et que d'autres solutions que des prélèvements par tir existent pour améliorer les connaissances sur l'origine et les déplacements migratoires des différentes espèces d'oies en cause.
"Pays où l'on chasse le plus d'espèces le plus longtemps"
L'Aspas se félicite de cette décision qui sanctionne "l'alibi scientifique de la chasse des oies en février". Pour l'association de protection des animaux sauvages, l'autorisation gouvernementale "faisait partie des cadeaux à peine déguisés offerts aux chasseurs à quelques mois des dernières élections présidentielles". Elle ajoute "chasser plus longtemps, plus d'espèces, y compris au détriment de la survie de ces dernières, est une revendication irresponsable mais récurrente de nos chasseurs français (…). Pourtant, la France est déjà le pays d'Europe où l'on chasse le plus grand nombre d'espèces, soit 91, et le plus longtemps, de septembre à fin février".
La Fédération nationale des chasseurs, qui est intervenue à l'instance, avait de son côté indiqué en février suite à l'annonce des actions judiciaires de plusieurs ONG, "si, d'aventure, ces mouvements intégristes obtiennent gain de cause, notamment dans leurs recours devant le Conseil d'Etat, la FNC invite fermement le Gouvernement à reconsidérer les termes des accords conclus entre chasseurs et « protecteurs », qui avaient pourtant été voulus au plus haut niveau de l'Etat".