Hormis l'activité humaine, le bruit dans l'océan peut provenir de 126 mammifères, d'une centaine de mollusques et de crustacés ou d'un millier de poissons. Selon 17 chercheurs de neuf pays, dont la France, il est temps de rassembler cette symphonie sous-marine sous une même enseigne, pour en étudier l'étendue de sa biodiversité – qu'elle soit connue ou non. Membres du Programme international de recherche de l'océan silencieux (IQOE), les scientifiques ont publié leur proposition le 8 février dernier : une bibliothèque mondiale de la biophonie sous-marine (Glubs).
« Alors que la biodiversité mondiale est en déclin et que le paysage sonore sous-marin est altéré par les activités anthropiques, nous avons besoin de documenter, de quantifier et de comprendre les sons biologiques et leurs sources – avant, peut-être, qu'elles ne disparaissent », déclarent les chercheurs. Leur idée de la Glubs est de rassembler l'ensemble des enregistrements sous-marins, compilés dans diverses banques sonores telles que la sonothèque du Muséum national d'histoire naturelle, au sein d'une plateforme ouverte accessible en ligne. Plus de 200 hydrophones, micros plantés dans le fond marin, sont déjà installés à travers le monde et capturent régulièrement de nouveaux enregistrements.
Cette plateforme incarnerait ainsi une base de données de référence, concernant toutes les espèces marines, connues ou inconnues, émettant des sons. Elle pourrait, par exemple, servir à développer des cartes de distribution géographique des espèces. Une telle cartographique s'avérerait utile pour suivre la dynamique de certaines populations ou pour estimer l'impact des activités humaines sur leur répartition. La Glubs permettrait également d'entraîner des algorithmes d'intelligence artificielle (IA), afin de les rendre capables de distinguer un signal sonore biologique du reste du bruit enregistré. « À mesure que la bibliothèque grandira, l'utilisation d'IA facilitera l'extraction et l'identification de sons biologiques depuis les milliers d'enregistrements collectés », avancent les chercheurs.