"La thématique d'ensemble du plan chimie verte et biocarburants, est celui du verdissement de la chimie, qu'elle réduise son impact environnemental mais également celui de l'ensemble de l'industrie, grâce à la diffusion de toutes les innovations qu'elle pourra apporter", pointe Raphaël Keller, conseiller en charge des filières d'avenir au cabinet du ministre du Redressement productif. Sa feuille de route ainsi que cinq autres des 34 plans de la Nouvelle France industrielle dont celle sur la chimie verte viennent en effet d'être validées.
L'élaboration de la feuille de route a conduit à identifier 45 projets, avec des intentions d'investissement de 2 milliards d'euros d'ici 2020 et 5.000 emplois directs créés ou pérennisés.
"La plupart des projets sont confidentiels, précise Raphaël Keller, ils ont été soumis directement au chef de projet ou à l'administration".
De niveaux de maturation plus ou moins avancés, ces derniers ont en commun de tous avoir rencontré des difficultés d'ordre financier, règlementaire, normatif, etc. qui empêchent la décision d'investissement.
Pour y remédier, au cours du second semestre 2014, chaque projet sera auditionné de manière individuelle par le Commissariat général à l'investissement, la Banque publique d'investissement, l'Ademe, et la Direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS). Ces instances pourront ensuite proposer des solutions (ou identifier de nouveaux verrous). "Elles pourront orienter les entreprises auditionnées vers un soutien financier : prêts, avancement remboursable, subventions, même une prise de participation etc. mais également mener un travail réglementaire", détaille Raphaël Keller.
Une chimie verte basée sur des ressources végétales
La feuille de route chimie verte se décompose en quatre axes. Tout d'abord, elle ambitionne de développer l'utilisation des ressources végétales : production de polymères biosourcés, destinés à des applications diverses (peintures, emballages biodégradables, traitement des eaux, etc.) mais également de molécules biosourcées à forte valeur ajoutée (butadiène produit à partir d'éthanol, molécules pour des applications spécifiques comme des additifs pour les plastiques, tensio-actifs, etc.).
Ensuite, elle souhaite mettre en place un contexte favorable au développement de la chimie verte et des biocarburants et favoriser le développement des marchés aval pour la chimie verte basée sur des ressources végétales. Ainsi, elle prévoit de donner un accès privilégié aux marchés publics pour les produits biosourcés. "Soutenir un produit dans le cadre de marché public peut entraîner des suspicions d'aide d'Etat, explique Raphaël Keller, nous travaillons notamment aujourd'hui sur la question juridique notamment, nous allons réaliser un benchmark des pratiques des autres grands pays et nous formulerons des propositions en 2015".
La feuille de route envisage également de mettre en place une fiscalité plus avantageuse (bonus vert) pour les produits biosourcés. "L'amendement déposé par Ségolène Royal dans le cadre du projet de loi sur la biodiversité est susceptible de développer une filière plastique biocompostable, biosourcée sur le sol français, note Raphaël Keller. Plusieurs industriels nous ont annoncé leur intention d'investissement si des mesures réglementairse étaient prises pour favoriser le développement de cette filière en France".
L'amendement proposé interdit la mise à disposition des sacs de caisse en plastique et promeut l'usage des alternatives compostables ou composés de matières biosourcées.
Enfin, cet axe vise à faciliter l'accès aux ressources d'origine végétale à un prix compétitif tout en préservant les intérêts des agro-industries. "La question qui est posée est celle des barrières douanières qui pèsent sur l'importation ou l'exportation des produits, constate Raphaël Keller, nous devrons résoudre le conflit d'intérêt entre les agro-industrise, les producteurs des matières biosourcés sur le sol national et les chimistes : un groupe de travail devrait faire des propositions d'ici début 2015".
Encourager les biocarburants de seconde génération en maintenant la première
Le troisième axe vise le développement des biocarburants avancés en complément des biocarburants de première génération : la production de biocarburants à partir de matières premières produites en interculture tout en encourageant le biodiesel à base de déchets, l'éthanol et biodiesel 2G, ou le biométhane.
"Il y a aujourd'hui une instabilité réglementaire qui conduit les acteurs à une position d'attente avant d'investir à nouveaux", pointe Raphaël Keller.
Autre point de blocage : les acteurs considèrent que beaucoup d'argent a été investi dans la première génération et souhaitent que la priorité soit de les rentabiliser. Un groupe de travail devrait proposer des pistes fin 2014.
Enfin, le dernier axe ambitionne de réduire l'impact environnemental de la chimie mais également des autres secteurs industriels : production d'énergie plus performante (chaudières biomasse, méthanisation) et amélioration de l'efficacité énergétique, utilisation de matières premières recyclées, élaboration de nouveaux matériaux pour répondre aux besoins de la transition énergétique et de la lutte contre le changement climatique (gaz fluorés de 4ème génération, filière industrielle de la super isolation, etc.)
Certains points de blocage transversaux seront abordés dans d'autres instances : comme par exemple les questions que soulève la réglementation sur la prévention des risques sismiques (traité au sein du comité stratégique de filière chimie et matériaux).