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Extension des consignes de tri (1/2) : comment Citeo a pris la main sur les plastiques peu ou pas recyclés

À la faveur de l'extension des consignes de tri, l'éco-organisme de la filière de REP emballages ménagers a ajouté une corde à son arc. Dorénavant, il gère directement le recyclage de certains plastiques, plutôt que de simplement le financer.

Décryptage  |  Déchets  |    |  P. Collet
Extension des consignes de tri (1/2) : comment Citeo a pris la main sur les plastiques peu ou pas recyclés

Citeo, le principal éco-organisme de la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) d'emballages ménagers, va bientôt annoncer qui recyclera les emballages plastique peu ou mal recyclés. Il s'agit de la dernière étape d'une réforme qui doit donner naissance à de nouvelles filières de recyclage des plastiques. Surtout, progressivement, la REP emballages ménagers passe d'un modèle financier (où les éco-organismes financent la collecte et le tri) à un modèle opérationnel (où ils deviennent propriétaire de la matière et organisent le recyclage).

Retour sur les principales étapes d'un bouleversement enclenché il y a cinq ans, ainsi que sur les interrogations qu'il soulève.

Regrouper les plastiques peu ou pas recyclés

Avec l'extension des consignes de tri (ECT) à tous les plastiques, les centres de tri ont vu arriver de nouvelles résines. La première option retenue a été de les regrouper selon leurs similarités physiques et en termes de polymères. Mais ces premiers standards de tri dégradaient la qualité et les débouchés des flux historiques. C'était en particulier le cas des pots et barquettes en polystyrène (PS) qui perturbent le recyclage des emballages rigides en polyéthylène (PE) et polypropylène (PP).

En 2019, entre en vigueur une première réforme avec la création d'un « flux en développement » qui regroupe les bouteilles en polyéthylène téréphtalate (PET) opaque ou foncé, les barquettes en PET clair, les emballages en PS et les rigides complexes. La création de ce flux reçoit un accueil favorable, rappelle Christophe Viant. « Ce n'était pas plus mal de mettre les barquettes en PET dans ce flux, car il fallait développer des techniques adéquates pour le recycler avec les bouteilles », illustre le président de la branche plastiques de la Fédération des entreprises du recyclage (Federec). Du côté des collectivités, la solution leur assure de limiter les investissements puisque l'alternative au flux en développement aurait pu être un tri résine par résine (alors que ces nouveaux flux n'ont pas de valeur, tout au moins pour le moment). Or, les deux tiers des centres de tri appartiennent aux collectivités, selon Citeo.

“ Pourquoi confier ces plastiques à Citeo, alors que les professionnels du recyclage peuvent assurer le tri ” Christophe Viant, branche plastiques de Federec

En synthèse, les acteurs du tri voient donc dans ce nouveau flux une opportunité pour lancer de nouvelles filières de recyclage sans perturber celles existantes. Un bémol toutefois : l'inclusion des bouteilles colorées d'eau gazeuse en PET foncé réduit les recettes des centres de tri, puisque cette résine se recyclait déjà convenablement. D'aucuns y voient un moyen de réduire la facture payée par Citeo pour la gestion de ce flux en y introduisant un plastique qui a de la valeur.

Citeo peut reprendre des plastiques

Mais la réforme comporte aussi une autre nouveauté qui, elle, ne fait pas du tout consensus : Citeo peut reprendre le nouveau flux. Historiquement, les centres de tri pouvaient revendre les plastiques triés aux représentants de la filière plastique ou des recycleurs, ou à une installation de régénération de leur choix. À partir de 2019, la règlementation autorise l'éco-organisme à proposer une quatrième alternative pour les plastiques non recyclables. Dans les faits, la valeur des résines triées étant inférieure au coût du tri, le flux n'intéresse personne. Citeo reprend donc gratuitement la quasi-totalité des volumes, soit 5 000 tonnes en 2020, 15 000 tonnes en 2021 et 32 000 tonnes en 2022, détaille Romain Lebegue, directeur du développement collecte et tri de Citeo. Cette année, avec la généralisation de l'ECT, ce flux devrait dépasser les 50 000 tonnes.

Pour les acteurs historiques de la gestion des déchets, il s'agit là d'un casus belli. Leurs fédérations représentatives s'opposent à ce que Citeo devienne propriétaire de la matière et puisse sélectionner des opérateurs pour la traiter « à façon ». Elles s'opposent ainsi à ce qu'on confie à Citeo un rôle opérationnel, alors qu'auparavant il se limitait pour l'essentiel au financement de la filière.

Les fédérations attaquent donc la réforme. Leur recours est rejeté par le Conseil d'État en décembre 2022. La Haute Juridiction juge que la possibilité offerte à Citeo de reprendre ce nouveau flux ne soumet pas le marché de la reprise des déchets d'emballages à des restrictions quantitatives suffisamment importantes. Surtout, cette reprise reste optionnelle et ne crée donc pas un droit exclusif en faveur de Citeo.

Tout le flux en développement géré par Citeo

L'an dernier, nouveau basculement, avec l'accélération de l'ECT et l'ajout d'un nouveau flux « simplifié » applicable aux centres de tri non modernisés. Cette solution transitoire, qui doit disparaître d'ici deux ans, concerne les déchets plastique d'environ 15 millions de Français. Surtout, cette dernière étape introduit une reprise exclusive de tous ces plastiques peu recyclables par Citeo.

Évidemment, les gestionnaires de déchets et les collectivités se sentent lésées et déposent un nouveau recours au Conseil d'État. « Pourquoi confier ces plastiques à Citeo, alors que les professionnels du recyclage peuvent assurer le tri ? Pourquoi faire de Citeo un éco-organisme opérationnel ? » interroge Christophe Viant, dénonçant une entrave à la concurrence. L'Autorité de la concurrence leur donne partiellement raison. Elle estime que confier tous les plastiques peu ou mal recyclés à Citeo risque bien d'entraîner le verrouillage ou le cloisonnement de la filière de recyclage. Mais cette entrave à la concurrence est jugée nécessaire pour structurer la filière. L'Autorité recommande donc de réévaluer le dispositif en 2025 et d'y mettre un terme en 2030.

Sur le papier, le scénario retenu par l'Autorité de la concurrence répète l'histoire de la REP emballages ménagers. En 1992, lors de son lancement, les plastiques n'avaient aucune valeur et étaient repris gratuitement par Citeo (alors Éco-Emballages). Progressivement, l'émergence de filières de recyclage a donné à certaines résines de la valeur. En 2006, l'éco-organisme a été mis en retrait et des offres de reprise diversifiées et rémunératrices pour les collectivités ont été créées. La reprise par Citeo du flux en développement est censée jouer ce rôle en lançant de nouvelles filières de recyclage.

Mais les opérateurs des déchets craignent que, cette fois-ci, la phase d'amorçage ne rigidifie trop le système en généralisant le principe du flux en mélange (plutôt qu'un tri à la résine). Surtout, le surtri et le recyclage des lots seraient préemptés par quelques opérateurs. En substance, ils estiment que Citeo finance, avec l'argent des metteurs en marché, une filière de tri et de recyclage qui sera, au moins en partie, concurrente de celle en place aujourd'hui. En ligne de mire des opérateurs historiques : le recyclage chimique qui cherche à prendre son essor.

Réactions1 réaction à cet article

Quelle arnaque politique. Découvrir la diversité des molécules plastiques en 2023 est scandaleux, ca fait 20 ans que cela existe et quasiment toutes les filières de recyclage / valorisation sont opérationnelles en France. L'industrie l'a bien compris depuis des années et tri de plus en plus sans difficultés de filières. CITEO oriente les flux pour récupérer les déchets et s'enrichir sur notre dos en nous faisant payer des filières déjà établies. Scandaleux. On peut s'interroger pourquoi le Politique c'est fait avoir ainsi.

Isabelle42 | 01 mars 2023 à 10h06 Signaler un contenu inapproprié

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