Pourtant selon la Commission, les chalutiers européens rejettent une partie non négligeable des poissons, crustacés et mollusques qu'ils capturent, soit parce qu'ils sont trop petits, soit parce qu'ils n'ont pas assez de valeur marchande, ou encore parce que les bateaux ne disposent pas des autorisations de pêche nécessaires…
De plus, outre le fait qu'ils hypothèquent la viabilité biologique et économique des pêcheries où ils sont pratiqués, ces rejets ont des conséquences négatives pour l'environnement marin, pour l'intégrité des écosystèmes marins et pour la préservation de la biodiversité.
Voilà pourquoi les rejets vont à l'encontre non seulement des objectifs de la politique commune de la pêche mais aussi des engagements spécifiques souscrits par l'Union européenne, par exemple ceux pris dans le cadre de la Convention des Nations unies sur la biodiversité ou encore celui contracté au sommet mondial de Johannesbourg sur le développement durable, relatif à une gestion des stocks qui soit compatible avec la durabilité, indique l'exécutif européen.
D'après une étude de 2005 publiée par l'organisation des nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), les rejets dans l'Atlantique Nord étaient estimés à 1.332.000 tonnes par an, soit 13 % du volume des prises. Pour la mer du Nord, l'estimation se situait dans une fourchette de 500.000 à 880.000 tonnes. Dans les eaux situées à l'ouest de l'Irlande et de l'Écosse, le volume des rejets était compris entre 31 et 90 % de celui des captures selon la flotte considérée, l'espèce cible et la profondeur. En Méditerranée et en mer Noire, les rejets s'établissaient à 18.000 tonnes, soit 4,9 % du volume des prises. Quant au pourcentage moyen correspondant indiqué pour la mer Baltique, il ne dépassait pas 1,4 %.
C'est dans ce contexte et face à ce véritable gâchis, que la Commission vient de proposer une communication portant sur cette problématique. La pratique des rejets est erronée en ce sens qu'elle représente un gaspillage de ressources marines et qu'elle donc dépourvue de toute pertinence écologique, économique ou éthique, a indiqué M. Joe Borg, membre de la Commission chargé de la pêche et des affaires maritimes en commentant cette communication. Plus vite nous y mettrons un terme, et mieux les stocks de poisson, l'environnement marin et le secteur de la pêche s'en porteront.
La Commission estime qu'un système de gestion fondé sur des résultats définis en termes de prises accessoires maximales acceptables, assorti d'une obligation de débarquer l'intégralité des prises, incitera les pêcheurs à élaborer les solutions techniques les mieux adaptées à leurs activités. Pour tous les intéressés, ce système aurait de surcroît l'avantage d'être beaucoup plus simple à mettre en œuvre et à faire respecter, estime la commission. La communication prévoit donc la mise en place progressive, pêcherie par pêcherie, d'une interdiction des rejets, ainsi que la fixation de normes en matière de prises accessoires maximales acceptables.
Des mesures d'accompagnement sont envisagées : incitations pour une meilleure sélectivité de l'engin de pêche, fermeture de zones de pêche, obligation de changer de zone lorsqu'on y trouve des concentrations excessives de juvéniles, etc.
La structure exacte d'un tel système de gestion doit encore être étudiée et notamment ses effets sur les mesures connexes telles que les totaux admissibles de capture et les quotas, ainsi que les dispositions à prendre pour le débarquement de tout ce qui auparavant eût été rejeté à la mer , précise l'exécutif. Le débat sur les moyens de réaliser ces objectifs pourrait se poursuivre jusqu'à la fin de 2007 et les premières propositions de règlement pourraient être présentées en 2008.
Tandis que le WWF s'est réjoui de cette initiative, certains professionnels en France étaient sceptiques. Le président du Comité des pêches maritimes et des élevages marins, Pierre-Georges Dachicourt marins a contesté à l'AFP les propositions de la Commission, estimant les chiffres des rejets erronés et le problème exagéré.