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Industriels de la chimie : la communication à chaud à l'essai

Depuis deux ans, les professionnels de la chimie ont entamé une démarche volontaire de communication à chaud en cas d'incident. Les premiers résultats sont modestes et soulignent les difficultés de cette industrie à communiquer sur son activité.

Risques  |    |  S. Fabrégat
   
Industriels de la chimie : la communication à chaud à l'essai
© Venz
   
La communication à chaud en cas d'incident est une démarche volontaire qui vient en parallèle des aspects réglementaires. Il s'agit d'informer la population en cas d'incident, explique Philippe Prudhon, directeur du département technique de l'Union des industries chimiques (UIC).
Lancée avec le bureau d'analyse des risques et pollutions industrielles (BARPI), l'union française des industries pétrolières (UFIP) et le groupe d'étude de sécurité des industries pétrolières et chimiques (GESIP), cette démarche volontaire des industriels vise à informer les riverains des sites et les associations en cas d'incident. Le Grenelle de l'environnement a d'ailleurs souhaité instaurer un dialogue permanent entre les industriels de la chimie et la société. La communication à chaud pourrait devenir l'un des outils permettant d'établir une relation de confiance avec les riverains.
En cas d'incident, généralement, les entreprises communiquent avec les DRIRE et les autorités locales, sans forcément informer la population. Or, pour Yves Blein, maire de Feyzin et président de l'association nationale des communes pour la maîtrise des risques technologiques majeurs (AMARIS), s'en tenir à la communication réglementaire est souvent une fausse bonne réponse. Cette communication est un peu sèche. Pour les riverains, ne rien dire, c'est amplifier les fantasmes. Communiquer, au contraire, permet de faire tomber un certain nombre d'idées reçues. L'incident peut être perçu de manière différente par l'industriel et les riverains. Informer peut démystifier les choses.
Pourtant, les entreprises s'étant essayé à la communication à chaud ont toutes souligné les difficultés d'une telle transparence : quand communiquer ? A quel niveau de gravité ? Comment l'incident est-il perçu de l'extérieur ? Ces questions soulevées à l'issue de ces deux années d'expérience révèlent la complexité de la problématique. Une transparence totale ne risque-t-elle pas d'inquiéter outre mesure les populations ? Comment permettre une meilleure connaissance de l'industrie chimique, souvent mal vue par la population ? Autant de questions que les industriels se posent aujourd'hui.

Un bilan mitigé après deux ans d'expérience

En 2007 et 2008, 434 incidents ont été déclarés par les établissements classés SEVESO à l'inspection des risques industriels. 25 % ont fait l'objet d'une communication à chaud, c'est-à-dire d'un communiqué envoyé à la presse locale pour informer les riverains. La chimie, qui a déclaré 214 incidents sur la même période, a communiqué auprès de la population dans 28 % des cas. Dans 75 % des cas, les incidents ont concerné des rejets de matières polluantes, odorantes ou dangereuses, dans 20 % des cas un départ de feu ou un incendie, dans 8 % des cas une explosion. Selon le BARPI, il n'y a pas de différence sensible entre typologies d'événements avec ou sans communication à chaud. Néanmoins, en cas d'activation d'un plan de secours interne (POI), le taux d'information à chaud double pour atteindre un cas sur 2, contre un cas sur quatre en général.
Les statistiques montrent également une augmentation des communications à chaud au cours du deuxième trimestre 2008, ce qui traduit une meilleure prise en compte de la démarche par les industriels. Les chiffres montrent une amélioration mais nous sommes encore loin de l'objectif fixé, c'est-à-dire atteindre un taux de 90 % de communication à chaud, explique Philippe Prudhon.
Une enquête qualitative réalisée par le BARPI en avril 2008 révèle que les exploitants qui n'ont pas communiqué à la suite d'un incident considèrent d'abord comme prioritaire la gestion des aspects techniques, n'ont pas toujours eu l'autorisation de leur groupe, craignent d'affoler la population et de détériorer leur image ou manquent de moyens logistiques pour communiquer. Seule une minorité ne percevrait toujours pas l'utilité de communiquer à la société civile.

Retours sur expérience

Les industriels ayant joué le jeu soulignent ces mêmes difficultés. Selon Denis Fromage, président d'Arkema France à Pierre-Bénite, et qui a décidé de systématiser la communication à chaud en cas d'incident, nous craignons qu'il y ait un amalgame entre multiplication de communiqués d'incident et perte de contrôle de la sécurité pour la population. Le site a communiqué sur deux incidents en 2008 : une rupture de ligne haute tension et un rejet de chaux dans le Rhône. Le problème est que notre personnel est constitué de techniciens et d'ingénieurs et pas de communicants. La préoccupation première de nos équipes concerne la gestion des aspects techniques.
Pour Jean-Louis Martin, directeur d'Osiris à Roussillon, un constat : il y a un écart entre la communication sur le risque et celle qui porte sur la finalité de notre métier. Notre activité est souvent perçue comme mystérieuse et donc inquiétante pour la population. Aujourd'hui, communiquer encore plus sur le risque pourrait ternir davantage notre image.
Pourtant, bien appliquée, la communication à chaud peut permettre d'instaurer un dialogue et une relation de confiance avec les riverains : l'information à chaud doit s'inscrire dans une démarche de dialogue permanent. Les activités de chimie doivent être mieux connues par les riverains, pas seulement sous l'angle du risque mais aussi comme une opportunité pour le territoire, commente Yves Blein, le président d'AMARIS. Depuis deux ans, nous avons mis en place une conférence permanente qui réunit quatre fois par an une cinquantaine d'habitants, la direction de la raffinerie installée sur notre territoire et les élus. Nous travaillons ensemble sur les questions de nuisance, mais pas seulement. Nous abordons les questions de l'emploi, de l'économie… C'est une pratique très approfondie sur le dialogue et la concertation.
La démarche de communication à chaud est encore récente, elle s'inscrit progressivement dans la pratique et demande du temps. A chacun de trouver le modèle pour instaurer un meilleur dialogue
, conclut Philippe Prudhon. L'UIC se fixe comme ambition d'améliorer la démarche dans les années à venir.

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