Le changement climatique pourrait provoquer l'augmentation des concentrations d'ozone (O3) de l'ordre de 2 à 3 µg/m3 en moyenne en été en Europe continentale (intervalle de confiance de 95%), d'ici la fin du siècle. C'est l'une des conclusions de l'étude menée par l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris). "Que le changement climatique ait un impact sur l'ozone est quelque chose que la communauté scientifique pressentait depuis des années, souligne Augustin Colette, ingénieur à l'unité Modélisation atmosphérique et Cartographie environnementale de l'Ineris. La nouveauté est que désormais nous puissions le chiffrer".
Ce travail a été réalisé à la demande de l'Agence européenne de l'environnement. Cette dernière souhaitait mieux comprendre les fluctuations des concentrations d'ozone. "Des efforts ont été réalisés pour réduire les polluants qui ne se reflètent pas dans les tendances de concentration en ozone en Europe, explique Augustin Colette. Différents facteurs peuvent expliquer ce manque d'efficacité, et notamment les variations météorologiques d'une année sur l'autre ".
La formation de l'ozone est en effet favorisée par les fortes températures et un ensoleillement important. Ce gaz se forme en présence de dioxyde d'azote et de composés organiques volatiles (COV) sous l'effet des rayonnements (qui dissocient les molécules d'oxygène). L'augmentation du rayonnement solaire va provoquer une photodissociation plus importante tandis que celle de la température influera sur la vitesse de la réaction. Autre effet d'une envolée du thermomètre : la présence d'une plus grande quantité de précurseurs de l'ozone. "Les plantes émettent également des COV dans des quantités qui peuvent être importantes, précise Augustin Colette. Dans un climat qui devient plus chaud, ces végétaux auront tendance à fabriquer plus de précurseurs et donc renforcer la production d'ozone".
Une compilation de données de simulation anciennes
Pour évaluer l'impact du changement climatique sur la pollution à l'ozone, l'Institut a croisé différents modèles numériques de qualité de l'air avec des projections climatiques pour la période 2030 à 2100. "Nous avons demandé à des équipes européennes impliquées sur ces sujets depuis une dizaine d'années de partager leurs données avec nous : cette vision générale nous permet de disposer d'un diagnostic plus sûr et fin", note Augustin Colette.
L'étude a également montré que l'effet pénalisant du changement climatique sur la pollution à l'ozone n'était pas uniforme selon les régions. Ainsi en Europe centrale et du sud, dans des pays comme ceux de la péninsule ibérique, la France, l'Italie, la Croatie, la Grèce, différents scénarios issus de ces travaux prévoient des hausses supérieures à 5 µg/m3 et jusqu'à 10 µg/m3 pour les plus pessimistes. A l'inverse, le nord de l'Europe, la Scandinavie et les Iles Britanniques pourraient même bénéficier d'une réduction des concentrations en ozone du fait de leur climat, selon le scientifique.
Alors qu'en milieu urbain, les émissions importantes d'oxyde d'azote détruisent l'ozone, dans des zones où les rejets sont plus faibles, l'ozone peut se former et se concentrer. "L'ozone n'est pas un polluant que nous trouvons dans les zones polluées, développe Augustin Colette. Dans le cœur des grandes villes nous avons des concentrations plus faibles qu'en périphérie. Toutefois, dans le sud de l'Europe, la production d'ozone est telle que nous en retrouvons partout, même dans les centre-villes".
Reste désormais aux scientifiques à se pencher sur le second grand facteur influençant les concentrations d'ozone : le déplacement de longue distance de la pollution. "L'ozone présente une durée de vie longue dans l'atmosphère, de quelques semaines, pointeAugustin Colette. des émissions en Asie pourront avoir un impact sur l'ozone au niveau global en Europe ou aux Etats-Unis",