Le nouveau dispositif de soutien public au photovoltaïque sera présenté à la mi-février, une fois la concertation avec les professionnels du secteur achevée, a indiqué Nathalie Kosciusko Morizet lors de la séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, mercredi 12 janvier.
Alors que dans le même temps se déroulait la deuxième réunion de concertation, la ministre de l'Ecologie a précisé les propositions du gouvernement. Celui-ci envisage un recours aux appels d'offres pour le développement des centrales au sol et des tarifs d'achat dégressifs pour le bâtiment avec des critères d'intégration pour favoriser l'emploi local. Le gouvernement argue en effet que l'essor du photovoltaïque en France n'a pas profité à l'industrie française. Il envisage donc un dispositif de soutien privilégiant l'emploi local et les produits les plus vertueux pour l'environnement. C'est selon cette même idée que le gouvernement a lancé mardi deux appels à manifestation d'intérêt solaire et photovoltaïque.
Pour Stéphane Maureau, président fondateur d'Evasol, ''la commission ne raisonne ni à long terme ni à l'échelle mondiale''. Confirmant les craintes de nombreux acteurs, ''l'équipe Charpin s'en tient au rapport Charpin, sans grande écoute et avec un manque flagrant d'ambition pour le photovoltaïque''.
''Les débats ont parfois été animés et Yann Maus, PDG de Fonroche et président de l'association de l'industrie photovoltaïque française (IPF) et Jean-François Perrin, directeur général de MPO, ont quitté la salle considérant que ces propositions ne permettaient pas de soutenir les produits fabriqués en France et même au contraire favorisaient les produits chinois'', rapporte André Joffre (1) , vice-président de l'association professionnelle de l'énergie solaire Enerplan, qui a publié sur son blog un compte rendu de la réunion de mercredi.
Un objectif de puissance installée de 500 MW par an, jugé insuffisant par les professionnels
Se basant sur la programmation pluriannuelle des investissements (PPI), Pierre-Marie Abadie, directeur de l'Energie au ministère de l'écologie, a évalué à 500MW l'objectif de puissance nouvelle installée chaque année, réparti entre les centrales solaires au sol (200MW), les installations sur les bâtiments résidentiels, intégrées au bâti et de petite puissance (150MW) et les installations sur bâtiments, intégrées simplifiées au bâti, de petite et grande puissance et les installations sur bâtiments non résidentiels, intégrées au bâti, de petite puissance (150MW).
''Une unanimité s'est dégagée [chez les professionnels] pour considérer que la cible de 500MW par an était très insuffisante pour permettre l'émergence en France d'une filière industrielle'', commente André Joffre.
''Ce qu'est en train d'écrire la commission Charpin n'intéressera pas les industriels. Cela manque d'ambition'', analyse Stéphane Maureau.
Une motion commune présentée par Enerplan le 19 décembre dernier rappelait que l'objectif fixé dans le PPI était insuffisant et qu'il fallait ''revoir cet objectif à la hausse, multiplié au minimum par deux, voire trois ou quatre pour donner un avenir industriel à la France, avec un marché national suffisamment significatif pour justifier des investissements dans des outils de production locaux''.
Appel d'offres pour les centrales : un dispositif décrié
L'administration a également détaillé ses propositions pour le futur dispositif de soutien au photovoltaïque. Ainsi, pour les centrales au sol, le tarif d'achat serait remplacé par des appels d'offres régionaux, nationaux ou plurirégionaux. L'accent devra être mis sur les critères environnementaux et de recyclage, les technologies innovantes (concentration…) et le choix des terrains (friches industrielles…).
''Il y a lieu d'être très pessimiste, indique Stéphane Maureau. L'appel d'offres est soumis à l'efficacité d'une administration qui l'a montré, n'est pas motivée''. Un appel d'offres avait été lancé à la suite du Grenelle de l'environnement pour une centrale au sol par région, mais il n'a jamais abouti et a été abandonné officiellement fin 2010.
Pour France nature environnement (FNE), ''l'appel d'offre induit des effets pervers graves qui ont été particulièrement mis en évidence dans la filière éolienne avant la mise en place d'un prix de rachat. Si un investisseur a trouvé un site intéressant, il doit le garder secret le plus longtemps possible pour éviter qu'un concurrent puisse aussi l'utiliser. Les populations ne sont donc pas du tout consultées en amont. De plus, quels que soient les discours rassurants, le projet retenu par appel d'offre est toujours choisi au prix le plus bas, l'environnement en fait le plus souvent les frais''.
Tarif d'achat dégressif et réactualisé : d'accord mais…
Pour le résidentiel, l'administration envisage une limite de puissance de 16 kW et des critères stricts d'intégration au bâti. Le tarif d'achat pourrait être dégressif de 3 à 16 kW et pourrait être réévalué trimestriellement, sur une base de réduction de 10 % par an. Mais cette réduction pourrait être plus importante si le volume installé est supérieur à la cible, fixée à 37 MW par trimestre. Cette proposition rejoint celle des professionnels et des associations de défense de l'environnement. ''Mais tout dépendra de l'intelligence de la gouvernance de ce tarif d'achat. Il ne faut pas que cet ajustement se fasse à l'aveugle mais corresponde à la réalité du secteur'', analyse Stéphane Maureau.
FNE demande de son côté ''une stabilisation des conditions de raccordement et de rachat pour une durée suffisante permettant aux investisseurs de disposer d'une visibilité suffisante pour développer leurs projets, planifier leur amortissement. Concrètement, la sortie de crise doit stabiliser les conditions pour les quatre à cinq années à venir en prévoyant la décroissance régulière du prix de rachat''.
Quant aux autres critères, André Joffre souligne sur son blog ''l'inquiétude des professionnels qui croient déceler dans l'introduction d'un nouveau palier à 16 kW, la volonté de favoriser le segment de marché des petites installations au détriment des grandes toitures (à partir de 16 kW)''. Stéphane Maureau s'inquiète de son côté de ''critères trop restrictifs'', qui limiteraient le nombre d'élus. ''Cela a du sens mais il y a un réel problème de mesure'', estime-t-il.
La prochaine réunion est programmée lundi 17 janvier. La discussion concernera les moyennes et grandes toitures.