
Tous les secteurs d'activités seront touchés
Augmentation des températures moyennes, hausse du niveau des mers, multiplication des événements extrêmes, les experts du groupe ont quantifié sur chaque secteur d'activités mais de manière non exhaustive, les conséquences financières de ces bouleversements. Ainsi, à l'horizon 2050, le groupe prévoit un déficit de 2 milliards de m3 d'eau par an pour la satisfaction des besoins actuels de l'alimentation en eau potable, de l'industrie et de l'agriculture. Ce déficit ne représente qu'un peu moins de 2% du total des écoulements annuels sur le territoire national mais 14% des prélèvements actuels.
Le secteur agricole serait également affecté au niveau des rendements des grandes cultures. À titre d'exemple, la multiplication des événements de type ''canicule de 2003'' pourrait représenter en 2100 un coût allant jusqu'à plus de 300 millions d'euros par an… rien que pour le blé !
En forêt, une hausse de productivité est attendue à court et moyen termes en raison de l'augmentation des températures et du taux de CO2 dans l'atmosphère. Mais ces gains pourraient être du même ordre de grandeur que les pertes possibles par dépérissement, incendie, sécheresse, etc.
Concernant la biodiversité, des pertes économiques significatives liées à la diminution voire la disparition de services de production et de régulation tels que le stockage naturel du carbone, la prévention des crues et des inondations ou encore la régulation de l'érosion sont à envisager à des niveaux accrus à la fin du siècle. Le groupe de travail n'évalue pas précisément ces pertes à l'horizon 2050 mais rappelle les chiffres fournis récemment par le Centre d'Analyse Stratégique : les services rendus par la biodiversité pour certains types d'occupation du territoire sont estimés à 900€/ha/an pour les forêts et 300€/ha/an pour les prairies.
Le rapport propose toutefois des estimations plus précises pour certains évènements extrêmes. Le recul de la côte, par érosion ou montée du niveau de la mer, concernerait plusieurs centaines de milliers de personnes et la destruction des logements pourrait coûter plusieurs dizaines de milliards d'euros à l'échelle du siècle, pour la seule région Languedoc-Roussillon !
Les infrastructures routières seront également touchées. Une remontée d'ensemble du niveau de la mer d'un mètre représenterait un coût patrimonial, pour le réseau routier national métropolitain estimé à 2 milliards d'euros. Le coût des glissements de terrain par exemple pourrait dépasser un milliard d'euros par an en 2100 contre environ 200 millions d'euros par an aujourd'hui à l'échelle de la France. Ce coût pourrait être multiplié par un facteur 4 à 5 si l'on prolonge les tendances actuelles de l'urbanisation dans les zones à risques.
Côté énergie, le changement climatique entraînera une baisse des consommations en hiver mais une hausse en été à cause de la climatisation. L'évaluation économique de ces impacts fait apparaître une tendance d'économie d'énergie de l'ordre de 3% mais le développement spontané de la climatisation résidentielle et automobile amputerait de moitié les économies d'énergie liées au réchauffement. Sans oublier qu'en termes de production d'électricité, il faut s'attendre à une baisse de 15% des volumes d'eau disponibles pour les centrales hydroélectriques. Rien n'est en revanche précisé pour les capacités de refroissement de centrale nucléaire pourtant directement concernées par cette problématique.
En matière de santé, l'estimation a été plus délicat. Le groupe interministériel s'est surtout basé sur les coûts d'évènements climatiques déjà connus. Selon le rapport, ''le coût global pour la société dans son ensemble est considérable. On estimerait la valeur perdue par notre société du fait des décès prématurés causés par la canicule 2003 à un peu plus de 500 millions d'euros.''
En outre, côté tourisme, le groupe de travail estime qu'à l'horizon 2100, un impact significatif sur le chiffre d'affaires estival est à attendre, en raison d'une évolution à la baisse de l'attractivité touristique. Concernant les sports d'hiver, une étude de l'OCDE en 2006 indiquait que, dans les Alpes, la diminution du manteau neigeux réduira la fiabilité de l'enneigement. Dans les Alpes françaises, 143 domaines skiables bénéficient actuellement d'un enneigement fiable. En cas de réchauffement de +1°C, cela ne sera plus le cas que pour 123 stations ; pour 96 stations si le réchauffement atteint 2°C ; seulement pour 55 stations dans le cas d'un réchauffement de 4°C.
Un Plan National d'Adaptation au changement climatique attendu pour 2011
Pour limiter ces coûts, le groupe de travail propose plusieurs pistes pour déployer une politique d'adaptation : mettre en place des systèmes agricoles alternatifs plus robustes et moins exigeants en ressource en eau, prendre en compte le changement climatique dans les documents d'aménagement et de planification, intégrer la connaissance des risques sanitaires d'origine climatique aux formations initiales et continues des professionnels de santé ou encore développer un « tourisme des quatre saisons » pour réduire la dépendance par rapport à la neige et prévenir l'effet négatif de trop fortes températures estivales.
Ces pistes pourront être mobilisées et approfondis pour des exercices futurs en particulier dans la perspective du Plan National d'Adaptation au changement climatique attendu à l'horizon 2011 et annoncé par la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'Environnement (Grenelle 1).