Le Commissariat général au développement durable (CGDD) a publié le 25 juin une étude évaluant le potentiel du covoiturage pour les déplacements domicile-travail qui a été plébiscité lors de la récente période de grève de la SNCF ...
Pour ceux qui n'ont pas d'autre choix que de prendre le train, TGV, TER ou RER pour se rendre au travail… Le covoiturage repose sur le principe de partage d'un véhicule entre plusieurs passagers pour effectuer un trajet identique à un moment donné. Il constitue un des modes de transport alternatif à l'autosolisme - tout comme le vélo ou l'autopartage - et représente l'une "des réponses possibles à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation de carburants fossiles dans le secteur des transports", indique le CGDD.
Dans le cadre de cette enquête, le Commissariat a d'abord analysé plusieurs sources de données issues de l'enquête nationale transports et déplacements de 2008 (ENTD) et du recensement de la population de 2010 permettant d'identifier la localisation des déplacements quotidiens domicile-travail. Il s'agissait également de caractériser les comportements de mobilité en termes d'horaires de départ et retour au domicile et de taux d'occupation des véhicules. Les éléments d'analyse à partir de l'ENTD ou du recensement ont été réalisés par zones géographiques, afin de "mettre en évidence des comportements différenciés entre les zones urbaines et rurales ou entre l'Ile-de-France et les autres pôles urbains", précise-t-il.
L'automobile "solo" demeure privilégiée
Résultats : le CGDD constate qu'au moins 90% des allers-retours domicile-travail directs lors d'un jour ouvré moyen, quelle que soit la zone géographique, sont réalisés par "un individu voyageant seul." Le taux d'occupation des véhicules est compris entre 1,04 personne par véhicule au sein des unités urbaines du pôle urbain de Paris et de sa couronne et 1,084 pour les déplacements entre communes rurales et communes hors espace rural. "Ce faible taux d'occupation, qui montre une pratique répandue de l'automobile «solo», montre que des avancées pourraient être obtenues en matière de mobilité quotidienne et suggère un certain potentiel pour le covoiturage", indique-t-il. Les comportements "typiques", c'est-à-dire un départ entre 7h00 et 9h30 et un retour entre 16h et 20h sont "les plus répandus", malgré une diversité des pratiques. "Cette distribution croisée des horaires de départ et de retour apporte une nouvelle perspective sur les potentialités de covoiturage".
Quels gains environnementaux potentiels du covoiturage ?
En se basant sur ces données, le CGDD a effectué deux estimations de la réduction potentielle de véhicules en circulation via la pratique du covoiturage. Une estimation "basse" à savoir les individus qui peuvent covoiturer voyagent à 2 par véhicule en moyenne : celle-ci est considérée comme "la plus réaliste compte tenu des études réalisées sur le covoiturage régulier". Le CGDD se réfère en effet à un rapport de l'Ademe, paru en septembre 2010, soulignant qu'il y a en moyenne 2,5 personnes par véhicule pour les services de covoiturage propres aux entreprises, et que la majorité voyage à 2 par véhicule. L'Ademe chiffrait également à trois millions le nombre de Français pratiquant le covoiturage principalement sur des trajets entre le domicile et le lieu de travail.
Concernant l'estimation "haute" du CGDD, les covoitureurs voyageraient jusqu'à 4 par véhicule. Si on suppose un taux d'occupation maximum de 2 personnes par véhicule, l'étude conclut à un potentiel de réduction des véhicules en circulation de 2% en zones rurales et de 16% dans les zones urbaines les plus denses, lors d'un jour ouvré moyen. Soit près de 16 millions de kilomètres parcourus par jour évités.
Il en résulterait également une diminution de la consommation de carburants et d'émissions de CO2 de 4% lors d'un jour ouvré moyen (soit -2.846 tonnes d'émissions de CO2). Cette réduction est portée à 6,6% si on suppose que les personnes voyagent à 4 par véhicule. "Cela pourrait aller jusqu'à économiser 628.000 litres d'essence et 1,11 million de litres de diesel et éviter 4.537 tonnes d'émissions de CO2 si les individus sont supposés voyager jusqu'à 4 par véhicules", chiffre le CGDD.
En prenant en compte "l'irrégularité des allers-retours directs" et la possibilité d'effectuer le covoiturage uniquement la moitié d'une semaine ouvrée, le potentiel de réduction des émissions de CO2 et de consommation de carburant pourrait alors être réduit à 2 et 3,3% par semaine, ajoute-t-il.
Des freins financiers et logistiques à lever
Mais ce mode de transport gagne à être optimisé en France : il existe encore de "nombreux freins" au développement du covoiturage, "comme la peur de voyager avec des inconnus ou de perdre sa liberté ou, plus simplement, les difficultés à trouver un appariement et à constituer un équipage de manière pérenne", relève le CGDD. "Le changement de comportement doit donc être encouragé par des initiatives et des politiques publiques adaptées, en particulier au niveau local".
Le CGDD appelle à développer les plans de déplacement en entreprise (PDE) ou les plans de déplacement inter-entreprises (PDIE), mis en place depuis la fin des années 1990 "qui ont pour but de réduire la place de l'automobile « solo »". Des politiques locales de soutien financier et/ou logistique à de tels plans permettraient d'inscrire le covoiturage "comme un mode de déplacement à part entière", préconise-t-il. Des initiatives - sites internet de service de covoiturage et infrastructures telles que des aires de stationnement ou des stations de covoiturage - peuvent également être mises en oeuvre au niveau des communes ou des intercommunalités "pour faciliter les appariements", ajoute-t-il.