Alors que l'UE vient de publier de nouvelles lignes directrices et que le gouvernement français doit présenter prochainement une remise à plat des mécanismes de soutien aux énergies renouvelables, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) publie, le 17 avril, un rapport sur le coût et la rentabilité des énergies renouvelables (éolien terrestre, photovoltaïque, biomasse) en France métropolitaine. L'objectif : évaluer ces coûts et vérifier que les dispositifs de soutien ne donnent pas lieu "à des profits excessifs". En 2014, le solaire a représenté 58% des surcoûts de soutien aux énergies renouvelables, l'éolien terrestre 21% et la biomasse 5%.
La CRE répond par ailleurs à une demande de la Cour des comptes, qui souhaitait, en juillet 2013, "la mise en place de dispositifs de connaissance des coûts de production des différentes filières bénéficiant de l'obligation d'achat permettant de donner toute la visibilité requise pour éclairer les décisions de la puissance publique". Le même exercice sera réalisé prochainement pour la cogénération, l'hydroélectricité et le biogaz.
Eolien : prendre en compte le productible et la durée réelle d'exploitation
Fin 2012, la quasi-totalité des 7.574 MW d'éolien terrestre installés en France bénéficiait de tarifs d'achat, note la CRE. Celle-ci constate pour certains parcs éoliens une "rentabilité excessive" et fait une série de recommandations pour que le "niveau de soutien à l'éolien terrestre [soit] proportionné aux coûts de cette filière, et maîtriser ainsi le développement des charges de service public de l'électricité". Elle estime que les appels d'offres sont préférables au tarif d'achat unique, et fait des propositions pour rendre plus modulable le tarif d'achat.
Les coûts d'investissement représentent la majeure partie des coûts de production éolien et sont composés aux trois-quarts du coût des éoliennes. Or, ce coût "suit actuellement une tendance à la baisse vraisemblablement amenée à se poursuivre à l'avenir". Aujourd'hui, le prix d'achat d'une éolienne se situerait entre 950 et 1.100 k€/MW. La CRE propose donc une révision régulière du tarif d'achat, afin de prendre en compte l'évolution de ces coûts.
La rentabilité des parcs éoliens est très variable et dépend du volume d'énergie produit. Cela conduit, "pour les parcs bénéficiant des meilleures conditions de vent, à des rentabilités très supérieures voire excessives au regard du coût moyen pondéré du capital de référence" (CMPC). La CRE préconise donc de prendre en compte le productible dans les tarifs d'achat. Elle propose deux solutions : avancer la dégressivité du tarif d'achat qui ne commence, pour l'heure, que cinq ans avant la fin du contrat d'achat. Ou moduler le tarif chaque année, en introduisant des paliers de rémunération décroissants en fonction du productible atteint au cours de l'année.
Alors que le tarif d'achat est conçu pour rentabiliser les installations pendant la durée du contrat (quinze ans), la plupart des porteurs de projets interrogés affirment vouloir exploiter leurs parcs pendant vingt ans, voire vingt-cinq ans. "Dès lors, les installations, après avoir été intégralement amorties et rémunérées sur 15 ans, continueront à valoriser l'électricité qu'elles produisent sur les marchés pendant 5 à 10 années supplémentaires", note la CRE. Une révision de la durée de contrat pour qu'il corresponde à la durée réelle d'exploitation est donc préconisée.
La CRE précise ne pas avoir pu prendre en compte l'impact, sur les coûts et la rentabilité des parcs, des évolutions réglementaires récentes (loi Brottes, S3REnR). Elle "procédera aux analyses nécessaires dès lors que les premiers parcs relevant de ces dispositions auront été mis en service".
Photovoltaïque : les appels d'offres permettent de se rapprocher des coûts réels
Comme pour l'éolien, le coût d'achat et de pose des modules et équipements électriques constitue la majeure partie des coûts d'une centrale photovoltaïque. Or, les coûts des modules, qui représentent 40% de l'investissement total, ont fortement baissé au cours des dernières années. Ce qui a entraîné des taux de rentabilité "excessifs" pour les contrats conclus avant le moratoire en 2010, en moyenne 11% supérieurs au CMPC de référence. Les révisions tarifaires successives ont, depuis, permis d'abaisser ce taux de rentabilité, qui se situe à 6% pour les installations actuellement en projet. "Toutes ces installations se développent dans le cadre de la procédure d'appel d'offres, ce qui suggère que l'exercice de la concurrence incite les producteurs à demander un prix proche de leur coût réel de production", analyse la CRE. Elle recommande donc de généraliser le recours aux appels d'offres pour les filières matures et le maintien de tarifs d'achat dynamiques.
L'analyse ne se penche pas sur les installations ayant bénéficié des tarifs dégressifs mis en place à partir de 2013, qui feront l'objet d'une prochaine étude.
Biomasse : des tarifs d'achat régionalisés
Enfin, pour la filière biomasse, la rentabilité dépend des coûts d'approvisionnement (qui constituent le principal poste de coût d'exploitation) mais aussi des débouchés pour la production de chaleur. La CRE constate en effet des "disparités notables en termes de coûts et de risques supportés". Elle juge donc les appels d'offres pertinents "pour développer des installations avec une rentabilité raisonnable", à condition de mettre en place des tarifs d'achat régionalisés "comportant des clauses contraignantes en matière notamment de contrôle".