
Baisse des investissements à court terme
Si Jean-Louis Borloo, interrogé à ce sujet, s'est montré optimiste, tous ne partagent pas ce point de vue avec autant de ferveur. Selon Michèle Pappalardo, déléguée interministérielle au développement durable, il ne faut pas se voiler la face. Comme c'est le cas aujourd'hui pour tous les investissements, un certain nombre de projets d'efficacité énergétique et d'énergies renouvelables vont avoir du mal à trouver les financements.
André Antolini, président du Syndicat des énergies renouvelables, est du même avis : la crise financière devrait avoir un impact à court terme sur le secteur, notamment au niveau des investissements.Pourtant, je partage néanmoins le point de vue du ministre d'Etat : si dans l'immédiat la crise aura des répercutions, on devrait assister à long terme à un développement massif des énergies renouvelables.
Pour Elie Cohen, économiste et directeur de recherche au CNRS, l'effondrement du prix des énergies fossiles ces derniers mois constitue un facteur supplémentaire d'inquiétude. Aujourd'hui on anticipe encore une baisse du prix du pétrole, ce qui affaiblit les investissements dans les EnR. On le constate déjà : le financement de projets a baissé d'un quart au cours du troisième trimestre de l'année. Pour les deux années à venir, nous connaîtrons des passages difficiles qui vont remettre en cause de grands projets.
Selon l'économiste, il reste néanmoins quelques raisons de rester optimiste quant au développement futur des énergies renouvelables : nous entendons aujourd'hui parler d'un new deal vert, notamment aux Etats-Unis. Certains proches d'Obama l'encourageraient dans ce sens. Rappelons que c'est après la crise de 1929 que de grands projets d'infrastructures ont été lancés.
Donner de la visibilité aux industriels pour favoriser les investissements
La conjoncture actuelle pousse de nombreux secteurs industriels à opérer un repli quant à leurs politiques environnementales. Aujourd'hui, les objectifs européens du 3 x 20 sont remis en cause par un certain nombre de secteurs industriels, analyse Elie Cohen. Un front semble se constituer autour de l'Italie, la Pologne et de certains industriels allemands plaidant pour une baisse des objectifs. Il y a l'idée, chez certains, qu'on ne va pas s'affliger de nouvelles mesures punitives.
D'autres au contraire plaident pour un véritable Green deal, à l'image d'Arthouros Zervos, président de l'European renewable energy council (EREC) : il faut permettre à ces ambitieux engagements environnementaux de prospérer en chances économiques pour le monde entier.
La croissance verte, solution à la crise financière ? Pour Jean-Louis Borloo, la bataille du développement économique se joue effectivement sur l'énergie et devrait créer 400 à 500.000 emplois dans les 8 à 10 années à venir. La mobilisation industrielle est capitale.
Beau discours répondent les industriels, mais ceux-ci demandent davantage de garanties aux gouvernements et à l'Union européenne.
L'exemple allemand de développement massif de l'industrie solaire est souvent cité. Réglementations favorables, incitations financières, l'Etat a mis en œuvre tout un arsenal de mesures pour appuyer le développement du secteur. Résultat ? Le pays se positionne aujourd'hui comme un leader de l'industrie solaire dans le monde. Pour Michèle Pappalardo, il faut apprendre des Allemands leurs pratiques et leurs politiques industrielles.
Du côté des industriels français, la mise en place d'une véritable politique industrielle des énergies renouvelables est plébiscitée : Nous attendons du Grenelle un cadre clair pour que nous puissions avoir une visibilité à long terme, explique Bertrand Durrande, directeur de l'unité Energies renouvelables chez Areva. L'objectif de 23 % d'énergies renouvelables dans la consommation énergétique nationale inscrit dans le texte du Grenelle I et la plan en 50 mesures présenté par Jean-Louis Borloo le 17 novembre dernier devraient permettre aux professionnels une projection à moyen terme. Jugées plutôt positives par les industriels, ces mesures paraissent néanmoins à leurs yeux insuffisantes. Quelques zones d'ombres subsistent, concernant notamment les éoliennes et l'avenir du tarif d'achat de l'électricité après 2010.