Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Cuve de l'EPR : Areva bénéficie de dérogations pour traiter les difficultés rencontrées

L'application des règles de conformité des équipements sous pression nucléaires bénéficie d'un régime dérogatoire. Ces nouvelles dispositions visent notamment la cuve de l'EPR de Flamanville qui pourrait être autorisée, malgré la présence de défaut.

Risques  |    |  P. Collet

Le 3 janvier 2016, un arrêté publié au Journal officiel est venu modifier certaines règles applicables aux équipements sous pression nucléaires (ESPN), tels que les cuves des réacteurs nucléaires. Le texte introduit deux régimes dérogatoires, alors qu'Areva et EDF rencontrent de grandes difficultés à respecter la réglementation en vigueur.

L'arrêté, particulièrement complexe, instaure notamment "une possibilité pérenne de dérogation permettant de traiter, au cas par cas, des difficultés de respect des exigences de la réglementation" relatives aux ESPN, explique l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) dans son avis préalable à la publication de l'arrêté (1) . Les ESPN sont les équipements sous pression d'un réacteur nucléaire contenant du fluide nucléaire, tels que la cuve, les générateurs de vapeur ou la robinetterie et les conduits du circuit primaire.

Ce régime dérogatoire se justifie pour deux raisons, explique l'ASN. Tout d'abord, "les dispositions transitoires initialement prévues par l'arrêté du 12 décembre 2005 (…) n'ont pas été suffisantes pour permettre la transition entre l'ancienne et l'actuelle réglementation". Ensuite, ces équipements "sont destinés à des exploitants identifiés, [sur lesquels] l'ASN et les organismes qu'elle agrée exercent un contrôle particulier, notamment après leur mise en service".

Des ratés particulièrement dommageables

Ces nouvelles dispositions répondent aux difficultés rencontrées par les constructeurs pour respecter la nouvelle réglementation instaurée en 2005. L'enjeu est d'autant plus important que leur mise en place intervient à la veille du "grand carénage", c'est-à-dire les travaux prévus par EDF pour prolonger la vie de ses réacteurs français.

L'exemple le plus fameux des difficultés rencontrées par Areva et EDF est la cuve de l'EPR en construction à Flamanville (Manche) qui a fait les frais de cette réglementation. En avril 2005, l'ASN a fait état de la découverte d'anomalies dans la composition de l'acier de certaines zones du couvercle et du fond de la cuve du réacteur de l'EPR de Flamanville. Cette découverte est directement liée à l'application de l'arrêté ESPN, a expliqué le président de l'ASN devant la commission des Affaires économiques du Sénat. Si la réglementation de 2005 ne renforce pas les contraintes techniques applicables à ces équipements, a rappelé Pierre-Franck Chevet, elle impose des études de qualification plus poussées. La cuve aurait posé problème, "même par rapport aux anciennes règles", a-t-il assuré. Aujourd'hui, Areva doit réaliser une nouvelle batterie d'examens afin d'assurer que la cuve peut fonctionner convenablement malgré les défauts identifiés. Parallèlement, l'ASN a ouvert une procédure dérogatoire d'homologation. Ces problèmes, et surtout le fait que l'ASN les aient rendu publics, avait ouvert une "crise" suffisamment profonde entre le gendarme du nucléaire et les industriels du secteur pour que d'anciens ingénieurs d'EDF montent au créneau et remettent en cause l'indépendance de l'Autorité de sûreté nucléaire.

Mais il ne s'agit pas de la seule difficulté rencontrée par les fabricants d'équipement sous pression nucléaires. En janvier 2015, l'ASN avait déjà signalé à Areva et EDF des problèmes concernant le remplacement des générateurs de vapeur du réacteur 3 du Blayais (Gironde) : des problèmes de coordination entre Areva et EDF, et des justifications et démonstrations de qualité "régulièrement insatisfaisantes". Là encore, Areva "n'[avait] pas apporté toutes les justifications de sûreté requises en vue de leur montage puis de leur mise en service". Si les problèmes ont finalement été résolus, la durée d'arrêt de la tranche a été de 14 mois, faisant passer la facture de la visite décennale de 112 millions d'euros initialement prévus à quelque 300 millions, voire plus, le coût du dépassement n'ayant pas été rendu public.

Deux types de dérogation

Le nouvel arrêté introduit donc deux types de régime dérogatoire. Le premier est permanent et vise des situations imprévues. "En cas de difficulté particulière et sur demande dûment justifiée (…) l'Autorité de sûreté nucléaire peut, par décision (…) autoriser l'installation, la mise en service, l'utilisation et le transfert d'un équipement sous pression nucléaire ou d'un ensemble nucléaire n'ayant pas satisfait à l'ensemble des exigences [législatives et règlementaires]", prévoit l'arrêté. La demande de dérogation devra être accompagnée d'une analyse, "menée en lien avec l'exploitant", des conséquences réelles et potentielles des difficultés rencontrées. Dans ce cas, l'équipement ne fait pas l'objet "[d'une] déclaration de conformité, et les exigences relatives au suivi en service appelant l'attestation, le certificat ou le procès-verbal normalement délivré à la fin de la procédure d'évaluation de la conformité ou la déclaration de conformité du fabricant seront considérées comme satisfaites".

La seconde dérogation repousse l'application de la réglementation ESPN à 2019. Initialement, l'arrêté de 2005 prévoyait, à titre transitoire, que les nouvelles règles ESPN s'appliquent progressivement aux équipements concernés. Le projet d'arrêté soumis à consultation en octobre dernier prévoyait de reporter leur application pour certains équipements et ensembles d'équipements en comportant au moins un dont la fabrication a commencé avant le 19 juillet 2016. Finalement, le texte publié repousse de deux ans et demi la date envisagée à l'automne : "L'ASN peut adapter par décision les dispositions [relatives à la conformité] pour certains ESPN, parties d'ESPN et ensembles nucléaires dont la fabrication a commencé avant le 31 décembre 2018". La procédure est similaire à celle du régime dérogatoire répondant aux difficultés ponctuelles.

1. Télécharger l'avis de l'ASN
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-25992-avis-asn.pdf

RéactionsAucune réaction à cet article

Réagissez ou posez une question au journaliste Philippe Collet

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires

Partager

Multitec® BioControl : analyseur de biogaz à poste fixe et mobile SEWERIN
Solaire : développez vos projets au sol ou sur toiture industrielle
 VDN GROUP