A l'occasion de la huitième séance plénière du comité national du débat sur la transition énergétique, la question de la méthodologie appliquée a été le cœur des discussions. Après plusieurs mois de travaux, le débat entre en effet dans une phase critique : celle de synthétiser les quelque 200 propositions – plus ou moins consensuelles – issues des sept groupes de travail et d'en tirer les principales recommandations à fournir au gouvernement. Il ne s'agit plus de proposer mais bien de débattre afin de coucher sur le papier les éléments visant à éclairer les choix politiques qui devront se traduire dans la future loi sur la transition énergétique. Et à ce jeu là, tous les acteurs du débat n'ont pas les mêmes ambitions.
La difficile construction du consensus
En préparation de cette huitième séance, le comité de pilotage a demandé aux membres du conseil national de hiérarchiser par ordre de priorité les mesures présentées par les groupes de travail. Un document de synthèse a donc été établi. Il fait ressortir plusieurs tendances et précise le nombre de membres ayant mis en avant chaque mesure. On y apprend que la rénovation du parc de bâtiments existants, la création d'une contribution climat-énergie et la réduction de l'impact des transports font parti des trois priorités qualifiées de "thèmes clefs prioritaires". Des conclusions et une méthodologie qui ne sont pas du goût du Medef qui a fait pression pour que ce document ne soit pas étudié en séance plénière au risque de mettre fin à sa participation au débat. Selon Les Echos, qui s'est procuré un document explicatif interne au syndicat, le Medef a estimé que "le secrétariat général du débat remet ainsi en cause les règles élémentaires de représentativité et le principe de la gouvernance par collège".
Le comité de pilotage a donc été contraint de présenter un autre document qualifié de "plan B" par l'animatrice du débat Laurence Tubiana. Présentant les grands principes consensuels, ce "plan B" a lui aussi provoqué l'ire de certains membres qui l'accuse de ne pas faire ressortir les dissensus exprimés sur certaines mesures. Les éléments de cadrage du débat - respect des engagements européens, mix électrique avec 50% de nucléaire en 2025, et respect du facteur 4 en 2050 - ont même été remis en cause par les syndicats. Ce qui n'a pas manqué de provoquer colère et résignation dans les rangs des ONG : "le cadrage du débat était connu de tous, certaines ONG qui ne le partageaient pas ont d'ailleurs refusé de participer, le remettre en question aujourd'hui c'est démontrer que l'écoute n'est pas au rendez-vous et l'envie de changer non plus", a déclaré Stéphen Kerckhove d'Agir pour l'environnement. "Nous sommes au même point qu'au début du débat", constate Matthieu Orphelin de la Fondation Nicolas Hulot.
Pour apaiser les tensions, Laurence Tubiana a rappelé que "les mesures consensuelles des groupes de travail constituent le minimum comme l'avait précisé la ministre de l'Ecologie au lancement du débat. Je ne désespère pas que l'on puisse faire un pas de plus." L'animatrice a ainsi appelé les membres du conseil national à mettre en place une nouvelle méthode de sélection et de présentation des mesures. Cette méthode devrait être adoptée le 8 juillet prochain et l'ont devrait connaître les recommandations finales du conseil national le 18 juillet.
Les ONG ont toutefois annoncé qu'elles ne souhaitaient pas "enterrer le document de synthèse" et demandent à la ministre de l'Ecologie "son analyse de cet épisode affligeant au regard du débat démocratique en cours". Plus particulièrement, elles demandent à ce que "les priorités listées dans ce document soient dûment prises en considération dans la future synthèse des recommandations du débat". Les ONG "tireront de la réponse de la ministre les conclusions qui s'imposent pour la suite du débat."