Une semaine après la présentation du plan de relance, les ministères de l'Économie et de la Transition écologique lancent le volet décarbonation de l'industrie. L'objectif est de répondre aux objectifs de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) qui prévoit une réduction des émissions de plus de 30 % d'ici 2030. De 81 millions de tonnes de CO2 émises en 2015, le secteur doit atteindre un budget carbone de 51 MtCO2 sur la période 2029-2033. Le scénario du Gouvernement mise, dans un premier temps, sur l'amélioration de l'efficacité énergétique des usines et la substitution des combustibles fossiles, puis sur l'électrification des procédés, voire l'hydrogène pour certains secteurs. « Les gains d'efficacité énergétique varient en fonction des filières. En 2030, le scénario suppose des gains entre 10 % et 30 %. En 2050, les gains augmentent entre 20 % et 40 %. Le taux d'électrification augmente, quant-à-lui, légèrement entre 2015 et 2030 (de 38 % à 41 %) puis plus rapidement jusqu'en 2050 pour atteindre plus de 70 % de la consommation finale à cet horizon », peut-on lire dans la SNBC.
Reste à motiver les industriels. C'est tout l'objet des deux appels à projets (AAP) et de l'appel à manifestation d'intérêt (AMI) lancés aujourd'hui. 1,2 milliard d'euros leur est consacré d'ici 2022, dont 200 millions d'euros dès cette année, puis 500 millions d'euros par an en 2021 et 2022. Les deux AAP se clôtureront le 20 octobre prochain avec une sélection des projets mi-novembre et le versement des premières aides en décembre. Le critère de sélection principal sera le coût de la tonne de CO2 évitée. « Nous espérons travailler sur les dix sites les plus émetteurs de carbone, et nous pensons pouvoir éviter 9 millions de tonnes d'émissions dans ces champs d'action », a expliqué Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée à l'industrie à l'occasion de la visite du site de Dunkerque d'Arcelor Mittal. « C'est le moment de se saisir de ce sujet », estime-t-elle
Une nouvelle formule pour l'AAP BCIAT 2020
En complément du fonds chaleur et du dispositif des certificats d'économies d'énergie, le Gouvernement crée un fonds décarbonation pour mettre en place un soutien financier dans la durée. Les projets industriels soutenus bénéficieront d'aides à l'investissement de la part de l'Ademe, comme c'est traditionnellement le cas dans le cadre de l'Appel à projet biomasse chaleur industrie agriculture et tertiaire (BCIAT), mais également d'une aide de fonctionnement sur 15 ans à partir de la mise en service de l'installation. Des versements réguliers seront assurés à l'industriel. Mais ce niveau d'aide sera recalculé tous les ans en fonction de l'évolution du prix de l'énergie de référence et de la production thermique.
Par contre, les projets visant à substituer des combustibles fossiles par des combustibles solides de récupération (CSR), issus de refus de tri de déchets, ne seront pas éligibles. « Les projets CSR feront l'objet d'un AMI spécifique en octobre prochain avant d'intégrer en 2021 cet appel à projet BCIAT », précisent les services ministériels. Le dépôt de dossier simultané aux AAP Énergie CSR et BCIAT est donc proscrit.
Un appel à projets sur l'efficacité énergétique des procédés
Cet appel à projets s'adresse à toutes les personnes morales privées qui envisagent d'améliorer leur process afin de réduire leur consommation d'énergie tout en produisant autant. Les porteurs de projets via un tiers-financement ou un contrat de performance énergétique sont éligibles. Les projets doivent être assez conséquents avec un budget de 3 millions d'euros au minimum et ils doivent mettre en oeuvre des technologies matures et non des démonstrateurs. L'AAP est cumulable avec les CEE. L'aide versée prendra la forme de subventions.
Pour les projets plus modestes, un guichet de demande de subvention sera ouvert auprès de l'Agence de service et de paiement.
Un AMI pour développer de nouveaux procédés industriels
Cette ouverture des deux AAP s'accompagne du lancement d'un appel à manifestation d'intérêt (AMI). Cet AMI IndusDECAR vise à soutenir le déploiement de solutions de décarbonation des procédés qui ne rentreraient pas dans les cases des deux AAP présentés ci-dessus comme, par exemple, l'électrification des process par l'installation de fours électriques, résistances, électrochimie, séparation membranaire, plasma, pompes à chaleur, etc.
Selon une première évaluation publiée en juin 2020 par l'Ademe, 18 % de la consommation de combustibles pour les process thermiques, soit 41,6 TWh, seraient substituables en recourant à des techniques électriques. Les résistances peuvent se substituer aux combustibles pour des usages couvrant la plupart des secteurs de l'industrie. Le recours aux pompes à chaleur (PAC) pour l'électrification concerne, pour une très large part, l'agroalimentaire, la chimie organique et le papier. Tandis que les membranes sont un substitut applicable uniquement dans l‘industrie laitière.
La date de clôture de l'AMI est fixée au 9 novembre. A vos projets !