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La décarbonation de l'industrie se fera à l'électricité et au gaz

Tandis que le Gouvernement prépare son projet de loi Industrie verte, plusieurs industriels se sont déjà engagés à décarboner leurs procédés. RTE et GRDF s'attèlent chacun à pourvoir l'électricité, l'hydrogène ou les gaz renouvelables nécessaires.

Energie  |    |  F. Gouty
La décarbonation de l'industrie se fera à l'électricité et au gaz

Tous les feux de la décarbonation passent progressivement au vert pour l'industrie. « L'équation économique est là », reconnaît Jean-Philippe Bonnet, directeur adjoint du pôle stratégie, prospective et évaluation chez RTE. L'Europe cherche à reconquérir sa souveraineté et sa compétitivité industrielle ainsi qu'à réduire drastiquement sa dépendance aux énergies fossiles, souvent importées. La France, notamment, présentera prochainement un projet de loi allant dans le sens de cette « réindustrialisation verte ». Par ailleurs, la suppression annoncée des quotas gratuits de carbone dans le cadre de l'évolution du système d'échange européen (ETS) devrait être une nouvelle manière d'inciter les entreprises les plus émettrices à investir plus concrètement dans la décarbonation.

Les cinquante sites industriels les plus émetteurs de France (responsables de 43 millions de tonnes d'équivalent de CO2 par an, soit environ 10 % du bilan carbone national) sont prêts à s'engager dans cette démarche, que ce soit en modifiant leur approvisionnement énergétique ou en transformant leurs infrastructures. Mais alors que le pays s'apprête à élaborer sa future Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), vers quel saint se tourner : l'électrification ou les gaz renouvelables ?

Dix à douze gigawatts de nouvelles capacités électriques demandées

Ces dix-huit derniers mois, les demandes de raccordement électrique, formulées par des entreprises implantées dans 34 de ces 50 sites industriels (à savoir, ceux déjà raccordés au réseau de transport de l'électricité de RTE), ont doublé. Et « ce qui auparavant représentait des dossiers d'une dizaine de mégawatts (MW), comprend aujourd'hui des projets de plusieurs centaines ou milliers de mégawatts », souligne Rachid Otmami, directeur adjoint du pôle clients chez RTE. Quatre zones sont particulièrement demandeuses : Dunkerque, avec l'équivalent de 3 à 4 gigawatts (GW) en projets, Fos-sur-Mer, avec 4 à 5 GW, la vallée de la Seine, avec 2 à 3 GW, et la vallée de la Chimie, avec plus de 1 GW.

Le sidérurgiste ArcelorMittal s'est par exemple engagé à électrifier ses hauts-fourneaux de Dunkerque et de Fos-sur-Mer, responsables d'environ 19 millions de tonnes de CO2 par an au total. Domo Chemicals et TotalEnergies, quant à elles, souhaitent « verdir » l'hydrogène consommé grâce à l'installation d'électrolyseurs dans leurs raffineries respectives de Saint-Fons (Rhône) et de Gonfreville (Seine-Maritime). D'autres entreprises, comme Verkor ou Carbon, prévoient également d'installer leurs « méga-usines » (de fabrication de batteries pour l'une et de panneaux photovoltaïques pour l'autre) à Dunkerque et à Fos-sur-Mer.

Ces demandes d'électrification, à des stades différents de maturité, imposent un renforcement drastique du réseau d'électricité dans ces zones qui, aujourd'hui, ne sont pas capables d'accueillir plus de 1 ou 2 GW de consommation supplémentaire. Selon RTE, l'adaptation du réseau nécessaire dans ces zones d'ici à 2030 représente des investissements chiffrés à près de deux milliards d'euros. « Nous travaillons actuellement avec la Commission de régulation de l'énergie (CRE) à un système de mutualisation des coûts de raccordement, entre RTE et nos clients industriels, par "code barre" : de sorte que chacun contribue à la hauteur des mégawatts raccordés », assure Rachid Otmami.

En parallèle, pour l'aider à mieux planifier ces travaux, le gestionnaire du réseau compte sur la mise en œuvre des mesures de la loi d'accélération des énergies renouvelables. « La règle actuelle du "premier demandeur, premier servi" risque d'amener le développement de certains projets à bloquer le raccordement des autres, pointe Jean-Philippe Bonnet. Nous comptons donc sur la parution, d'ici l'été, du décret d'application laissant aux préfets la possibilité de prioriser de tels projets. » Le tout, dans l'optique d'économiser potentiellement deux à trois années de démarches administratives.

L'industrie pourra-t-elle se passer du gaz ?

Quid de l'électricité à fournir ? Ces sites industriels en disposeront-ils suffisamment pour achever leur décarbonation en temps voulu ? Pour RTE, il existe en effet un risque de déséquilibre entre l'offre et la demande, quand bien même le réseau peut se reposer sur les interconnexions. « La relance du nouveau nucléaire n'aboutira qu'à l'horizon 2035, rappelle le directeur adjoint de la stratégie et de la prospective de RTE. D'ici là, il y a un choix politique à opérer sur la disponibilité du parc nucléaire existant et le développement des énergies renouvelables pour répondre à ces demandes de décarbonation. »

“ Il y a de la place pour toutes les énergies décarbonées ” Jean-Philippe Bonnet, RTE
D'autant qu'avec la paralysie partielle du nucléaire français l'hiver dernier, la production d'électricité à partir de charbon ou de gaz « a atteint un niveau record en cinq ans », atteste Laurence Poirier-Dietz, directrice générale de GRDF. « Si la France continue sur la voie de l'électrification alors même que les nouveaux réacteurs nucléaires sont en chantier, elle risque de devoir continuer de recourir, au moins en partie, à des énergies fossiles », argue la directrice du gestionnaire de la distribution du gaz en France. Autrement dit, le gaz, de préférence d'origine renouvelable, reste indispensable à la production d'électricité. Et parfois, il constitue même une condition sine qua non pour certains industriels.

Citant les travaux de l'Alliance industrielle pour la compétitivité et l'efficacité énergétique (Allice), Laurence Poirier-Dietz insiste sur le fait que « 70 % des procédés thermiques industriels ne pourront pas être électrifiés avant 2035, d'où la nécessité de miser sur une plus grande efficacité énergétique des équipements industriels au gaz ». D'après GRDF, remplacer les brûleurs historiques par une nouvelle génération plus performante conduirait à une économie d'énergie de 60 %. En outre, les gaz renouvelables, comme le biométhane, se substituent aisément au gaz naturel sans « altérer les installations industrielles, de production ou de stockage ». Parier sur les « gaz verts » (bien moins émetteurs sur l'ensemble de leur cycle de vie que le gaz naturel) reviendrait, en quelque sorte, à une « transition douce » : dix millions de tonnes de CO2 pourraient être évitées chaque année. Cependant, à production équivalente, le biométhane injecté actuellement dans le réseau n'équivaut qu'à un peu plus d'un réacteur nucléaire (environ 6 térawatts-heure pour une tranche de 900 MW, contre 9 térawatts-heure par an pour les 514 méthaniseurs de France).

Quoi qu'il en soit, le gaz et l'électricité ne sont pas ennemis jurés. Comme le souligne Jean-Philippe Bonnet, de RTE, la décarbonation de certains industriels très émetteurs ne pourra être réalisée sans une combinaison de l'un comme de l'autre. Le projet d'ArcelorMittal, par exemple, misera autant sur l'électrification de ses fours que sur l'injection de gaz dans ses procédés. Pour décarboner la réduction directe du fer (nécessaire pour obtenir un minerai exploitable), le sidérurgiste compte d'abord remplacer le charbon par du gaz, puis par de l'hydrogène vert. « Décarboner l'industrie reste très complexe et demande une connaissance intime des procédés industriels. À chaque cas son schéma de décarbonation. Il y a de la place pour toutes les énergies décarbonées. »

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