Les sénateurs ont adopté trois amendements au projet de loi économie circulaire qui viennent alléger les contraintes pesant actuellement sur les installations de stockage de déchets non dangereux (ISDND). Ils proposent de faciliter le dépassement de la capacité autorisée des décharges en zones en tension. Ils proposent aussi un dispositif qui accorderait la priorité aux refus de tri, tout en leur garantissant un prix de mise en décharge conforme à celui habituellement pratiqué.
Déroger au plan régional
Les professionnels critiquent une application trop stricte de la loi de Transition énergétique qui prévoit une réduction de moitié des volumes mis en décharge entre 2010 et 2025. Pour assurer la réalisation de l'objectif, la règlementation impose aux plans régionaux de prévention et de gestion des déchets de fixer une trajectoire conforme à l'objectif national. Quant aux préfets, ils fixent les autorisations des installations de stockage sur la base des réductions inscrites dans les plans. Conséquence de ces dispositions : certains professionnels ont rencontré de grandes difficultés fin 2018, pour faire enfouir leurs déchets dans les zones les plus tendues.
Pour y remédier un amendement (1) prévoit que les arrêtés préfectoraux d'autorisation de décharge et d'incinérateur puissent déroger aux plans régionaux de prévention et de gestion des déchets. Ces dérogations seront autorisées après avis du président du conseil régional. Elles porteront sur l'origine géographique des déchets admissibles dans l'installation ou sur la capacité annuelle autorisée de l'installation, « dans la limite des capacités techniques (…), tant en termes de quantité que de nature des déchets autorisés ». Elles pourront s'étendre sur une période de trois ans. « L'application des futurs plans régionaux va conduire à des insuffisances de capacités de stockage dès 2019 ou 2020 dans plusieurs régions », avaient justifié en commission les sénateurs qui avaient adopté un amendement similaire (mais d'une portée plus réduite).
Donner la priorité aux refus de tri
La saturation de certaines décharges génère aussi des tensions entre acteurs. Les recycleurs indépendants critiquent les grands groupes qui, selon eux, réservent les capacités d'enfouissement dont ils disposent à leurs filiales et aux collectivités locales. En conséquence, des broyeurs ont dû cesser leur activité fin 2018, faute de disposer d'exutoire pour leurs refus de tri. Les sénateurs ont entendu ces critiques. « Cette absence d'exutoire [pour les déchets de certaines installations de broyage automobile ou de tri] a induit un blocage local de l'ensemble de la chaîne de recyclage », déplorent les sénateurs qui veulent « garantir un exutoire aux déchets les plus ultimes ».
Le second (3) propose un dispositif complet pour faciliter l'accès aux décharges à partir de 2021. Comme le précédent, il prévoit qu'un exploitant d'ISDND « est tenu d'y réceptionner » les déchets résultant d'opérations de tri et de recyclage performantes. Le dispositif ajoute deux conditions à cette obligation générale : le producteur des déchets doit informer l'exploitant de la décharge de la nature et de la quantité des déchets au moins six mois à l'avance, et la réception des déchets dans l'installation de stockage doit être conforme à son autorisation. Du côté de l'installation de stockage, le prix facturé au producteur des déchets ne peut être supérieur au prix moyen facturé pour tous les déchets réceptionnés pendant l'année courante.