Transposée en droit français fin 2010, la Directive européenne sur les déchets (1) de novembre 2008 ouvre la voie à la fin du statut de déchet. Pour rendre cette mesure effective, des conditions réglementaires ont été en partie définies et devront être respectées pour l'ensemble des flux destinés à devenir des produits. La perte de la qualité de déchet ne pouvant concerner tous les flux de déchets, la Commission européenne en a déjà identifié certains et a commencé à rédiger des règlements intégrant les critères techniques nécessaires au changement de statut. Le premier texte permettant à certains débris métalliques de cesser d'être des déchets a été adopté en mars 2011. Prochainement, des règlements sur le cuivre, les papiers-cartons, le verre, le compost ainsi que les plastiques devraient également être proposés par la Commission européenne. "Cela étant, il est nécessaire d'envisager un cadre réglementaire national pour permettre aux recycleurs de bénéficier dès que possible de la sortie du statut de déchets autorisée par la directive pour les matières qu'ils traitent", précise le ministère de l'Ecologie. Ce dernier serait donc en train d'élaborer un décret et une circulaire d'application.
Des textes pour encadrer la sortie du statut de déchet en France
Débris métalliques, premier produit à changer de statut
Six mois après sa publication, le règlement européen sur la sortie du statut de déchets des ferrailles et de l'aluminium est entré en application le 9 octobre dernier. En se basant en partie sur des travaux de l'Institut de prospective technologique et de la Fédération des entreprises du recyclage (Federec), il complète l'ensemble des textes juridiques disponibles.
Selon ce texte, les débris doivent être triés à la source, valorisés et classés selon leur utilisation possible au regard des spécifications fixées par le client. Au niveau de la qualité, le critère de présence des corps étrangers fixe la quantité totale des stériles à 2 % en poids pour le fer et l'acier, et 5 % en poids pour l'alu. En outre, les débris métalliques doivent être suffisamment purs et donc ne doivent pas comporter d'huile, de graisses ou de lubrifiants afin de rendre possible l'enfournement dans des fours électriques. Au final, le recycleur délivre une attestation de conformité en tant que producteur de la matière recyclée certifiant le respect des critères.
Participant à l'élaboration de ce texte, différentes organisations professionnelles comme Federec, l'Association française de l'aluminium, la Fédération des minerais, minéraux industriels et métaux non ferreux (Fedem) ou encore la Fédération nationale des activités de dépollution et de l'environnement (Fnade) se sont réunies courant du mois d'octobre afin de trouver un accord pour s'engager sur la voie de la sortie de statut de déchet. Les conclusions de ces réunions, notamment les précisions des enjeux à court, moyen et long terme, devraient être intégrées dans la circulaire. "Plusieurs points abordés seront précisés dans la future circulaire d'interprétation comme le passage déchet/produit, le statut du négociant, les systèmes de gestion de la qualité et les normes", avance Manuel Burnand, président de la Commission broyeur de Federec. Dans cette circulaire, les relations avec l'Italie pourraient également être détaillées, de nombreuses usines sidérurgiques de ce pays ne souhaitant importer uniquement des produits ferriques de bonne qualité.
Faciliter les échanges commerciaux
Souhaité par un grand nombre d'acteurs du secteur du recyclage, ce changement de statut pour les débris métalliques procure, en effet, différents avantages. Selon Federec, la sortie du statut de déchets représente "une véritable réflexion stratégique pour l'avenir de la profession des recycleurs qui sont désormais également reconnus comme producteur de matière". Cela va permettre de développer davantage le recyclage, d'améliorer l'image des matières recyclées et donc de limiter l'utilisation de ressources vierges. En simplifiant les règles de circulation à travers l'Europe et en réduisant les formulaires administratifs, cette modification de statut facilitera également les échanges commerciaux. De plus, la normalisation de ces matières est un gage de qualité qui ouvre possiblement de nouveaux marchés ainsi que de nouveaux débouchés.
Ces avantages s'accompagnent aussi de nouveaux inconvénients que les recycleurs devront gérer. En premier lieu, la profession aura besoin d'une meilleure organisation qui comportera davantage de contrôles internes afin de ne pas dégrader la qualité des matières premières secondaires produites. Devenu producteur de matières, le recycleur aura désormais plus de responsabilité. En outre, la question de la reconnaissance du règlement européen des débris métalliques au niveau international peut se poser. Enfin, puisque les métaux recyclés seront considérés comme des produits, "les acteurs du secteur devront prêter attention aux autres règlementations existantes telles que Reach, l'éco-conception, le droit de la propriété, le droit de commerce, la TVA, les douanes, etc", tempère Manuel Burnand.