
Après avoir demandé à la France de se conformer aux normes de l'Union européenne (UE) en matière de qualité de l'air, la Commission passe à l'action ce jeudi 19 mai 2011 et renvoie la France devant la Cour de justice de l'UE "pour non-respect des valeurs limites […] applicables aux particules en suspension connues sous le nom de PM10."
Seize zones visées par l'UE
La Commission estime que "la France n'a pas pris à ce jour de mesures efficaces pour remédier au problème des émissions excessives de ce type de particules dans plusieurs zones du pays."
En conséquence, "depuis l'entrée en vigueur de la législation, en 2005, les valeurs limites applicables aux PM10 ne sont pas respectées dans 16 zones de qualité de l'air en France." Les zones visées sont Marseille, Toulon, Avignon, Paris, Valenciennes, Dunkerque, Lille, le territoire du Nord Pas-de-Calais, Grenoble, Montbéliard/Belfort, Lyon, le reste de la région Rhône-Alpes, la zone côtière urbanisée des Alpes-Maritimes, Bordeaux, la Réunion et Strasbourg.
Quant à la demande française de prolongation du délai d'application de la législation européenne, l'UE la rejette au motif que "les conditions ne sont réunies que pour Strasbourg."
Expérimentation tardive et inefficace des Zapa
Pour France nature environnement (FNE) les dés sont jetés : "les Zones d'actions prioritaires pour l'air (Zapa) n'y feront rien, la France sera condamnée." Pour l'ONG, la mise en œuvre de la mesure prévue par le Grenelle de l'environnement "[n'a pas] suffi pour que les poursuites cessent" car elle "arrive trop tard et ne résout pas le problème." FNE critique notamment le fait que la mesure, dont on attend les détails de la mise en œuvre, ne permette pas d'interdire la circulation des 4X4 et des deux roues dans les zones concernées.
L'ONG réclame "des mesures drastiques" et estime que "l'Etat doit prendre ses responsabilités et faire du sujet une vraie priorité nationale." Pour cela le calendrier d'application des zones doit être accéléré et les Zapa doivent être pertinentes, en tenant compte de la réalité de la pollution et des populations exposées, et inclure l'ensemble des zones visées par l'assignation de la Commission européenne.
Enfin, FNE rappelle qu'en 2010, 24 dépassements des valeurs limites de dioxyde d'azote (NOx) ont été enregistrés dans des agglomérations de plus de 100.000 habitants.
Une pollution qui coûte cher aux finances publiques
L'Association santé environnement France (Asef), juge pour sa part que la pollution de l'air constitue "une double peine" qui "coûte très cher." Selon l'association qui réunit 2.500 médecins, le dépassement des normes européennes génère des "pénalités à verser à l'Union Européenne et surtout [une] augmentation des coûts de l'assurance maladie qui, au quotidien, doit assumer l'augmentation des allergies, des asthmes, des accidents-cardiovasculaires et des cancers." L'ONG rappelle qu'en 2006, ces pathologies ont coûté entre 200 et 800 millions d'euros à la Sécurité sociale, selon une étude réalisée par l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset).
"Nous dépensons […] sans compter pour respirer un air pollué !", critique l'Asef qui qualifie cette situation d'"incompréhensible."
Quant à l'aspect sanitaire, l'association considère que "de nombreuses études ont démontré que la pollution de l'air est nocive pour notre santé" et précise que cela ne fait "pas de doute." Elle cite en particulier l'étude Aphekom qui a mis en évidence le lien entre la pollution aux particules fines (les PM2,5 pour cette étude) et la réduction de l'espérance de vie des populations exposées à des dépassements des seuils préconisés par l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
La directive 2008/50/CE relative à la qualité de l'air ambiant impose aux États membres de limiter l'exposition de la population aux microparticules PM10. La législation fixe des valeurs limites d'exposition concernant la concentration annuelle (40 µg/m³). Par ailleurs, elle fixe une concentration journalière (50 µg/m³) qui ne doit pas être dépassée plus de 35 fois par an.