Par une décision du 15 avril 2021 portant sur le projet de parc éolien de Lanouée (Morbihan), le Conseil d'État précise sa jurisprudence en matière de dérogation à l'interdiction de destruction d'espèce protégées.
Pour rappel, une dérogation ne peut être accordée que si le projet répond à une raison impérative d'intérêt public majeur, que la dérogation ne nuit pas au maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces concernées et qu'il n'existe pas d'autres solutions satisfaisantes. Par cette décision, le Conseil d'État précise laisser ce dernier critère à l'appréciation souveraine des juges du fond, sous réserve qu'ils ne le dénaturent pas.
En l'espèce, il valide la décision de la cour administrative d'appel de Nantes qui avait donné satisfaction au porteur de projet, la société Les Moulins du Lohan. Les juges d'appel avaient relevé que la forêt de Lanouée permettait l'implantation du parc éolien à plus d'un kilomètre des habitations, qu'elle ne comportait ni zone Natura 2000, ni espace boisé classé, ni zones humides, et qu'elle disposait d'un réseau important de voies forestières et de capacités de raccordement. En outre, la société avait étudié plusieurs implantations possibles avant de retenir une zone présentant une moindre sensibilité sur le plan paysager et qui appartenait à une zone de développement éolien approuvée par arrêté préfectoral. Enfin, aucune pièce du dossier n'avait mis en évidence une solution alternative qui aurait été ignorée.
La décision est également intéressante par l'interprétation que fait le Conseil d'État de la notion de « raison impérative d'intérêt public majeur » du projet. Il valide aussi la décision de la cour administrative d'appel sur ce point. Pour juger que le projet répondait à ce critère, les juges d'appel avaient relevé plusieurs éléments. Le projet permettra l'approvisionnement en électricité de plus de 50 000 personnes, il contribuera à l'objectif national de porter la part des énergies renouvelables (EnR) à 32 % de la consommation finale brute d'énergie en 2030, et il s'inscrit dans le cadre du pacte électrique signé entre l'État, la Région, l'Ademe, RTE et l'Agence nationale de l'habitat (Anah) prévoyant d'accroître la production d'EnR dans cette région faiblement dotée.