Jusqu'au 30 juin 2020, en raison des conséquences de la pandémie de Covid-19, les distances d'épandage de pesticides dont la cancérogénicité, la mutagénicité et la reprotoxicité ne sont pas avérées, pourront être réduites. Cette dérogation, accordée par le ministère de l'Agriculture et de l'alimentation, autorise temporairement les agriculteurs à épandre des pesticides à cinq ou trois mètres des habitations selon le type de cultures, et ce sans concertation publique, alors que le décret du 27 décembre 2019 sur les distances d'épandage, préconise de demander l'avis des riverains.
Pour rappel, le dispositif de protection des riverains, en vigueur depuis le 1er janvier 2020, oblige les agriculteurs à respecter des distances de sécurité entre les zones d'épandage et les habitations. Elles sont normalement fixées à dix mètres pour les cultures dont la hauteur est supérieure à cinquante centimètres, cinq mètres pour les cultures basses, et vingt mètres pour les produits les plus dangereux.
À l'échelle départementale, un arrêté peut cependant autoriser à diviser par deux la distance d'épandages des produits considérés comme les moins dangereux, à condition que l'agriculteur soit équipé de dispositifs anti-dérive et qu'une charte d'engagement entre agriculteurs et riverains soit signée par le préfet. Ces chartes, élaborées par les organisations syndicales agricoles ou la chambre d'agriculture, doivent, en théorie, être soumises à consultation publique pendant un mois avant d'être jugées conformes par le préfet.
Pendant le confinement, la possibilité de réduire les distances de précaution sans consultation publique
Dans le contexte de la pandémie de Covid-19, la dérogation accordée par le ministère de l'Agriculture et de l'alimentation assouplit les conditions de réduction des distances de sécurité. Concrètement, elle permet aux agriculteurs « engagés dans un projet de charte » et qui utilisent des dispositifs anti-dérive, d'épandre à cinq mètres des habitations pour les cultures hautes, trois pour les cultures basses, et ce, sans attendre la validation du processus de consultation des riverains, comme cela est normalement prévu. Ils doivent simplement « s'engager à mener la concertation dès que le contexte le permettra ». Le ministère de l'Agriculture et de l'alimentation justifie cette décision par « la difficulté de mener la concertation publique dans le contexte en cours de la crise de Covid-19 ».
Trente départements ont d'ores et déjà autorisé la réduction des distances minimales pour l'utilisation de pesticides, selon la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), notamment en Bretagne. Dans le Finistère, la préfecture justifie cette décision en expliquant que « le contexte sanitaire actuel ne permet pas d'organiser la concertation du public dans de bonnes conditions. » La chambre d'agriculture du Finistère s'engage néanmoins à « mener la consultation publique dès que le contexte le permettra. »
Le risque d'une augmentation de l'exposition aux pesticides durant la pandémie
La majorité des associations environnementales considérait déjà, en décembre 2019, que la mise en place de distances de sécurité de cinq et dix mètres était « très insuffisante pour assurer la protection des riverains des expositions aux pulvérisations de pesticides ». L'assouplissement de ces règles pendant le confinement pourrait donc ranimer le débat sur l'efficacité du dispositif de protection des riverains mis en place par le Gouvernement en début d'année.