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Les points de basculement dans les écosystèmes sont très rares

Alors que les politiques environnementales sont fondées sur le concept des points de basculement, José Montoya, chercheur au CNRS, montre que la dégradation des écosystèmes est en réalité progressive.

Interview  |  Biodiversité  |    |  L. Radisson
Actu-Environnement le Mensuel N°408
Cet article a été publié dans Actu-Environnement le Mensuel N°408
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Les points de basculement dans les écosystèmes sont très rares
José M. Montoya
Directeur de recherche au CNRS - Station d’écologie théorique et expérimentale de Moulis
   

Actu-Environnement : Quelles sont les conclusions de l'étude que vous publiez dans la revue scientifique Nature Ecology & Evolution ?

José M. Montoya : Notre étude montre que les points de basculement des écosystèmes sont très rares. Notre analyse, qui a porté sur 4 600 études d'écosystèmes sur 45 ans, a étudié les changements globaux : changements climatiques, acidification, transformation des habitats. On a trouvé que lorsque les pressions (température, addition de nutriments, pertes d'habitats) augmentent, on ne constate pas un seuil au-delà duquel les écosystèmes changent dramatiquement. Mais ceux-ci peuvent beaucoup changer sous l'effet de petites perturbations.

AE : S'agit-il d'une bonne nouvelle ?

JM : C'est une mauvaise nouvelle car les politiques environnementales sont fondées sur le concept des points de basculement. Il est problématique d'attendre d'arriver à ces hypothétiques seuils car on perd beaucoup de temps. Il est donc nécessaire de changer les politiques. Par exemple, la politique environnementale des rivières en France est basée sur une limite de la qualité de l'eau mais un petit changement sur l'azote ou le phosphate va provoquer des extinctions d'espèces de poissons ou d'invertébrés dans certaines rivières. Mais c'est aussi une bonne nouvelle car cela veut dire que l'on peut changer ces politiques pour qu'elles deviennent plus efficientes.

AE : Certaines politiques doivent-elles être changées de façon prioritaire ?

JM : Non, c'est un constat global qui est valable aussi bien sur les politiques en matière de qualité de l'eau, que de préservation des forêts ou de lutte contre les changements climatiques.

AE : Votre étude met-elle à mal la collapsologie ?

JM : La théorie de la collapsologie est correcte mais elle est applicable à certains écosystèmes seulement. Elle suppose qu'il existe des rétroactions positives très fortes, mais ce mécanisme est très rare dans la nature. Pour les politiques, c'est très attractif car cela permet de poursuivre le business as usual.

AE : En quoi votre étude pourrait-elle permettre de mieux prendre en compte la diversité des milieux ?

JM : Elle permet de montrer qu'une même pression n'aura pas les mêmes effets sur deux écosystèmes différents. Nous avons en effet étudié deux choses : la réponse moyenne des fonctionnalités (production primaire, captation de CO2, captation d'eau) des écosystèmes mais aussi la variabilité de la réponse. La théorie catastrophiste dit que la variabilité de la réponse est très grande pour une grande pression. Mais la variabilité peut en fait être la même qu'il s'agisse d'une petite ou d'une grande perturbation.

AE : Les points de basculement existent-ils malgré tout pour certains écosystèmes ?

JM : Oui, cela a été observé mais dans seulement 5 % des cas étudiés. Cela existe, par exemple, pour les récifs coralliens, pour lesquels la hausse des températures provoque la prolifération des algues et la mortalité des poissons. Mais c'est très anecdotique. Il ne faut pas déduire une généralité de ce qui est rare dans les faits. Les forêts dans les Pyrénées, par exemple, ne fonctionnent pas comme cela.

AE : Votre étude n'est-elle pas biaisée par le fait qu'elle n'a pas pris en compte l'ampleur des changements climatiques à venir ?

JM : Non, car notre analyse a pris en compte des études portant sur les changements climatiques. Dans ces études, les chercheurs ont provoqué des changements sur les écosystèmes, comme une augmentation des températures sur les lacs du Nord de l'Europe ou des fractionnements d'habitats en Amazonie. Les expériences ont été menées en majorité in situ mais aussi en laboratoires. Les conclusions sont identiques dans les deux cas.

AE : Vos conclusions sont-elles partagées par la communauté scientifique ?

JM : Nous recueillons beaucoup de réactions positives de la part des écologues. La majorité de la communauté scientifique pense que les points de basculement sont vraiment rares mais cela n'avait pas été démontré jusqu'à présent. Nous le faisons aujourd'hui grâce à notre méta-analyse qui a permis de trouver des signaux statistiques sur de multiples données.

Réactions3 réactions à cet article

tant que le CNRS n'aura pas intégré que c'est la végétation qui génère 70% des pluies continentales (le bilan hydrique de la végétation est toujours positif , une plante ne consomme pas d'eau mais apporte des pluies ... ) on s'enfoncera vers une désertification massive et rapide !

La sécheresse n'est pas encore terminée que nous avons déjà les premières alertes inondations ???

laurent | 25 septembre 2020 à 08h58 Signaler un contenu inapproprié

Merci d'avoir transmis un nouveau mot dans le verbiage écologique "collapsologie", comme dans tous les métiers ça va se refermer entre spécialistes ou le vulgum pecum sera étranger aux décisions prises au nom de l'état puisque trop stupide pour comprendre.
Bien sur ayant perdu les options latin et grec, nos élus n'auront pas voulu passer pour des "noobs" (un mot d'informaticien) et obéi bêtement.

pemmore | 25 septembre 2020 à 11h13 Signaler un contenu inapproprié

Vivent les "méta-analyses".
On attend les méta-analyses de méta-analyses.
Cela évite de faire des analyses... Bon pour le CNRS de foutre la trouille à tout le monde.
J'aime bien aussi l'écologie théorique, qui nourrit l'écologisme politique :"je veux que vous paniquiez !"
How dare you? With publiuc money of course!

Albatros | 29 septembre 2020 à 10h07 Signaler un contenu inapproprié

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