La loi Brottes, publiée en avril dernier, contient des mesures relatives à l'effacement de consommation d'électricité dans le cadre du marché de capacité, qui doit démarrer fin 2015. Pour rappel, à cette date, la sécurité électrique de la France ne sera pas forcément assurée, en raison des pointes de consommation et de la fermeture de certains moyens de production. A compter de cette date, les producteurs d'électricité auront donc obligation de prévoir une capacité de production de pointe ou une capacité d'effacement. La loi Brottes a donné priorité à cette deuxième solution.
Cette loi prévoit le lancement rapide d'un appel d'offres national pour mettre en œuvre des capacités d'effacement progressivement croissantes d'ici 2015, ainsi que des précisions sur la définition d'un statut juridique de l'opérateur d'effacement et le mode de rémunération. Ainsi, la loi prévoit que le Conseil d'Etat, sur proposition de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), prendra un décret fixant la méthodologie utilisée pour établir ces règles. Dans l'attente, une expérimentation sera menée par le gestionnaire du réseau d'électricité (RTE).
Alors qu'un projet de décret a été présenté par la CRE au gouvernement en juillet, RTE a saisi la commission, le 16 octobre, d'une proposition de règles expérimentales (dites Nebef 1) et se dit prêt à démarrer l'expérimentation dans un délai d'un mois à compter de son approbation. Pour définir ces règles, RTE a procédé à deux consultations publiques en novembre-décembre 2012 et en mai-juin 2013 et s'est appuyé sur la délibération de la CRE publiée en janvier 2013."Ces dispositions expérimentales (…) ne présagent en rien des dispositions réglementaires (règles pérennes) en cours d'examen dans d'autres instances et de leurs futurs textes d'application", indique RTE, ajoutant : "L'expérimentation (…) ne représente qu'une première étape pour la valorisation des effacements de consommation. Elle a en effet pour objet de tester le processus et les modes opérationnels de valorisation des effacements sur les marchés et contribuera, en cela, à alimenter les travaux relatifs aux règles [pérennes, dites Nebef 2,] une fois que le décret en Conseil d'Etat sera adopté". Pour cela, un retour d'expérience et une évaluation des volumes effacés dans le cadre de l'expérimentation seront réalisés.
Organiser un contrôle de l'effacement
RTE propose un cadre dans afin de valoriser, sur les marchés de l'électricité, l'effacement obtenu par l'opérateur d'effacement, sans que le fournisseur d'énergie du site effacé n'ait à donner son accord. Ainsi, ces règles "doivent permettre d'établir un terrain de jeu équitable entre les différents acteurs du marché de l'effacement, les fournisseurs, les opérateurs d'effacement ou les consommateurs en direct".
Le gestionnaire du réseau se place comme "tiers de confiance" entre ces différents acteurs, organisant notamment les relations entre l'opérateur d'effacement et le fournisseur du site effacé, comme le prévoyait d'ailleurs la CRE dans son projet de décret. Il est chargé de "garantir le caractère effectif de l'effacement et le quantifier".
En effet, "l'effacement ne peut faire l'objet d'une valorisation explicite sur un marché que si la diminution de consommation constatée sur les sites de soutirage n'est pas, dans le même temps, compensée par une diminution de l'injection du fournisseur qui alimente ces sites".
RTE propose trois échelles de contrôle. Un dispositif d'agrément, "qui porte sur la capacité des opérateurs d'effacement à piloter la modulation de la courbe de consommation des sites pour lesquels ils déclarent des programmes d'effacement". Une qualification des données, "qui traite de la capacité des opérateurs d'effacement à mesurer et/ou à transmettre correctement les informations utilisées pour le contrôle du réalisé". Et enfin le contrôle du réalisé, autrement dit "l'évaluation du volume d'effacement réalisé par comparaison, au niveau d'un agrégat de sites constitutifs d'une entité d'effacement, entre d'une part une courbe de consommation établie à partir de données de consommation, et d'autre part une courbe de référence établie selon des méthodes approuvées par la CRE".
Rémunérer l'effacement
La question de la rémunération de l'effacement est délicate. Elle a d'ailleurs fait l'objet de conflits auparavant, que le Conseil d'Etat a dû trancher. Pour RTE, le montant du versement doit refléter le tarif de fourniture du site effacé en vigueur au moment de l'effacement, hors coûts commerciaux et d'acheminement. Mais comme il est "inenvisageable d'interroger chaque fournisseur d'électricité pour connaître le contrat et le tarif de fourniture d'un site de soutirage effacé, les dispositions générales du régime de versement prennent la forme de barèmes de prix par catégories de sites et par plages temporelles ; ces barèmes de prix sont représentatifs du niveau de la part énergie des tarifs de fourniture pratiqués".
Ce mode de calcul permet à l'opérateur de l'effacement d'être rémunéré pour l' "économie de production" d'énergie qu'il apporte à la collectivité. Dans le même but, la loi Brottes prévoit que, dans le cadre du régime d'effacement pérenne, une prime financée par le CSPE soit versée à l'opérateur d'effacement.
Le versement sera effectué selon un régime de facturation indirect, afin que l'identité de l'opérateur d'effacement et celle des sites concernés ne soit pas révélée.