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Emissions des voitures : l'Europe veut rectifier le tir pour éviter de nouvelles tricheries

La Commission européenne soupçonne les constructeurs automobiles de gonfler artificiellement leurs émissions de CO2 en phase de test. Pour les contrer, elle apporte trois rectificatifs au projet de normes.

Transport  |    |  F. Roussel

Allons-nous vers un nouveau dieselgate ? L'Europe fait tout pour l'éviter. Depuis ce scandale de 2015 lié à la manipulation des émissions polluantes des voitures neuves, la Commission européenne scrute avec attention le comportement des constructeurs européens. Et de nouvelles données ont éveillé ses soupçons. Selon elle, les constructeurs automobiles gonfleraient leurs émissions de CO2 officielles pour respecter les normes plus restrictives à l'avenir. Une manière de placer la référence très haut pour arriver à respecter cette future réglementation en cours de discussion. Elle compte bien ne pas se laisser faire.

Un changement de méthode de mesure

Les constructeurs européens ont plusieurs objectifs à respecter. D'ici 2021, leur flotte de voitures neuves ne devra pas dépasser 95 g de CO2/km pour les voitures particulières et 147 g de CO2/km pour les véhicules utilitaires légers. Ces deux objectifs sont basés sur la procédure d'essai NEDC (New European Driving Cycle). Mais à compter de 2021, la procédure d'essai sera la WLPT et les normes ne seront plus fixées en valeur absolue mais en pourcentage de réduction : -15% d'ici 2025 par rapport à 2021 et -30% d'ici 2030. C'est ce que la commission a proposé en novembre 2017.

Un changement de méthode qui aurait poussé les constructeurs à tout faire pour afficher des émissions de CO2 à la hausse en 2021, date de référence pour mesurer leurs efforts. Un comble, sachant que la nouvelle procédure WLPT est la réponse de l'Europe au dieselgate car elle est plus proche des conditions réelles et est donc censée refléter les vraies émissions des voitures. Or, elle ne permet plus d'exiger des normes en gCO2/km.

Un niveau d'ambition réduit de moitié

Les documents de la Commission (1) montrent que lors des essais, les constructeurs automobiles désactivent la fonction stop & start, ajustent les modèles de changement de vitesse et utilisent des batteries déchargées pour brûler plus de carburant et émettre plus de CO2. Ces manipulations permettraient de gonfler les émissions de 5% en moyenne. A cela, les constructeurs peuvent appliquer une marge d'erreur de 4,5% supplémentaires. Au final, si les objectifs de réduction de 15%, proposés par la Commission, sont appliqués à cette base de référence gonflée, l'objectif absolu en 2025 serait de 93,5g/km, soit une réduction de seulement 6,5%. En d'autres termes, le niveau d'ambition de l'objectif 2025 est réduit de 57%. Si le même calcul est fait pour l'objectif de réduction proposé de 30% pour 2030, le niveau d'ambition pour 2030 est réduit de 23%.

Les effets sont donc loin d'être négligeables. Et pour l'association européenne Transport & Environnement, ce n'est pas une surprise. Dès avril 2018, l'association alertait sur ces possibles manipulations. Aujourd'hui, ses craintes se confirment : "Après que les constructeurs automobiles ont promis de changer et que de nouveaux tests ont été la solution, il est clair qu'ils utilisent ces nouveaux tests pour saper les normes de CO2 déjà faibles, afin de pouvoir continuer à vendre des moteurs diesel et retarder le passage aux voitures électriques. Il est triste de constater que l'industrie automobile veut rester dans le passé et que l'on ne peut pas lui faire confiance", estime William Todts, directeur exécutif chez T&E.

La Commission contre-attaque

Ce nouveau soupçon de tricherie démontre que les tests de laboratoire comportent encore trop d'options permettant d'optimiser les essais et d'orienter les résultats vers le haut ou vers le bas selon les besoins. Dans leur courrier adressé à la présidence de l'UE et au Parlement (2) , les commissaires à l'industrie et à l'environnement proposent trois contre-attaques.

Premièrement, la Commission souhaite que les valeurs WLPT de référence soient celles mesurées en réel en 2020 et non celles déclarées par les constructeurs. Cela sous-entend, deuxièmement, la mise en place d'une collecte automatique des données WLPT 2020 et, troisièmement, la création d'une procédure de corrélation entre les deux protocoles (NEDC et WLPT). La Commission prévoit donc d'amender le texte d'origine qu'elle a mis sur la table en 2017, texte en cours d'examen entre les Etats membres et le Parlement.

Soupçon d'entente générale

Dans un communiqué, l'Association des constructeurs européens d'automobiles (ACEA) a déclaré être "entièrement d'accord" sur le fait que les valeurs de CO2 ne doivent pas être artificiellement augmentées. Elle adhère également aux trois corrections de la Commission européenne et se dit "prête à soutenir leur mise en œuvre pratique de la manière la plus efficace et la plus pragmatique".

L'ACEA s'étonne toutefois que de telles pratiques aient pu avoir lieu. "Augmenter les émissions de CO2 à dessein pourrait nuire à la compétitivité d'un fabricant, estime-t-elle en expliquant que la majorité des Etats membres disposent d'un régime fiscal basé sur les émissions de CO2. Des émissions de CO2 plus élevées entraîneraient donc des coûts plus élevés pour le client, ce qui rendrait ces véhicules moins attrayants".

Mais pour William Todts de T&E, il suffit juste que tout le monde se mette d'accord : "La seule façon dont cette astuce peut fonctionner est que tous les constructeurs automobiles travaillent ensemble". La Commission européenne n'exclut pas cette option. Son enquête se poursuit.

1. Télécharger la proposition de la Commission européenne (en anglais)
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-31795-commission-proposition.pdf
2. Télécharger la lettre envoyée à la présidence de la Commission européenne (en anglais)
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-31795-bienkowska-letter.pdf

Réactions7 réactions à cet article

Bonjour,

Merci pour cet article intéressant et qui me donne envie de pré-commander une Tesla à 1000 € simplement ... et pourtant elle n'est pas (encore) en vente en UE et le principe me fait fuir.

Mais devant tant de médiocrité des autres constructeurs...

Nicolas | 31 juillet 2018 à 09h07 Signaler un contenu inapproprié

Bonjour,
C'est bien sympa de perdurer coûte que coûte mais une fois la triche élucidé il faut tourner la page et faire payer les responsables comme cela a été le cas avec Volkswagen sans compter Renault ou Peugeot qui ont échappé belle car ils ne sont pas ou très peu présent au USA. Ils sont présent en Europe bien sûr et dans les pays du tiers monde ou on peut encore faire avaler un peu n'importe quoi! On se souvient la ancienne ministre de l'Ecologie justifier le surplus de CO2!!! Elle s'était trompée de portefeuille car elle devait prendre l'Industrie à la place mais hélas c’était déjà surement occupé...Macron et ses apprentis ne ferons pas mieux donc c'est à nous de boycotter l'ensemble de la mafia bruxelloise très dangereuse et déjà établi depuis perpette!

Maes | 31 juillet 2018 à 09h41 Signaler un contenu inapproprié

Merci de définir ce que vous nommez la mafia bruxelloise. Ce sont les Etats membres possédant des constructeurs automobiles qui ont exercé une très forte pression (France et Allemagne en tête) pour que ne soit pas révisé trop vite et trop fort le fameux cycle d'homologation NDEC, inepte. Le Parlement Européen était lui plus ouvert sur la question.

Bref je me méfie toujours lorsque l'on jette l’orobe sur l'Europe.

Mais peut-être n'était-ce pas votre propos.

Nicolas | 02 août 2018 à 22h30 Signaler un contenu inapproprié

Bonjour,
L'Europe? C'est un continent mais ceux qui l'occupent et ont le pouvoir et ils nous font rappeler tout simplement l'histoire, jadis avec des état très gourmands, c'est à dire l'argent "à tout prix". Eh bien, ce forum ne devrait pas être exclusivement politique, bien sûr, mais hélas la tricherie bruxelloise n'est pas juste à niveau de CO2 elle est à tous le niveaux! Les européens prennent conscience même s'il est pour ainsi dire trop tard avant la débâcle climatique. Nous pouvons faire réagir cette institution (je ne verrais pas la réponse) avec des gens dangereux, trop accommodants par rapport au fric. On dit: "le poisson meurt par la bouche" et je crois que c'est cela qui se passe aujourd'hui.

Maes | 03 août 2018 à 10h20 Signaler un contenu inapproprié

Je vais faire plus simple : pour ma part, j'avais acheté en 2009 un petit véhicule diesel, pas cher et sans m'être renseigné.

En 2015, avant d'en changer, j'ai passé 40 h à analyser le marché, tableurs de calcul à l'appui pour déterminer les coûts, la pollution, etc. Résultat une hybride.

Si tous les consommateurs se donnaient la peine de réflechir à leur achat, quite à payer 10% de plus à l'achat (mais 10% de moins sur le long terme), on aurait de belles avancées. De plus, il n'y a pas nécessairement de surcoût, mais la nécessité de chercher un peu plus le produit.

Les gouvernants donnent un cadre pour ce qui est de la consommation, parfois orientent fortement, mais c'est au consommateur de décider de son achat.

Nicolas | 03 août 2018 à 11h27 Signaler un contenu inapproprié

Ce qui va se passer, c'est qu'avec le réchauffement climatique, qui affecte tout le monde et dont maintenant les gens souffrent vraiment, les consommateurs vont réagir avant les constructeurs et finir par plébisciter des véhicules électriques… construits en dehors de l'Europe. Et les constructeurs français, toujours à côté de la plaque, seront refaits et resteront avec leurs vieilles lunes. Bien fait pour eux. Moi même, dans un avenir proche, j'achèterai un petit véhicule électrique, pas fabriqué en France.

gaia94 | 13 août 2018 à 15h00 Signaler un contenu inapproprié

Bonjour,

Ce dont nous souffrons à court terme est la pollution aux particules fines (marcher en ville en novembre dans une grande ville sans vent permet de s'en rendre compte). Et cela pourrait favoriser le développement de l'électrique. Même si je pense surtout que le consommateur achète ce que le vendeur lui propose (malheureusement).

A l'heure actuelle, il faut entre 30000 et 60000 kms parcourus en véhicule électrique pour que le bilan CO2 soit positif.

Disons que les constructeurs européens semblent rester fidèles à leurs logiques d'être des assembleurs. Et préfèrent donc se priver de la valeur ajoutée que constitue la batterie (fabriquées par LG, CATL, Tesla/Panasonic, etc).

Clair que s'il y avait une véritable offre, les vents de VE dépasseraient les 2% de part de marché.

Que voulez-vous, ils pensaient tous pouvoir se gaver encore longtemps avec les marges du diesel...

Nicolas | 20 août 2018 à 14h25 Signaler un contenu inapproprié

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