"Près de 50.000 emplois sont attendus dans le secteur de l'éolien pour les neuf prochaines années", a conclu Nicolas Wolff, récemment réélu président de France Energie Eolienne (FEE), en clôture du second colloque national éolien qui se tenait à Dijon le 18 octobre 2011. En Bourgogne, à l'endroit même où le lendemain, se tenait le premier forum national des métiers de l'éolien avec la participation espérée de plus de mille étudiants, lycéens et demandeurs d'emplois.
En fin de matinée, la ministre de l'Ecologie quelque peu "ennuyée" face aux 600 représentants du secteur avait pourtant bien annoncé une simplification des procédures. Après quoi, ces derniers mots du président de FEE sonnèrent comme une litanie : l'espoir de voir en France la création de 60.000 emplois dans le secteur de l'éolien d'ici 2020.
Sachant que, selon la version actualisée de l'étude de l'Ademe (1) "Marché, emplois et enjeu énergétique des activités liées à l'amélioration de l'efficacité énergétique et aux énergies renouvelables", le nombre d'emplois estimé liés à la production de l'énergie éolienne était de 1.160 en 2010. "Mais attention, cette notion d'emploi est un vrai piège, préviens Thomas Gaudin, économiste au service Economie&Prospective de l'Ademe. Il s'agit là non pas du nombre d'emplois salariés, mais d'équivalents temps plein liés à la maintenance des parcs installés et pérennisés tout le temps de l'exploitation ; après quoi vient le moment de la régénération du parc". Avec une relation de cause à effet directe pour la maintenance des parcs : 10 MW installés équivalent à 2,6 équivalents temps plein. Des "emplois" auxquels s'ajoutent le temps de travail mobilisé pour l'investissement dans le secteur de l'éolien et l'exportation de composants, toujours estimé, qui était de 9.840 équivalents temps plein en 2010 dont 4.898 en lien avec les exportations.
En effet, selon cette même étude, la balance commerciale du secteur de l'éolien est positive avec un marché de production estimé à 1.550 M€ en 2010, dont 605 liés au marché national (soit 40%) et 945 aux exportations. Si l'industrie éolienne se développe en France, c'est grâce au vent qui traverse la frontière et fait tourner les pâles de l'autre côté !
De l'emploi oui, à condition du déploiement d'éoliennes sur le territoire...
Chaudronnier-soudeur, peintre industriel, assembleur monteur, oxycoupeur sur machine à commande numérique, technicien assurance qualité fournisseur, coordinateur santé, opérateur de montage, inspecteur qualité, cartographe, ingénieur génie civil/électrotechnique, technicien de paie/électricien,... Pôle Emploi de Chenôve avait répertorié une trentaine de postes à pourvoir pour le premier forum national des métiers de l'éolien. Sans compter ceux que la vingtaine d'industriels exposants gardaient précieusement et discrètement pour le chaland motivé...
"Pour pouvoir fabriquer en France, les entreprises ont besoin de stabilité, or depuis six ans on a rendu notre travail beaucoup plus difficile, répète Nicolas Wolff. Quel sera le nombre d'installations en France l'an prochain ? On n'en sait rien... C'est quand même pas sérieux !". Avec une puissance installée de 6.489 MW au 1er septembre 2011, le parc éolien français voit sa croissance diminuer : au premier semestre de cette année, les mégawatts installés étaient en recul de 27% par rapport au premier semestre 2010. "Nous ne sommes pas sur la bonne tendance", pour atteindre l'objectif des 25.000 MW en 2020, regrette une nouvelle fois Jean-Louis Bal, le président du SER qui ces six derniers mois a rencontré 52 parlementaires dans le cadre de la préparation d'un livre blanc. Pourtant, la dynamique industrielle est là : le SER a identifié plus de 170 entreprises sous-traitantes de grands constructeurs de l'industrie éolienne, et 150 autres en mesure de se positionner.
… et d'une route des projets sans tant d'obstacles
Hausse de la fiscalité sur les projets éoliens terrestres
L'exploitant d'un parc éolien terrestre est soumis à une Imposition Forfaitaire sur les Entreprises de Réseaux (IFER) sur chacune de ses éoliennes dont la puissance électrique installée est supérieure ou égale à 100 kilowatts. Cette imposition résulte du dispositif fiscal mis en place dans le cadre de la suppression de la taxe professionnelle : l'IFER, payée au profit des collectivités territoriales à fiscalité propre, applicable depuis le 1er janvier 2010. Entre l'année 2010 et l'année 2011, le taux d'imposition de l'IFER relative aux éoliennes est passée de 2,913 €/KW à 7 €/KW de puissance installée. Les attributaires des recettes de cette imposition sont précisées dans l'instruction de la Direction générale des Finances publiques 6 E-2-11 du 1er avril 2011. Lorsque l'éolienne est située sur une commune regroupée en intercommunalité à fiscalité éolienne unique ou à fiscalité professionnelle unique, rien ne revient à la commune. L'exploitant d'un parc d'éoliennes offshore sera quant à lui soumis à une taxe spécifique.
Quant à appliquer à l'installation d'éoliennes une dérogation au principe d'interdiction à la Loi Littorale comme il en existe une à la Loi Montagne depuis l'arrêt du Conseil d'Etat du 16 juin 2010, il semble que ce ne soit pas une question de couleur politique... En attendant le changement, les gestionnaires de réseaux électriques doivent créer un schéma de raccordement des installations au réseau électrique, et notamment ERDF chargé d'assurer le branchement en Haute Tension des parcs de plus de 12 MW, ce qui est devenu la norme. Tandis que les projets éoliens sont devenus plus coûteux depuis la suppression du taux de réfection pour le raccordement au réseau électrique et la hausse de la pression fiscale imposée aux exploitants (cf encadré).
Comme le dit Daniel Fidelin, député de Seine Maritime membre de la Commission développement durable de l'Assemblée Nationale, il manque en France un "centre de soutien à l'énergie éolienne, sur le modèle du CEA dont les 14.000 salariés ont travaillé à 50 % sur le nucléaire civil pendant 45 ans".