Le réseau national autoroutier est prêt à accueillir le développement de la mobilité électrique des quinze prochaines années, selon Enedis et RTE. Dans une nouvelle étude prospective, consacrée aux futurs « besoins électriques de la mobilité longue distance sur autoroute » et publiée en juillet 2021, les deux géants du réseau électrique français se disent particulièrement confiants, concernant le déploiement des infrastructures de recharge de véhicules électriques (IRVE) sur le réseau autoroutier national : « les appels de puissance, les extensions et adaptations des réseaux ne présentent pas de défis techniques particuliers ni d'enjeux financiers importants au regard de ceux dédiés à la transition énergétique dans les territoires (à moyen et long terme). »
15,6 millions de véhicules électriques en 2035
Pour rappel, un décret du 12 février 2021 réclame que l'ensemble des aires de services soit équipé en chargeurs de haute puissance (entre 50 et 150 kW) d'ici au 1er janvier 2023. A l'heure actuelle, la France compte près de 4 000 bornes de recharge de haute puissance. Cependant, des 415 aires de service du réseau autoroutier concédé (avec péage) ou non-concédé (sans péage), seulement 164 sont équipées de 6 points de recharge en moyenne. Le tout doit permettre aux plus de 500 000 véhicules légers électriques (VE) et véhicules hybrides rechargeables (VHR), actuellement immatriculés en France, de circuler en accord avec les objectifs de la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) en vigueur.
En suivant les ambitions de la PPE et de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), Enedis et RTE ont évalué les besoins en puissance électrique des prochaines IRVE haute puissance sur les aires d'autoroutes. Leur estimation se fonde sur deux horizons de temps – 2028, en guise de référence, et 2035 – et deux scénarios correspondants : un parc automobile de près de 5,3 millions de véhicules électriques en 2028 et de 15,6 millions en 2035. De cette analyse ressortent trois principaux constats.
La puissance sera-t-elle suffisante ?
L'intégration des nouvelles IRVE aux réseaux électriques devrait s'effectuer sans difficulté. « La demande de puissance en recharge rapide est marginale à l'échelle nationale et ne se cumule pas avec la pointe nationale, estiment les experts d'Enedis et de RTE dans leur étude. Pour les années à venir, les stations de recharge les plus puissantes actuellement installées devraient suffire à accueillir le trafic autoroutier. » En sachant que la pointe nationale de consommation électrique évoquée s'élève à 8,3 GW, au 22 janvier 2020.
En effet, d'après leurs calculs, la somme des puissances appelées sur l'ensemble des aires de service équipées de bornes de recharge devrait s'élever entre 2 et 5 GW à l'échelle nationale – soit 4 à 12 MW par aire – en 2035. Ces chiffres suivent la trajectoire déjà envisagée d'un besoin de puissance attendu à la hauteur de 1,5 MW par aire en 2028 (pour une recharge de 80 % en 20 minutes).
Aucun enjeu technique ou financier important
A l'instar du défi technique de raccordement électrique, le challenge financier ne présente, lui non plus, pas d'accroc. Toujours selon Enedis et RTE, les coûts de développement des réseaux de transport et de distribution pour l'alimentation des stations autoroutières de recharge d'ici 2035 se situent entre 300 et 600 millions d'euros – autrement dit, 20 à 40 millions d'euros par an.
« [Cela] représente entre 0,3 et 0,6 % des investissements planifiés par les gestionnaires des réseaux de distribution et de transport sur la période », soulignent les analystes dans leur étude. En juillet dernier, l'État avait justement déjà annoncé un financement de 100 millions d'euros pour équiper le réseau national non-concédé en bornes électriques à l'horizon 2022.
Anticiper davantage pour mieux raccorder
Néanmoins, pour atteindre ces objectifs sans encombre, les géants du réseau électrique français recommandent le plus d'anticipation possible. « L'anticipation par les porteurs de projets est un facteur déterminant pour le bon développement des équipements de l'ensemble des aires de service », soulignent Enedis et RTE.
Ces derniers suggèrent d'envisager des délais de 12 à 14 mois, suivant la demande de raccordement, pour « permettre la réalisation des études, l'obtention des autorisations administratives et la réalisation des travaux d'adaptation requis. » En ce sens, suite à une délibération du 29 juillet, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) préconise déjà une modification du fameux décret. Celle-ci placerait à six mois (au lieu de trois) le délai donné entre la proposition technique et financière, relative au raccordement demandé, et l'accord du demandeur.