Mais l'ambition est énorme : le développement d'une économie produisant peu de carbone. Notre ambition de créer un marché intérieur efficace, de promouvoir un panachage d'énergies propres et performantes, et d'opérer les bons choix en recherche et développement, sera déterminante pour savoir si nous prendrons la tête de ce nouveau scénario ou si nous serons des suiveurs, a déclaré M. Andris Piebalgs, membre de la Commission en charge de la politique énergétique. Malgré ces propos, le Réseau Action Climat, le Comité de Liaison des Energies Renouvelables (CLER), les Amis de la Terre et le Réseau « Sortir du nucléaire », estiment que ce plan énergie est peu ambitieux et accorde une place trop importante à l'énergie nucléaire.
La Commission plaide pour que l'Union européenne s'engage à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 30% d'ici à 2020 par rapport à 1990 dans le cadre d'un accord international sur le cadre post-2012. Mais pour l'instant et en l'absence d'accord, elle propose aux 27 membres de l'UE de réduire de 20 % ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2020, par le biais notamment de mesures dans le domaine de l'énergie. Aujourd'hui, nous sommes convenus d'un ensemble d'objectifs ambitieux mais réalistes, qui étayeront nos efforts au niveau mondial pour restreindre le changement climatique et ses conséquences les plus terribles, a expliqué Stavros Dimas, membre de la Commission en charge de l'environnement. J'invite instamment le reste du monde développé à suivre notre exemple, à s'aligner sur nos réductions d'émissions et à accélérer la recherche d'un accord international sur les réductions des émissions au niveau de la planète, a-t-il ajouté. Un message clair lancé aux Etats-Unis, deuxièmes producteurs de CO2 de la planète derrière la Chine.
Mais pour les associations environnementales, l'objectif de 20% est jugé insuffisant. Seule une réduction de 30 % des émissions permettra de maximiser les chances de stabiliser le climat en maintenant la hausse de la température en deçà de 2°C d'ici la fin du siècle, constate Morgane Créach du Réseau Action Climat France.
Pour réaliser l'objectif européen qu'elle s'est fixé, la commission souhaite des économies d'énergies et surtout des investissements dans les énergies renouvelables en proposant un objectif contraignant selon lequel 20 % de la palette énergétique globale de l'UE devraient être produits à partir de sources renouvelables d'ici 2020. Cet objectif exigera une croissance massive dans chacun des trois secteurs utilisant des énergies renouvelables : l'électricité, les biocarburants et la climatisation, explique la commission.
Sur ce point Raphaël Claustre du CLER estime positif que l'objectif global revêt une valeur juridiquement contraignante. Cependant, il aurait fallu,selon lui,porter cet objectif à 25% et le décliner par secteur (électricité, chauffage-refroidissement.».
Cet objectif de la Commission relatif aux énergies renouvelables est assorti d'un objectif minimal pour les biocarburants : 10% pour leur utilisation comme carburant pour les véhicules d'ici 2020. En outre, elle propose de mettre en place des mesures d'incitation ou d'aide pour éviter les problèmes environnementaux de leur production et de promouvoir le développement de biocarburants de deuxième génération.
La Commission propose par ailleurs un plan stratégique européen pour les technologies énergétiques qui comprendrait l'installation d'éoliennes, de réacteurs nucléaires et de nouvelles centrales électriques (charbon et gaz) stockant leur CO2 dans le sous-sol. Elle souhaite également que le captage et le stockage du dioxyde de carbone soient intégrés dans le système d'échanges des quotas d'émission de l'UE.
La Commission plaide aussi pour le nucléaire mais de façon prudente : c'est à chaque État membre qu'appartient la décision de recourir ou non à l'électricité nucléaire. Pour les pays qui réduisent la part de leur énergie nucléaire, la Commission recommande de compenser en introduisant d'autres sources d'énergie produisant peu de carbone, sous peine de rendre encore plus difficile la réalisation de l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
C'est logiquement que le Réseau Sortir du nucléaire a vivement regretté que la Commission tente de faire passer le nucléaire pour une énergie propre et apte à lutter contre le changement climatique. Les risques (d'accident et de fuite notamment) et les déchets radioactifs pour lesquels aucune solution sûre et fiable quant à leur gestion à très long terme n'a encore été trouvée, disqualifient cette énergie, estime le réseau.
Concernant l'efficacité énergétique, la Commission réitère l'objectif proposé en octobre dernier, d'économiser 20 % de la consommation totale d'énergie primaire d'ici à 2020. Si cet objectif était atteint, cela signifierait que, d'ici à 2020, l'UE consommerait environ 13 % d'énergie en moins qu'aujourd'hui, épargnerait 100 milliards d'euros par an et éviterait la production de quelque 780 millions de tonnes de CO2 chaque année, indique-t-elle. Le plan prévoit des actions visant à rendre plus efficaces les appareils consommateurs d'énergie, les bâtiments, les transports et la production d'énergie. Le plan propose de nouvelles normes contraignantes en matière d'efficacité énergétique, la promotion de services énergétiques, des mécanismes de financement spécifiques à l'appui de produits plus économes en énergie. La Commission instaurera en outre un pacte des maires regroupant les 20 à 30 villes d'Europe les plus en pointe et proposera un accord international sur l'efficacité énergétique.
En réaction, les Amis de la terre regrettent que l'objectif de réduction des besoins énergétiques de 20% n'est pas été revu à la hausse alors que la sécurité de l'approvisionnement est on ne peut plus d'actualité avec la décision russe de fermer une nouvelle fois les robinets de gaz vers l'Europe. Le secteur du bâtiment est pour eux largement délaissé alors qu'il représente le gisement le plus important d'économie d'énergie. Qui se préoccupe sérieusement du changement climatique devrait en priorité réduire drastiquement les besoins en énergie de ce secteur !, note Cyrielle Den Hartigh des Amis de la terre.
L'autre volet des propositions de la Commission concerne la libéralisation du secteur et l'achèvement du marché intérieur de l'énergie.
Ce plan sera débattu par les 27 membres de l'UE en vue d'une adoption au sommet européen de mars.