L'association de consommateurs UFC-Que Choisir a réactualisé son enquête sur la fiabilité des diagnostics de performance énergétique (DPE), la dernière datant d'octobre 2012. Cinq ans se sont écoulés… et "la situation ne s'est pas améliorée", pointe une nouvelle fois l'UFC-Que Choisir dans son étude, publiée ce 7 septembre. Et ce, en dépit du cadre juridique, renforcé courant 2012, visant à améliorer le sérieux du dispositif, lancé depuis 2006 : une montée en compétence des diagnostiqueurs et un contrôle plus efficace, une meilleure transparence vis-à-vis des particuliers, une amélioration de la méthode de calcul, l'utilisation de logiciels validés par le ministère et la mise en ligne d'une base de données des DPE. Cette réforme "est entrée officiellement en vigueur le 1er juin 2013", rappelle le ministère de la Transition écologique. Il recense aujourd'hui quelques 8.000 professionnels certifiés pour la réalisation du DPE par le Comité français d'accréditation (Cofrac)."Le diagnostic de performance énergétique doit être établi par un professionnel indépendant satisfaisant à des critères de compétence et ayant souscrit une assurance", souligne le ministère.
Or, la classe énergétique "est toujours à géométrie variable selon les diagnostiqueurs dont les prestations restent trop souvent folkloriques", fustige, de son côté, l'UFC-Que Choisir. Sept propriétaires de maisons individuelles, situées dans des régions différentes, ont participé à l'enquête de l'association. Chacun a contacté cinq diagnostiqueurs immobiliers certifiés pour leur demander un DPE de leur maison.
Impacts sur le prix de vente de la maison
Résultats : les différents diagnostiqueurs ne s'accordent toujours pas sur leurs jugements car "aucune des sept maisons auditées ne s'est vue reconnaître la même classe énergétique". Ces classements "hasardeux" impactent les estimations de consommation et de factures d'énergie qui passent "du simple au double" pour deux maisons (Ile-de France et Occitanie), ajoute l'association. "A Montpellier, on arrive même à 80% d'écart [d'estimation de facture énergétique] !".
Le pavillon des Vosges (Grand Est), construit en 1970, a quant lui été classé dans trois classes énergétiques différentes de E (entre 231 à 330 kilowattheures (kWh) de consommation par an) à G, le seuil le plus énergivore (plus de 450 kWh par an). "Selon le diagnostiqueur appelé, c'est aussi un écart de 11% sur la valeur de la maison en cas de vente". Car cette étiquette énergie obligatoire a un impact sur les tarifs de vente ou de location des biens immobiliers. Une mauvaise performance énergétique, due aux classes les plus énergivores, F ou G, dévalue sa valeur alors que les prix des maisons, qui consomment peu d'énergie, classées en A ou B, "s'envolent" à l'inverse. A Nantes (Pays de la Loire), la maison de plain-pied, construite dans les années 70, n'a pas fait l'unanimité non plus. Trois professionnels l'ont classée en D et deux autres en E. Et sa valeur immobilière varie de 6%.
"La logique exige un logement doté d'une seule classe énergétique, quel que soit le diagnostiqueur qui établit le DPE. Pourtant, en dépit des 60 points de contrôle et de leur méthode de calcul standardisée, ils n'arrivent pas au même résultat. Du coup, les DPE faussent le marché immobilier. Quand ils ne sont pas exacts, ils sous-évaluent ou surévaluent les biens par rapport à leur valeur réelle", déplore l'UFC.
Pas mieux pour les conseils donnés
Les diagnostiqueurs n'auraient pas non plus recommandé de travaux d'économies d'énergie, pourtant compris dans le DPE. Ces travaux conseillés ne sont pas obligatoires."En Ile-de-France, deux des cinq diagnostiqueurs n'ont même pas préconisé de VMC (ventilation mécanique contrôlée), alors que c'est le préalable indispensable aux travaux d'isolation qu'ils ont recommandés (…). A Pau, les uns conseillent d'isoler, les autres pas !", relève ainsi l'enquête. A Nantes, un diagnostiqueur, constatant que la perte d'énergie provient des murs, n'aurait également pas préconisé leur isolation. Il a recommandé "l'installation d'une pompe à chaleur et d'un chauffe-eau thermodynamique, en plus de la VMC".
Les dépenses engagées pour un DPE ouvrent aussi droit à un crédit d'impôt. Or, certains diagnostiqueurs "ne savent même pas que les travaux d'économie d'énergie donnent droit à un crédit d'impôt de 30% [depuis septembre 2014]. Ils l'indiquent à 15%, voire à 26% ou encore à 38%." Leur connaissance des aides "est donc largement perfectible", pointe aussi l'étude.
L'UFC-Que Choisir presse le gouvernement d'Edouard Philippe à "adopter sans délai de nouvelles mesures techniques'" pour "une réelle fiabilisation" des DPE, notamment une meilleure formation et certification des diagnostiqueurs et à renforcer les contrôles. Elle renouvelle son énième appel à rendre "immédiatement" opposable le DPE au bailleur et au vendeur pour que la responsabilité du diagnostiqueur "puisse être concrètement engagée en cas de diagnostic erroné."