Tout est parti d'une phrase du rapporteur du projet de loi de révision constitutionnelle à l'Assemblée nationale. « En l'état, les conditions du référendum ne sont pas réunies », a déclaré le député LReM Pieyre-Alexandre Anglade dans une interview au Journal du dimanche du 9 mai. Et d'ajouter : « C'est la droite sénatoriale qui prive le pays d'un débat essentiel, en se servant de ce texte comme d'un outil électoral ».
Cette déclaration, censée refléter la position de la majorité présidentielle, fait suite au vote le 5 mai par le Sénat en commission d'une version du projet de loi différente de celle adoptée par l'Assemblée nationale en mars. Or, le texte doit être voté en termes identiques par les deux assemblées avant de pouvoir être soumis à la consultation des Français. Le débat a dès lors pris un nouveau tour politique à un an de l'élection présidentielle.
« Avant même que le Sénat n'ait voté quoique ce soit et que la discussion avec l'Assemblée nationale ne s'engage, Emmanuel Macron nous accuse de blocage pour justifier l'annulation d'un référendum dont il ne voulait pas. La manœuvre et l'hypocrisie sera la marque de cette dernière année de mandat », a fulminé sur Twitter le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau. « Il n'y aura pas d'abandon, ce texte va vivre sa vie parlementaire », a démenti le président de la République lors d'un déplacement à Strasbourg. Le projet de loi est en effet examiné en séance publique au Palais du Luxembourg ce lundi 10 mai et mardi 11 mai, ce qui laisse en théorie la possibilité aux sénateurs de revenir sur leur vote en commission.
Le projet de loi originel reprenait une proposition de la Convention citoyenne pour le climat qu'Emmanuel Macron avait annoncé vouloir soumettre à référendum. Il prévoit d'inscrire la phrase suivante dans la Constitution : « [La République] garantit la préservation de la biodiversité et de l'environnement et lutte contre le dérèglement climatique ». En mars dernier, le Conseil d'État avait rendu un avis très critique sur le projet de loi. Et l'utilité de cette révision constitutionnelle est mise en doute par plusieurs spécialistes du droit de l'environnement. Ainsi, pour le professeur de droit Arnaud Gossement, les deux versions de l'Assemblée et du Sénat ont un point commun : elles sont « moins ambitieuses et moins bien rédigées que ce que la Constitution prévoit déjà dans la Charte de l'environnement ».