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Ressources minérales marines profondes : leur exploitation détruirait irrémédiablement les habitats

L'exploitation des ressources minières marines profondes aura très certainement de lourds impacts environnementaux, alertent le CNRS et l'Ifremer qui viennent de réaliser une étude sur le sujet. Les habitats et la biodiversité sont en première ligne.

Biodiversité  |    |  P. Collet
Ressources minérales marines profondes : leur exploitation détruirait irrémédiablement les habitats

L'exploitation des ressources minérales marines profondes pourrait être particulièrement néfaste pour la biodiversité et les écosystèmes sous-marins. Si de nombreuses questions restent en suspens, les premières évaluations environnementales sont inquiétantes. Pour l'instant, une certitude se dégage : "l'exploitation minière [des ressources minérales profondes] aura indéniablement des impacts sur l'environnement".

C'est ce qui ressort d'une étude de plus de 900 pages sur les impacts environnementaux de l'exploration et de l'exploitation des ressources minérales marines profondes conduite par le CNRS et l'Ifremer et présentée jeudi 19 juin. L'étude, a expliqué Laurent Bélanger du ministère de l'Ecologie, a passé en revue la quasi-totalité de la littérature scientifique relative à trois ressources : les nodules polymétalliques, les sulfures hydrothermaux et les encroûtements cobaltifères.

Se préparer à quelque chose

Le ministère de l'Ecologie s'intéresse notamment à la mise en œuvre de la séquence "éviter, réduire et compenser" relative à la réduction des dommages environnementaux des projets. En effet, les ministères de l'Environnement et de la Recherche, commanditaires de l'étude, rappellent que "la France dispose d'une capacité importante d'exploration et d'accès à de nouvelles ressources minérales à grande profondeur en mer".

"On se prépare à quelque chose", a résumé Jérôme Dyment, chercheur au CNRS, ajoutant que "comprendre, c'est la possibilité de faire bien". Surtout que l'exploitation de certaines ressources pourrait démarrer très rapidement. En effet, Nautilus Minerals dispose des premiers permis d'exploitation des sulfures hydrothermaux accordés au plan mondial. Délivrés par la Papouasie-Nouvelle-Guinée, ces permis auraient ouvert la voie à une exploitation dès 2011, si un différend juridique n'avait opposé l'entreprise au gouvernement de l'Etat.

Laurent Bélanger est resté vague sur la suite concrète que le ministère entend donner à cette étude. Le représentant du ministère de l'Ecologie a néanmoins précisé qu'il "n'est pas prévu à ce stade" de consultation du public sur l'opportunité d'exploiter ces ressources.

Des habitats irrémédiablement détruits lors de l'extraction

Lors de l'extraction du minerai, le premier impact majeur est la destruction durable de l'habitat et de la faune. L'extraction des nodules polymétalliques, par exemple, "[compromettrait] le développement des espèces locales qui en dépendent (micro-organismes, coraux, gorgones…)". En effet, "les nodules forment un substrat dur qui alterne avec les sédiments mous sur lesquels ils reposent sur plusieurs milliers de km2", rappelle le document, estimant que "ces habitats de substrats durs sont irrémédiablement détruits par l'activité d'extraction minière". Certes la profondeur rend difficile "un ratissage systématique du champ de nodules", mais les nodules restants "ne [permettront] pas une recolonisation et un maintien de ces populations d'espèces".

La destruction des habitats vaut aussi pour les sédiments qui seront tassés par les extracteurs de nodules qui "[détruiront] à la fois l'habitat et les organismes sessiles sur leur passage". Le passage des machines "laissera un mélange de sédiments déstructurés et d'agrégats de sédiments resédimentés après leur mise en suspension", indiquent enfin les chercheurs ajoutant que "les organismes benthiques rencontreront alors une forte variabilité de substrats, probablement plus grande qu'à l'origine".

Quant aux techniques alternatives, elles s'avèrent tout aussi risquées pour les habitats. Un système à bennes entraînera un prélèvement plus important de sédiments et d'organismes vivants. Les systèmes à jet d'air ou d'eau et à drague vont, eux aussi, endommager le sédiment en pénétrant de plusieurs centimètres le sol et en le retournant. "Or, les espèces abyssales enfouies, comme les polychètes, ne vivent que dans les dix premiers centimètres de sédiments", rappellent les auteurs.

La formation d'un nuage de particules fines constitue un autre impact attendu. "[sa] sédimentation (…) sur une zone géographique large y affectera la faune qui s'y trouve (ensevelissement, perturbation de l'alimentation des espèces suspensivores…)", préviennent les auteurs. L'impact sera d'autant plus important que les particules en suspension sont riches en métaux et "[sont susceptibles] d'engendrer des éléments toxiques". Ces particules fines "peuvent être déplacées de 2 à 20 km autour du site", alertent les auteurs.

"Toutes les expériences menées sur les nodules concluent ainsi à une diminution immédiate et significative de la biodiversité dans le sillon de dragage", conclut le rapport. Ce constat est aussi valable pour les encroûtements cobaltifères, avec "un risque supplémentaire" concernant la toxicité des particules fines, compte tenu des techniques de lixiviation in situ. L'exploitation des sulfures hydrothermaux aurait des impacts identiques, à une différence près : "les animaux survivant à l'extraction du minerai auront pour se déployer un autre substrat dur, mais présentant des caractéristiques physico-chimiques très différentes".

Rejets des déchets miniers en mer

L'extraction des minerais est cependant loin d'être le seul impact environnemental abordé par le rapport.

"Le rejet des déchets miniers (eau de fond, sédiments, débris de minerai) constitue un autre point de vigilance majeur", explique le rapport.  S'ils sont effectués en surface, ces rejets entraîneraient une hausse de la turbidité, une modification du pH et de la température ainsi qu'un apport en nutriments et en métaux lourds.

De même, "d'autres conséquences sont possibles en lien avec l'activité industrielle", explique le rapport qui cite notamment les émissions acoustiques, lumineuses et électromagnétiques engendrées par le matériel, la présence de navires susceptible de générer vibrations et bruit, le rejet à la mer de saumure issue de la production d'eau potable, l'introduction d'espèces invasives et les accidents (fuite de carburant, de produits toxiques, perte de minerai créant un impact en surface, naufrage…). Sans compter les impacts liés au traitement du minerai à terre que le rapport n'aborde pas.

Réactions4 réactions à cet article

 

Tant que l'espèce humaine considérera que tout lui appartient, à commencer par la planète, qu'elle n'a que des droits et aucun devoir, je ne vois pas de raisons pour que ces mises en garde aient un effet quelconque.

Jean-Claude Herrenschmidt | 24 juin 2014 à 10h08
 
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L'erreur serait d'abandonner l'espoir ; et simplifier à outrance la situation amène une vue noir/blanc qui fait désespérer.
L'espèce est diverse : des moutons et des canailles certes, des conservateurs serviles, mais surtout des gens de bonne volonté et des instruits, qui ne demandent qu'à arranger les choses.

Et parmi les actions nécessaires il y au premier rang la discussion et l'élucidation des situations. Pourquoi ? parce que nous sommes en face de catastrophes bien réelles bâties sur des problèmes artificiels.
Il faut déjà comprendre et faire comprendre que l'économie ne sert PAS à satisfaire des besoins. encore moins des nécessités. C'est AVANT TOUT un jeu de casino organisé pour faire converger les mises dans les poches d'un nombre qui, idéalement, se réduit à 1, le Gagnant du Jeu.

Il suffit de voir les gaspillages, la production de l'inutile, de l'éphémère, la violence du jeu, les gains effectivement nuls, et on est bien devant la terrasse du Casino où les perdants finalement se suicident et où les gagnants finissent de même.

On cherche le mécanisme de base, il est simplissime : l'argent appelle l'argent, c'est du Monopoly. L'argent est LA marchandise. La planète est détruite par des gens qui ne le savent pas, des actionnaires de Monsanto payés au bénéfice immédiat, les épargnants, vous si vous l'êtes.

Le moyen puissant d'arrêter ce jeu, ce n'est pas de planter du bio (bien quand même), c'est de montrer le Jeu. Et cesser de rétribuer l'argent.

Zoltan | 24 juin 2014 à 14h25
 
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Vous avez "presque" tout à fait raison, Zoltan. Je me permets toutefois de franchir un pas supplémentaire. Qu'il faille cesser de rétribuer l'agent, certes. Mais ce n'est que la moitié du chemin. Il faut aussi remettre l'argent, c'est-à-dire la monnaie, à son juste rang : un moyen d'échange pratique. La valeur des choses ne devrait pas être estimée au moyen d'une unité monétaire définie par le rapport d'échange entre agents économiques, mais au moyen d'une unité d'énergie, seule indépendante de toute tentation spéculative.

Jean-Claude Herrenschmidt | 24 juin 2014 à 16h04
 
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Monsieur Herrenschmidt, il faudra que nous prenions une mousse ensemble à l'occasion. Nous parlerons de l'alternative ambiante et des monnaies fondantes :-)

Zoltan | 25 juin 2014 à 00h24
 
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