Quelle est l'exposition au plomb des logements français et quelles conséquences sur les jeunes enfants ? Pour tenter de répondre à ces questions, différents partenaires (1) dont le CSTB (2) et l'EHESP (3) , ont initié un état des lieux dans le cadre du projet Plomb-Habitat de la contamination au plomb d'enfants de six mois à six ans dans 484 foyers.
Cette étude s'est décomposée en deux temps : des enfants atteints de plombémie (4) ont été sélectionnés parmi des hôpitaux tirés au sort dans toute la France (concentration dans le sang supérieur ou égal à 25 microgrammes/L) et une enquête environnementale a été menée. Prélèvements d'eau et de poussières au sol mais également sur les aires de jeux extérieures, mesure de plomb dans les revêtements muraux, questionnaire détaillé sur les facteurs de risques, les diagnostiqueurs ont recueilli un ensemble de données sur les logements, leur mode d'occupation et le comportement des enfants. Les résultats obtenus ont ensuite été extrapolés aux 3,6 millions de logements qui hébergent un enfant dans cette tranche d'âge en France.
Au final, les données montrent que près de 3 % des habitations présentent une concentration de plomb dans l'eau du robinet supérieure à 10 microgrammes/litre. Si la valeur limite est aujourd'hui fixée à 25 microgrammes/litre, à partir du 1er janvier 2013 la commission européenne imposera un seuil de 10 microgrammes/L.
Présence de peinture au plomb dans 24 % des habitations
Pour ce qui est des poussières déposées au sol, 0,2 % des logements et 1,25 % des parties communes contiennent des concentrations supérieures aux recommandations fédérales américaines (430 microgramme/m2). L'une des causes de ces contaminations ? Les enquêteurs ont relevé la présence de peinture au plomb dans 24 % des habitations dont 4,7 % dans un état dégradé.
Si 1949 est considéré comme l'année de l'interdiction de la peinture au plomb, la réalité de cette dernière prend effet plus tard. L'analyse de l'ensemble des textes réglementaires (5) à ce sujet de Jean-Paul Lucas, l'un des responsables de l'étude au CSTB, souligne le fait "que leurs champs d'application excluaient souvent les logements et toujours les utilisateurs autres que les professionnels du bâtiment, rendant dès lors possible l'utilisation de peintures à la céruse (6) dans les logements. Par ailleurs, tandis que l'utilisation était encadrée, même partiellement, l'interdiction de la vente de peinture à base de céruse n'était jamais mentionnée avant l'arrêté du 1er février 1993".
Celui-ci interdit la vente et l'importation des peintures contenant de la cérusite (7) , de la céruse ou des sulfates de plomb. Il met ainsi un frein à leur usage pour les professionnels mais également les particuliers. Cependant, d'après l'article de Jean-Paul Lucas "l'emploi de peintures au plomb par les particuliers reste encore possible après cette date, car ceux-ci ne sont visés par aucune disposition des textes antérieurs sanctionnant l'emploi de la céruse" .
Les effets du plomb sur la santé (8) sont aujourd'hui bien connus. Il agit sans seuil de toxicité. A des faibles niveaux de contamination, un des effets les plus préoccupants reste la diminution des performances cognitives et sensorimotrices des enfants. Une augmentation de la plombémie de 100 μg/L est associée à une baisse de quotient intellectuel (QI) de 1 à 5 points.
Une enquête de l'Institut de veille sanitaire (9) montre cependant que les cas de saturnisme (plombémie supérieure ou égale à 100 microgrammes/litre) continuent à diminuer en France : ils sont passés de 2,1% en 1995-1996 à 0,11% en 2008-2009 dans la classe d'âge 1 à 6 ans.