Ce lundi 24 novembre, Eco-Emballages a lancé l'extension des consignes de tri à l'ensemble des plastiques d'ici 2022. Cette démarche, qui vise à doubler le taux de recyclage des matières plastique à l'horizon 2030, se fera par étape, au fur et à mesure de la modernisation des centres de tri. Cette évolution est jugée incontournable par Eco-Emballages et à cette occasion, Eric Brac de La Perrière, son directeur général, a expliqué qu'il fallait revoir en profondeur la carte de France des centres de tri. A la clé, une division par deux de leur nombre, de l'ordre de 240 aujourd'hui.
Pour généraliser cette extension des consignes de tri des emballages plastique, Eco-Emballages va lancer un appel d'offres auprès des collectivités locales. "Toutes les collectivités ont les moyens de rentrer dans le dispositif, à partir du moment où elles investissent", explique Eric Brac de La Perrière. La première étape vise, d'ici 2016, l'extension à 8 ou 12 millions d'habitants supplémentaires, par rapport aux 3,7 millions impliqués dans la phase expérimentale. Une seconde phase prévoit l'extension à l'ensemble du territoire avec un déploiement progressif entre 2017 et 2022. A noter que jusqu'en 2017, la garantie de reprise des plastiques n'est pas assurée par Eco-Emballages, mais par d'autres acteurs tels que Federec, la Fnade ou Valorplast.
Doubler la valorisation des emballages plastique en 15 ans
Actuellement, le taux de recyclage des plastiques stagne à 23%, pour un million de tonnes d'emballages ménagers en plastique. Au-delà des enjeux de tri liés à la densité des territoires, l'une des principales difficultés posées par les emballages plastique est l'hétérogénéité des matières. Sept flux doivent être séparés en quatre familles : les bouteilles et flacons en PET et PeHD, les pots et barquettes en PP, PE et PET (57% des tonnages), les pots et barquettes complexes et les films en PP complexes ou trop petits (20%), les pots et barquettes en PET multicouches, PS, PVC ou PSE (15%) et enfin les films souples en PeBD et PeHD (11%). Parmi tous ces emballages, seuls les "gros" et "rigides" sont simples à trier et les 20% d'emballages regroupant les pots et barquettes complexes et les films en PP complexes ou trop petits ne sont pas recyclables.
Le but fixé par Eco-Emballages est de doubler le taux de valorisation des emballages plastique entre 2014 et 2030. Concrètement, aujourd'hui 23% des emballages plastique sont valorisés, dont 57% des bouteilles et flacons, 1% des pots et barquettes et 1% des films. Eco-Emballages entend porter la part des plastiques valorisés à 39% fin 2022, dont 70% des bouteilles et flacons, 25% des pots et barquettes et 11% des films. En 2030, l'objectif est de recycler 56% des emballages plastique, dont 82% des bouteilles et flacons, 55% des pots et barquettes et 23% des films.
Seulement 15% des centres sont aptes
La monté en puissance du dispositif sera très progressive. "Nous ne pouvons pas déployer la collecte des plastiques dans toute la France car l'outil de dégroupage n'est pas adapté", explique Eric Brac de La Perrière. Selon l'éco-organisme, l'expérimentation menée de 2012 à 2014 a montré que seuls 15% des centres de tri peuvent trier convenablement et à un coût raisonnable tous les emballages en plastique. Dans les autres centres, l'expérimentation a révélé un faible taux de captage, une baisse du rendement ou une dégradation des conditions de travail. Eco-Emballages juge donc que la modernisation des centres de tri est une condition indispensable à la réussite du projet.
Parmi les éléments indispensables au succès de l'extension des consignes de tri, l'éco-organismes met en avant l'efficacité des centres de tri conçus dès l'origine pour trier tous les emballages en plastique, les systèmes de tri automatisés des films et des emballages en plastique rigide, l'existence de solutions de valorisations énergétiques pour la fraction non-recyclable, l'existence de bâtiments pouvant accueillir l'augmentation des tonnages et un schéma tri simplifié suivi d'un tri spécialisé pour couvrir les zones rurales. A l'opposé, certaines situations sont particulièrement défavorables, et notamment un coût de tri des plastique atteignant parfois 1.500 à 3.000 euros par tonne (contre 800 euros, selon le standard qu'Eco-Emballages s'apprête à soutenir), le tri manuel des emballages en plastique, l'absence de marge d'évolution des centres de tri, des centre de tri trop perfectionnistes (jusqu'à 5 flux) et la mise en décharge de 40% des emballages en plastique triés par les habitants.
Redessiner la carte des centres de tri
La position de l'éco-organisme est en phase avec l'étude sur le sujet qu'a publié l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) en juin dernier. Les centres de tri manuel sont donc appelés à fermer, estime Eco-Emballages au profit de centres automatisés traitant de 30.000 à 60.000 tonnes par an de déchets. "Nous ne soutiendrons pas de centres de tri qui ne créeraient pas de valeur environnementale et économique", prévient Eric Brac de La Perrière. L'un des centres, les plus proches de l'idéal présenté par Eco-Emballages est celui de Rillieux-La-Pape (Rhône), le plus grand de France qui traite plus de 40.000 tonnes par an.
L'éco-organisme souligne notamment que plus les centres de tri sont grands et modernes, plus la rentabilité est bonne. C'est un point essentiel car l'extension des consignes de tri se fait sans hausse du barème des metteurs sur le marché et avec une aide financière apportée par l'éco-organisme de 45 millions d'euros sur deux ans. Pour éviter une explosion des coûts, il s'agit donc de s'assurer que le tri des plastiques permette une baisse des autres coûts du centre de tri. L'idée étant en effet que les gains de productivité réalisés sur l'ensemble des déchets triés permettent de financer l'extension du tri aux emballages plastique. L'éco-organisme estime que l'ajout du tri des plastiques dans un centre performant permet de réduire de 15% le coût global du tri pour l'ensemble des matières.
Idéalement, Eco-Emballages plaide pour que la reconfiguration de la carte des centre de tri permette d'aboutir à de grands centres de tri industriels (jusqu'à cinq flux de plastiques rigides différents et un flux de plastiques souples) dans les zones densément peuplées. Trente à 35 de ces centres couvriraient environ 42 millions d'habitants. Des centres moyens (jusqu'à trois flux rigides et un flux de plastiques souples) répondraient aux besoins des zones intermédiaires. Il y aurait 40 à 45 centres couvrant 25 millions d'habitants. Les 70 à 80 centres de ces deux catégories couvriraient 70 à 80% des tonnages. Enfin, 20 à 25 centres de tri de proximité seraient créés pour les zones moins densément peuplées. Ces centres dégrouperaient les déchets en un flux de plastiques rigides et un flux de plastiques souples. Le tri plus fin serait réalisé dans des centres spécialisés de surtri. "Toutes les collectivités auront des solutions, personne ne sera laissé sur le côté", rassure Eric Brac de La Perrière. Quant à la facture globale de cette reconfiguration, elle devrait atteindre 1,5 milliard d'euros, expliquait l'Ademe en début d'été.