Après deux inspections sur site, les 18 juillet et 11 décembre, pour vérifier le respect des prescriptions imposées pour la poursuite d'exploitation du réacteur n°1 de Fessenheim jusqu'à quarante ans, l'Autorité de sûreté nucléaire a donné le 18 décembre son feu vert (1) pour le renforcement du radier, tel qu'envisagé par EDF en s'appuyant sur une analyse de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et sur une expertise complémentaire relative à la résistance du béton.
Cependant, l'ASN émet plusieurs réserves (2) pour ce renforcement qui "doit être réalisé avant le 30 juin 2013", notamment sur l'efficacité du renforcement du radier en cas de présence d'eau dans la cuve.
Renforcer la résistance du radier en cas d'accident grave
L'ASN rappelle d'abord la prescription relative au radier : "La modification vise à augmenter à la fois l'épaisseur et la surface de la zone d'étalement du corium (3) en cas d'accident grave avec percement de la cuve. Elle permet d'« augmenter très fortement » la résistance du radier au corium".
"L'IRSN avait souligné que, dans certains cas d'accidents graves, le radier des réacteurs de Fessenheim pourrait être percé dans un délai inférieur à 24 h", indique l'institut dans son avis (4) .
Pour y répondre, EDF envisage d'épaissir de 50 cm le radier dans le local "puits de cuve" et de "permettre en cas d'accident grave avec percement de la cuve, via un tunnel ménagé à cet effet, un étalement du corium sur le radier du réacteur dans une zone de collecte [elle-même épaissie] incluant le local R147 et ainsi significativement plus importante que le puits de cuve seul" (cf. schéma ci-dessous). EDF a indiqué dans son dossier que ces travaux permettraient de multiplier par un facteur supérieur à 3 la durée minimale de percement du radier en cas d'accident grave et de perte de moyens d'alimentation électrique et de refroidissement.
"La modification consiste à épaissir le radier et à permettre l'étalement du corium dans le puits de cuve et dans un local adjacent. Elle permet de porter le délai de percement au-delà de 40 heures [44h exactement], lorsque le corium, après percée de la cuve, s'écoule dans un puits de cuve « sec » ou ne contenant que peu d'eau", précise l'IRSN, qui ajoute : "En revanche, l'IRSN a considéré qu'une présence importante d'eau pouvait perturber l'étalement du corium et limiter le bénéfice de la modification et a donc recommandé qu'EDF prenne les dispositions nécessaires pour éviter cette situation".
Ce point fait donc partie des réserves émises par l'ASN, réserves qui doivent être prises en compte par l'exploitant avant tout travaux.
Un renforcement affaibli en cas d'inondation
L'ASN indique avoir eu un échange de courrier avec l'exploitant sur cette question précise. L'exploitant, dans sa réponse, n'a pas précisé "si la gestion de l'arrivée d'eau dans le puits de cuve au cours d'un accident grave pouvait être optimisée de manière à maximiser l'efficacité de la solution retenue".
L'ASN lui demande donc d'évaluer, sous un an, "quelle gestion de l'eau permet, en cas d'accident grave avec percement de la cuve, de maximiser l'efficacité de la solution mise en œuvre".
De plus, l'ASN souhaite qu'une instrumentation soit mise en place afin de vérifier, en cas d'accident grave, que l'étalement du corium se déroule conformément à ce qui est prévu suite à la modification.
Le béton et la radioprotection à surveiller
L'ASN demande également à l'exploitant d'attacher une attention particulière à la composition chimique du béton qui sera utilisé pour l'épaississement du radier. "La teneur en oxyde de calcium est un paramètre déterminant pour la température de fusion du béton, ainsi que pour son enthalpie de fusion. Ainsi, ce paramètre est à maîtriser tout particulièrement pour la composition du béton utilisé".
Enfin, l'ASN demande, avant fin 2012, des précisions sur la radioprotection envisagée pour les travailleurs intervenant sur ces travaux.