Certains éco-organismes n'atteignent toujours pas les objectifs en matière de collecte et de recyclage fixés dans leur cahier des charges. Pour y remédier, il conviendrait de simplifier leurs obligations et de fixer des sanctions financières significatives en cas de non atteinte des objectifs clés. Telles sont les principales recommandations de la Cour des comptes qui consacre un chapitre aux éco-organismes dans son rapport public annuel, publié ce mardi 25 février.
La plupart des mesures proposées par la Cour valident la démarche engagée avec l'adoption de la loi Économie circulaire ce mois-ci. Celle-ci était en débat au Parlement au moment où la Cour finalisait son rapport.
Certains résultats déçoivent
Sans surprise, la Cour constate que les résultats des éco-organismes en matière de collecte et de traitement « sont inégaux ». Certes, la collecte des déchets couverts par une filière de responsabilité élargie du producteur (REP) a progressé de 46 % entre 2014 et 2018, pour atteindre près de 5,6 milliards de tonnes. Mais certaines filières affichent des taux de collecte inférieurs à 50 % : les déchets équipements électriques et électroniques (DEEE) professionnels (27 %), les piles et accumulateurs (44,5 %), les éléments d'ameublements (42 % pour les ménages, 16 % pour les professionnels), les textiles (35 %) et les gaz fluorés (9,7 %).
Plus inquiétant, la collecte et la valorisation sont « parfois en deçà des objectifs qui leur sont assignés ». La Cour cite en particulier les textiles, avec un taux de collecte de 40 %, soit 10 points sous l'objectif fixé à Éco TLC ; les DEEE ménagers, avec un taux de collecte de 51 % sont sous les 59 % fixés pour 2018 ; et les piles et accumulateurs, avec un taux de 46,7 % en 2018, sont sous l'objectif national de 50 %. Le constat est similaire s'agissant du recyclage. Le Cour pointe ici du doigt les emballages ménagers, dont le taux de recyclage est estimé à 70 % en 2018, alors que la loi Grenelle I de 2009 avait fixé un objectif de 75 % pour 2012.
Pour y remédier, la Cour préconise de « réaliser plus régulièrement des études de gisements ». Ces études doivent permettre de « fiabiliser les indicateurs fondés sur les gisements de déchets [dont découlent les objectifs assignés au éco-organismes, ndlr] et d'améliorer le pilotage des filières REP ». Elle reprend aussi certaines mesures de la loi Économie circulaire destinée à améliorer les performances environnementales du dispositif : renforcer les modulations des éco-contributions, développer de nouveaux canaux de collecte, ou encore améliorer l'information des consommateurs.
Un nombre réduit d'objectifs de résultats
La Cour note aussi les « difficultés persistantes » de l'État à réguler les filières REP. En l'occurrence, le rapport reprend à son compte l'approche proposée par le rapport Vernier et mise en œuvre par la loi Économie circulaire : « les cahiers des charges applicables aux éco-organismes mériteraient d'être recentrés sur des objectifs de résultats et, (…) en contrepartie de cette responsabilisation des producteurs, un contrôle effectif de l'activité des éco-organismes doit être mis en place ».
Une sanction financière significative
Le dernier volet des propositions de la Cour concerne le pilotage des filières REP et « la mise en œuvre de sanctions réellement efficaces et dissuasives ». En matière de pilotage, elle estime trop complexe le partage des rôles entre l'État et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Sur ce sujet, la Cour évoque « l'opportunité » offerte par la réglementation européenne qui demande aux États de confier à une autorité indépendante ou publique, la supervision et le contrôle de la REP. Ce sera l'Ademe, prévoit la récente loi Économie circulaire.
Quant au dispositif de sanction, il est « peu dissuasif et [n'a] jamais été mis en œuvre ». En effet, les amendes sont peu dissuasives (30 000 euros au maximum) et la suspension ainsi que le retrait de l'agrément sont deux mesures « peu crédibles dans les filières où un seul éco-organisme est agréé ». Le constat est identique concernant les sanctions envers les producteurs qui ne s'acquittent pas de leurs obligations. La Cour recommande de « [définir] des sanctions financières significatives, assises, par exemple, sur le chiffre d'affaires de l'éco-organisme ou du producteur contrevenant, selon les cas ». La loi Économie circulaire prévoit un dispositif basé sur le coût réel d'atteinte des objectifs de prévention et de gestion des déchets fixés dans leur cahier des charges : la sanction, pour chaque point d'écart, est fixée à au moins 1,5 fois le coût moyen d'atteinte d'un point d'objectif.