Le 7 mars, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a annoncé avoir classé au niveau 2 de l'échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques (Ines) (graduée de 0 à 7) la découverte d'une nouvelle fissure par corrosion sous contrainte sur un circuit du réacteur 1 de la centrale nucléaire de Penly (Seine-Maritime).
Cet événement affecte une portion de circuit considérée jusqu'à maintenant comme non sensible à la corrosion sous contrainte. La fissure, qui atteint quasiment toute l'épaisseur de la tuyauterie, présente « [des] conséquences potentielles et [une] augmentation de probabilité d'une rupture » qui justifie ce classement, explique l'ASN. Elle précise toutefois qu'il n'y a pas eu de conséquences sur le personnel ni sur l'environnement.
À la suite de cette découverte, l'ASN « a demandé à EDF de réviser sa stratégie [de détection des fissures par corrosion sous contrainte] pour tenir compte de ces nouvelles informations ». Le gendarme du nucléaire « prendra prochainement position sur cette stratégie révisée ». Et de préciser que le problème concerne le réacteur 3 de la centrale nucléaire de Cattenom (Moselle) et ceux des centrales de Civaux (Vienne), Chooz (Ardennes) et Penly (Seine-Maritime).
Une portion considérée comme non sensible
Initialement, en octobre 2021, le défaut de corrosion sous contrainte avait été détecté au niveau des soudures des coudes de la tuyauterie raccordant le système d'injection de sécurité (RIS) au circuit primaire principal. Par la suite, les analyses menées sur différents modèles de réacteurs ont conduit EDF et l'ASN à considérer que le problème concerne essentiellement les réacteurs les plus récents.
En cause : un défaut de conception des circuits affectés. La géométrie de ces circuits est caractérisée par une augmentation du nombre de coudes et un rallongement de certains tronçons, par rapport à ceux des réacteurs plus anciens et moins puissants. Sur cette base, les contrôles d'EDF ont porté en priorité sur les circuits des réacteurs les plus récents et, en particulier, sur les soudures à proximité des coudes, seules affectées jusqu'à présent.
Aujourd'hui, le nouveau défaut détecté sur le réacteur 1 de Penly questionne cette approche, puisque la fissure se trouve sur un tronçon rectiligne. « Cette ligne était considérée par EDF comme non sensible à la fissuration par corrosion sous contrainte en raison notamment de sa géométrie, explique l'ASN. Une double réparation lors de la construction du réacteur », pourrait être en cause. Ces réparations « [sont] de nature à modifier ses propriétés mécaniques et les contraintes internes du métal au niveau de cette zone », explique l'ASN.
Une fissure qui remet en cause la résistance de la tuyauterie
L'importance de la fissure est une autre source d'inquiétude. Jusqu'à maintenant, il était question de microfissures. Le défaut décelé à Penly est une fissure qui s'étend sur 155 mm et sa profondeur maximale est de 23 mm (pour une épaisseur de tuyauterie de 27 mm).
Environ le quart de la circonférence de la tuyauterie est affecté, et cela sur quasiment l'intégralité de l'épaisseur de l'acier pour le point le plus endommagé. « La présence de cette fissure conduit à ce que la résistance de la tuyauterie ne soit plus démontrée », explique l'ASN, précisant que « toutefois la démonstration de sûreté du réacteur prend en compte la rupture d'une de ces lignes ».