Bien que la voiture soit le plus cher de tous les modes de transports, elle demeure le véhicule privilégié par les Français. A la demande de la Fédération nationale des usagers des transports (Fnaut), l'économiste Jean-Marie Beauvais a déterminé le coût, pour le consommateur, des différents modes de transport de voyageurs, pour les déplacements de proximité et pour les déplacements à moyenne et longue distance.
Son étude, présentée à Paris le 10 janvier, se penche sur la dépense supportée directement par l'usager suivant le mode de transport qu'il utilise, plutôt que sur les coûts économiques (coûts de construction et d'entretien de la voirie et de gestion de la circulation, coûts de production du service de transport collectif), et les coûts sociaux et écologiques des transports. Pour la voiture, comme pour les motos, les paramètres retenus sont l'achat du véhicule, les pièces détachées, les réparations, le carburant, les dépenses de stationnement, l'assurance. Pour les transports en commun, l'étude prend en compte le trafic passager, et les dépenses et recettes.
Il en ressort que pour les déplacements à courte distance (moins de 80 km), la dépense unitaire est de 10 centimes par voyageur par kilomètre en transport collectif contre 27 centimes en voiture. Pour les déplacements à longue distance (plus de 80 km), la dépense unitaire est de 10 centimes par véhicule par kilomètre en transport collectif, contre 19 centimes en voiture. Dans les deux cas, se déplacer en transport collectif revient donc, en moyenne, moins cher que se déplacer en voiture.
L'avantage tarifaire du transport collectif s'est accentué
A partir des données macro-économiques de l'Insee, il apparaît qu'en 40 ans, le coût du transport collectif a augmenté de 12% en monnaie constante, et celui de la voiture de 34%. Si le prix d'achat des véhicules a baissé d'environ 20%, celui des carburants (+60%) et surtout de l'entretien et des réparations (+78%) a augmenté. L'avantage tarifaire offert par le transport collectif s'est donc accentué.
L'évaluation des coûts des déplacements de proximité, réalisée sur la base de données recueillies en 2010, révèle que le coût moyen du transport collectif est deux fois et demi plus faible que le coût complet de la voiture (avec un taux moyen d'occupation de 1,28). Mais le coût moyen du transport collectif est un peu supérieur au coût marginal de la voiture (carburant et stationnement). Deux résultats nouveaux : le coût complet d'usage de la moto est à peine inférieur à celui de la voiture en solo, mais son coût marginal est nettement plus faible ; le coût de l'autocar est très voisin de celui du TER.
Pour les transports longue distance, le TGV est plus coûteux que le train Intercités, d'environ 20%. Le train Intercités est lui-même plus coûteux que l'autocar, de près de 30% (cas d'Eurolines). Enfin l'avion "traditionnel" est nettement plus coûteux que le TGV (+35%) mais l'avion à bas coût l'est environ deux fois moins.
Collectiviser la voiture individuelle
Sur de longue distance, le coût d'usage de la voiture est 30% plus faible que pour les déplacements de proximité, essentiellement parce que le taux d'occupation moyen du véhicule est nettement plus élevé (1,74 contre 1,28). Les coûts de la voiture en solo varient peu entre courte et longue distance.
"Le plus souvent, l'usager ne prend en compte que le coût marginal (coût apparent) d'usage de son véhicule et, par la suite, ne perçoit pas le bénéfice financier que l'usage du transport collectif pourrait lui apporter. Il reste à établir des modes de concurrence équitable entre les différents transports : surtaxer le diesel, taxer le kérosène, introduire des péages urbains, ne pas augmenter la TVA sur les transports publics", souligne le président de la Fnaut, Jean Sivardière. A moyen terme et pour accompagner la transition énergétique, la voiture individuelle est appelée à devenir plus collective par le co-voiturage et l'auto-partage. Pour les nouvelles générations, elle n'est désormais plus un symbole de réussite sociale, et les petites cylindrées devraient faire leur retour sur le marché.
Quant au secteur ferroviaire, il résistera, à long terme, à la hausse du prix de l'énergie, puisque celle-ci ne représente que 5% du coût total de ce moyen de transport, alors que la voiture en dépend à 30%, selon les modèles, et l'avion à 35%, malgré les gains de productivité impressionnants du transport aérien, dont la consommation de carburant a été divisée par cinq entre 1950 et 2000. Sans compter le fait que le TGV émet 40 fois moins de CO2 que l'avion.
Pour les transports publics, il reste à les penser comme des services au plus proches des besoins des citoyens, comme cela est le cas à Belfort par exemple, où la carte Optymo permet d'accéder à n'importe quel mode et de payer le mois suivant uniquement pour les trajets effectués. Pour cela, "il faut une gouvernance forte, qui diversifie les autorités organisatrices", préconise la chercheuse Catherine Bouteiller, du Laboratoire d'économie des transports. Car un mode de transport, c'est aussi un mode de vie.