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Biocarburants de 2e génération : la France veut mettre « le paquet »

Après le lancement, en 2008, du projet Futurol pour la production de bioéthanol de 2e génération, c'est au tour du projet Bio-T-Fuel de se pencher sur la production de biodiesel. Objectif : une production industrielle effective dès 2020.

Energie  |    |  C. Seghier
   
Biocarburants de 2e génération : la France veut mettre « le paquet »
© Filipebvarela
   
''La France va mettre le paquet sur la deuxième génération de biocarburant'', a souligné, le 14 octobre dernier, la secrétaire d'État à l'Écologie, Chantal Jouanno, à l'occasion d'une visite de l'Institut Français du Pétrole (IFP) à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine).

Si les doutes se font toujours plus nombreux quant à l'intérêt des agrocarburants de première génération, un consensus semble en revanche émerger pour mener des recherches sur ceux de seconde génération. Contrairement aux agrocarburants utilisés à l'heure actuelle qui utilise surtout le sucre et l'amidon et qui ne sont produits qu'à partir de certains éléments des plantes (graines ou tubercules), ceux de seconde génération peuvent être produits à partir de plantes entières. Il deviendrait alors possible de valoriser tous les déchets organiques et de dédier certaines cultures non alimentaires uniquement à la production de carburants. Théoriquement, les bilans énergétique et environnemental de cette filière seraient bien meilleurs et certains inconvénients reprochés aux agrocarburants de première génération comme la concurrence avec la production alimentaire, deviendraient caducs.

Sur le plan technico-économique et environnemental, ces nouveaux procédés de conversion de la biomasse utilisant essentiellement des ressources de type lignocellulosique (déchets agricoles, résidus de bois) nécessitent d'être optimisés et validés sur des installations de démonstration préalablement au lancement industriel de ces productions. Il s'agit donc de préparer les procédés et les conditions de production de biocarburants à moyen et long terme.

Pour produire ces agro(redevenus bio ?)carburants de seconde génération, deux voies sont possibles. La première ''par voie biochimique, qui servirait pour les moteurs à essences, vise à produire de l'éthanol à partir de végétaux dont on aura fait fermenter le sucre en alcool, explique Slavik Kasztelan directeur adjoint du centre de résultats Raffinage-Pétrochimie à l'IFP. La seconde ''par voie thermochimique, consiste à produire un carburant de synthèse liquide pour les moteurs diesels à partir de la biomasse en la gazéifiant''.

Bioéthanol par voie biochimique

C'est la voie biochimique que le projet Futurol a choisi de développer. Ce démonstrateur retenu début 2008, mobilise au total 72 M€ financés par des fonds publics (Oséo Innovation) à hauteur de 40 %. Mobilisant 11 partenaires publics et privés1 sur une durée de 8 ans, il comporte une phase pilote, suivie d'une phase prototype. L'installation pilote doit être construite sur le site agro-industriel de Pomacle-Bazancourt (Marne). Les objectifs : mettre sur le marché un procédé, des technologies et des produits (enzymes et levures) permettant de produire du bioéthanol à un prix ''compétitif'' grâce à une matière première diversifiée (coproduits agricoles, biomasse forestière, cultures dédiées, ...) et obtenir ''les meilleurs bilans énergétiques et de gaz à effet de serre (GES) possibles'' sur l'ensemble de la chaîne de production. Le programme d'expérimentation inclut à la fois la problématique de la ressource (systèmes de culture, amélioration des variétés, bilans environnementaux…), du prétraitement (broyage, catalyseurs, séparation), de l'hydrolyse (optimisation du procédé, sélection des souches d'enzymes), de la fermentation (pentoses, minimisation des inhibiteurs, valorisation du CO2). ''Pour que les choses soient rentables, il y'a encore du travail mais on a de bonne raison de penser que le projet va marcher, estime Antoine Margeot, Ingénieur de Recherche au Département de Biotechnologie de l'IFP. La preuve du concept est faite, on arrive à faire du sucre. Il y'a encore des verrous technologiques (diminution du coût de production des enzymes notamment) mais aucun n'est infranchissable''.

Biodiesel par voie thermochimique

Avec Futurol, la France s'est dotée d'une plate-forme recherche et de démonstration sur la voie biochimique. En revanche, la voie thermochimique ne bénéficiait pas encore de démonstrateur de recherche au contraire par exemple de l'Allemagne. La raison : ''les technologies sont coûteuses en investissement'', précise Slavik Kasztelan.
Pour autant, dans le cadre de l'appel à manifestation d'intérêt, le projet Bio-T-Fuel vient d'être sélectionné. Porté par le consortium SOFIPROTEOL, CEA, IFP, Axens et Total, le projet, d'un coût global de 112 millions d'euro, a été approuvé par le Conseil d'Administration de l'ADEME le 7 octobre dernier et recevra une aide de 33 millions d'euros. Il s'appuie sur la production de biodiesel liquide à partir de biomasse lignocellulosique (bois, paille, déchets…). Selon l'ADEME, cette expérimentation devrait ''permettre de disposer d'éléments d'évaluation nécessaires pour juger de l'opportunité d'un déploiement de cette filière''. Une analyse de cycle de vie « du champ au réservoir » devrait être conduite de manière à permettre d'analyser dans quelles conditions les biocarburants de cette filière peuvent contribuer à répondre aux défis environnementaux. Le projet prévoit la construction de deux sites industriels, dont un à Compiègne (Oise), l'autre sur ''site industriel existant'' de Total, qui a proposé un financement représentant 30 % des apports demandés aux partenaires. La phase de développement sera finalisée en 2015, pour une production industrielle effective à partir de 2020.

Reste que pour FNE, Bio-T-fuel est prématuré. ''Le Gouvernement ne peut […] justifier le projet de production d'agrocarburants de deuxième génération en parlant d'expérimentation dès l'instant où nous ne disposons pas du recul nécessaire sur les agrocarburants de première génération, estime la fédération d'associations dans un communiqué. ''Qu'il s'agisse d'expérimentation ou de production, le résultat est le même: la France se lance dans les agrocarburants sans le recul nécessaire''. La Fédération demande donc le gel de tout développement industriel des agrocarburants, qu'ils soient de première ou de deuxième génération, tant que leur intérêt environnemental et énergétique n'aura pas été démontré.
Alors Bio-T-Fuel : pas si beau que cela ?

Notes

1 - Le projet est porté par le consortium Procethol 2G
Partenaires de recherche : ARD, IFP, INRA, ONF.
Partenaires agro-industriels : Confédération générale des planteurs de betteraves, Champagne céréales, Lesaffre, Tereos, Total.
Partenaires financiers : Crédit agricole du Nord Est, Unigrains.

Réactions5 réactions à cet article

Une mauvaise utilisation de ces produits...

Ces projets me semblent reposer sur une réflexion qui aurait fait l’impasse sur les principales questions que l’on aurait dû se poser sur les utilisations possibles de ces "déchets" et sur les utilisations qui pourraient nous être les plus nécessaires, ou même indispensables, dans un avenir assez proche.

Prenons d’abord le cas de la paille : environ 4,5 à 5,5 millions de tonnes pourraient être rendues disponibles pour des usages non agricoles.

Voir notamment "Les pailles de céréales, ressources, valorisations, obstacles à leur mobilisation" (http://www.inra.fr/la_science_et_vous/dossiers_scientifiques/chimie_verte/questions_a_la_recherche/les_pailles_de_cereales_ressources_valorisations_obstacles_a_leur_mobilisation ).

"La paille de céréales a un PCI de 4300 KWh/T en moyenne pour 5 à 6 % de cendres." (source : thermobois), soit un PCI très proche de celui du bois : si l’on souhaite tirer directement des calories de la paille la meilleure façon d’en obtenir un rendement élevé est de brûler cette paille en lui faisant subir le moins de transformations possible.

Car toute transformation étant consommatrice d’énergie cette énergie consommée s’inscrira en négatif par rapport au PCI de base.

Transformer la paille en agrocarburant nécessitera un cycle de transformation qui ne pourra que diminuer, et probablement de façon importante, la quantité finale d’énergie récupérée à partir de chaque tonne de paille.

Il faudra payer ces transformations : il faudra donc que le prix de vente du carburant produit couvre assez largement (afin qu’il y ait bénéfice dans l’opération) le coût des transformations plus le prix d’achat de la matière première.

Une matière première dont les producteurs aimeraient qu’elle puisse se négocier à un prix plus élevé que l’actuel, mais que les transformateurs ne souhaiteront pas non plus trop élevé.

Une telle filière n’aurait donc de sens que dans une période où le prix de l’énergie deviendrait nettement plus élevé qu’il ne l’est aujourd’hui, sans toutefois que cette filière soit assez productive pour fournir une substitut à une part importante de notre consommation d’énergie fossile.

On peut penser que le prix des énergies grimpera bientôt, et peut être très haut dans les quelques années à venir.

Cela donnera-t-il pour autant à cette filière une véritable raison d’être ?

Non car brûler directement ces déchets sera de toutes façons plus efficace du point de vue du rendement, mais il y aurait au moins une autre raison de ne pas se lancer dans cette filière : les besoins d’une agriculture devant faire face à un pétrole durablement très coûteux.

Ce coût élevé du pétrole rendrait très coûteux les engrais comme les labours et pourrait avoir pour conséquence des baisses de rendement laissant des quantités de "déchets" disponibles en nette décrue.

Déchets qui trouveraient alors une destination privilégiée : la restauration des sols, dont on sait qu’ils sont dans une large proportion fort dégradés avec un manque croissant de matières organiques.

On aurait donc comme recours une agriculture sur sols (à nouveau) riches très favorables à la pédogenèse (source naturelle d’enrichissement) et disposant de qualités sanitaires élevées.

S’il devenait vital de consacrer des quantités importantes de matière organique à cette restauration des sols, on verrait alors une compétition se développer entre les producteurs d’agrocarburants de seconde génération et les agriculteurs, et l’impératif de maintenir de bonnes conditions de sécurité alimentaire aurait vite raison des premiers.

Enfin si ’on veut tirer d’une tonne de paille un maximum d’énergie, on ne la fait pas brûler, on ne la transforme pas en carburant mais on l’utilise comme isolant, soit en doublage sur du bâti existant soit pour construire directement avec ce matériau.

Il me semble que si l’on examine l’utilisation de ces déchets du point de vue de leur utilité sociale et environnementale maximale deux voies sont prépondérantes : celle d’une restauration des sols même dans une époque de pétrole abordable, car une des conséquence serait un moindre niveau de pollution imputable à l’agriculture, et l’utilisation de ces déchets qui s’y prêtent le mieux dans l’isolation thermique et phonique, avec notamment l’avantage d’une très grande efficacité pour une dépense modique.

Un excellent rapport qualité / prix, à peu près imbattable.

jcm | 19 octobre 2009 à 22h55 Signaler un contenu inapproprié
bravo JCM

Tout est dit, merci JCM !
72 millions d'euros + 33 millions d'euros pour Total et compagnie ? et si on mettait plutôt ces sommes dans le développement de modes de transport moins gourmands en énergie ? et surtout dans la mise en place de systèmes de développement réduisant les besoin en transports ? (je pense au développement local...)
Décidément on se demande parfois pour qui roule l'ADEME...

Nathalie | 22 octobre 2009 à 14h02 Signaler un contenu inapproprié
Re:Une mauvaise utilisation de ces produits...

Merci pour ces précisions.
A noter que la paille est consommée surtout l'élevage bovin à viandes et les laitières... Cette consommation risque donc de diminuer dans le futur, libérant un peu de paille pour les autres usages.

jp-42 | 22 octobre 2009 à 14h22 Signaler un contenu inapproprié
Ne nous affolons pas

Que d'idées utopiques pour remplacer les énergies fossiles! Tout est devenu source d'énergie ,y compris
les déchets de toutes origines! Oui,on connait le bio-gaz d'origine méthanique depuis longtemps,mais les méthaniers continueront encore longtemps à alimenter les canalisations en Europe car les réserves sont énormes,voire en Alaska et Russie par ex. Oui à la recherche pour le futur ,mais en tenant compte de tous les facteurs economiques et
environnementaux!

arthur | 23 octobre 2009 à 21h38 Signaler un contenu inapproprié

la production énergétique de la paille et qui ne demande pas de dépense coûteuse pour la tranformation serait de la brûler tout en résevant une quantité suffisante et nécessaire pour la consommation animalière.
le cendre sera récupéré pour d'autres utilisation

drfranck1 | 12 juillet 2011 à 21h12 Signaler un contenu inapproprié

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