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Actu-Environnement

Le timide premier pas de la formation des députés aux enjeux du climat et de la biodiversité

Entre les ateliers de la Fresque du climat, avant les élections législatives, et la « formation » par des scientifiques, après coup, plus d'un quart des 577 députés élus ont été sensibilisés aux enjeux du climat et de la biodiversité. Témoignages.

Gouvernance  |    |  F. Gouty
Le timide premier pas de la formation des députés aux enjeux du climat et de la biodiversité

Pendant trois jours, du 20 au 22 juin, 40 chercheurs se sont mis bénévolement à la disposition des 577 députés tout juste élus lors des élections législatives. Réunis par l'ancien parlementaire Matthieu Orphelin, le climatologue Christophe Cassou et le collectif Pour un réveil écologique, ils s'étaient donnés pour objectif de dispenser une « formation premiers secours » sur le climat et la biodiversité au plus grand nombre possible d'élus. L'association La Fresque du climat, avec le concours du cabinet de conseil Koncilio, en a fait de même un mois avant, auprès de 300 candidats un peu partout en France. Au total, ces initiatives ont respectivement « formé » – ou du moins sensibilisé – 154 et 30 membres de la nouvelle législature. Le bilan de ces opérations demeure donc mitigé.

Deux premiers essais relativement concluants

“ Tous les partis devraient autant parler d'environnement qu'ils parlent d'économie ” Léa Falco, collectif Pour un réveil écologique
« Avoir touché un quart des députés, ce n'est pas rien », clame Matthieu Orphelin, plutôt partisan du verre à moitié plein. Cependant, en regardant celui à moitié vide, pour Léa Falco, membre du collectif Pour un réveil écologique, cela signifie que près de « 75 % des élus n'ont pas pris la peine de se déplacer pour discuter quinze minutes avec des scientifiques à seulement cent mètres de leurs nouveaux bureaux ». De la même manière, malgré la présence volontaire d'un tiers de la majorité formée par le groupe Ensemble (en plus des élus écologistes ou de gauche, dont la venue, moins étonnante, était attendue), les organisateurs regrettent l'absence des deux formations politiques restantes : les Républicains et le Rassemblement national. Un seul membre de chacun de ces deux partis a fait l'effort d'échanger avec les spécialistes « apartisans » du climat et de la biodiversité. « En quelque sorte, cela montre que l'environnement reste encore un sujet partisan dont certains partis préfèrent simplement ne pas se préoccuper, constate Léa Falco. Cet argument n'est plus entendable aujourd'hui. Tous les partis devraient autant parler d'environnement qu'ils parlent d'économie. »

L'atelier pédagogique et participatif élaboré par la Fresque du climat est davantage parvenu à rassembler les oppositions. En Gironde, l'association a réussi à réunir des candidats de tous les partis (littéralement) autour de la table. Pendant une heure et demie, ces derniers se sont prêtés au jeu de placer correctement 42 cartes mélangeant divers facteurs climatiques ou environnementaux en fonction de leurs liens de cause à effet. « Un point commun existe : le diagnostic climatique n'est plus discuté, a témoigné, après coup, Thomas Cazenave, député La République en marche, devant la caméra de la chaîne locale TV7. Nous sommes parvenus à une convergence unanime sur le constat, mais une divergence sur la méthode à employer pour agir» Une fois la « fresque » de cartes formée et le constat de l'aspect systémique du problème climatique dressé, les joueurs sont passés au débat durant lequel la division s'est manifestée à nouveau. « Mettre en œuvre des solutions pour améliorer la situation a relevé de discussions purement politiques, sans consensus », nous confie Loïc Prud'homme, député La France insoumise de la 3e circonscription de Gironde.

Avantages et inconvénients du biais communicationnel

L'atelier proposé par la Fresque du climat s'est déroulé à huis-clos, à l'abri des caméras et de la presse pour ne pas piper les dés du débat. La tactique opposée a été employée par la « formation » encadrée par Pour un réveil écologique : les jeunes bénévoles du collectif ont réalisé un « name and shame » pour recenser l'identité de chaque député participant et leur étiquette politique sur les réseaux sociaux. Une telle stratégie comprend néanmoins le risque de transformer l'exercice en un « greenwashing » opportuniste pour les politiques volontaires.

Elle s'est finalement montrée payante selon les organisateurs. « Que ce soit parce qu'ils avaient déjà une appétence personnelle ou politique pour ces sujets ou qu'ils avaient un intérêt purement communicationnel à se montrer en présence des scientifiques, le fait que les députés volontaires se soient déplacés est positif, assure Léa Falco. Cela prouve qu'il est désormais positif pour tous de discuter ouvertement et publiquement d'environnement – ou du moins d'en avoir l'air. De plus, les contacts des scientifiques pris par leurs collaborateurs laissent la porte ouverte à de vraies coopérations à l'avenir. »

Vers l'instauration d'une formation obligatoire ?

Si ce premier pas s'est donc avéré timide, il semble, au moins, avoir eu le mérite d'entamer une nouvelle marche à suivre. « Les scientifiques mobilisés ont trouvé l'exercice très intéressant et appellent maintenant à reproduire l'exercice pour former les conseillers de chaque ministre, remarque Matthieu Orphelin, qui avoue ne pas avoir encore déterminé comment s'y prendre. Nous avons également reçu plusieurs demandes de formation de la part d'élus locaux ou d'attachés parlementaires. » Le député de Gironde, Loïc Prud'homme, qui n'a pas pu participer à l'opération devant le palais Bourbon, partage le même avis : « L'audition de telles pointures en matière de climat et de biodiversité ne doit pas se limiter, à l'Assemblée, à la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. »

Le collectif Pour un réveil écologique a l'ambition, quant à lui, d'aller encore plus loin : reproduire l'exercice sous la forme d'une formation transdisciplinaire de plusieurs heures au sein même de l'Assemblée nationale, tous les cinq ans. « Il existe déjà des formations obligatoires pour les nouveaux députés sur le fonctionnement des institutions, souligne Léa Falco. Il n'y a pas de raison que les enjeux environnementaux ne soient pas abordés de façon également obligatoire. » L'intéressée veut ainsi éviter l'échec de l'essai réalisé, en mai dernier, au Parlement suisse : huit experts du Giec y avaient tenu un cours et un débat de trois heures sur le réchauffement climatique et la biodiversité… auxquels seulement un tiers des parlementaires s'étaient inscrits.

Réactions1 réaction à cet article

Il faudrait retenir le "name and shame", et certains députés peuvent directement connaître les réalités de leur circonscription grâce aux les cartes interactives " épandages de pesticides " https://solagro.org/nos-domaines-d-intervention/agroecologie/carte-pesticides-adonis et "qualités des cours d'eau, rivières " site https://qualite-riviere.lesagencesdeleau.fr/ Et agir auprès des services préfectoraux, DDT , et agences de l'eau .. Pourquoi certaines stations ont perdu leurs mesures 2018, 2019 ? et qu'il n'y a aucune mesure en 2020, 2021 ? Quand on change de département : 86 à 37, il y a de grosses différences en qualités rivières et c'est inquiétant quand même, que certains élus se dispensent de participer, alors savent il déjà que c'est catastrophique ? ou/et ils ne veulent surtout pas changer de paradigme ? Y aurait il aussi des insoumis/réfractaires aux enjeux du climat et de la biodiversité ?

J Cl M 44 | 27 juin 2022 à 17h50 Signaler un contenu inapproprié

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