
Valérie Létard, secrétaire d'Etat au développement durable, a donc lancé récemment un plan de mobilisation des filières et des territoires destiné à développer les emplois verts. La première réunion s'est tenue le 13 octobre. Dix filières professionnelles sont mobilisées : transports, automobile, énergies renouvelables, eau-assainissement-déchets, bâtiment, agriculture et forêts, électromécanique, construction électrique et réseaux, raffinage, biocarburants et chimie verte, tourisme et métiers de la mer. Jeudi 22 octobre, la secrétaire d'Etat est allée à la rencontre des professionnels des bâtiments, qui comptent parmi les secteurs les plus impactés par les défis du Grenelle. Chantier de la rénovation, énergies renouvelables, basse consommation… font partie des défis prioritaires. Les professionnels, conscients de l'enjeu, ont souligné la nécessité de réagir rapidement sans toutefois brûler les étapes.
Les enjeux d'une formation de qualité
Face à l'urgence, les professionnels redoutent un risque d'anarchie dans le développement des formations, guidé par l'opportunisme de certains. ''Il faut faire attention aux réactions face au buzz sur les métiers verts, être attentif à la qualité des formations'', analyse Philippe Guez, délégué général de l'AREF (association régionale pour la formation dans le BTP) Ile-de-France. ''Il y a un risque de ne pas avoir les formations adéquates. Pourtant la formation est capitale'', confirme Manuel Ferraz, président d'Aforelec, organisme de formation des professionnels de l'équipement électrique.
Les métiers de la rénovation, des énergies renouvelables requièrent des compétences spécifiques qui ne s'improvisent pas ! La pose de panneaux photovoltaïques, par exemple, nécessite des compétences en matière d'étanchéité, de raccordement. Lors des branchements, les installateurs travaillent avec des tensions dangereuses en courant continu, à fortes températures. La pose peut présenter des risques pour des gens peu formés. Mais ces connaissances ne se limitent pas à la technique ! Raccordement au réseau, aides financières pour les travaux, assurance, contrat de rachat d'électricité… doivent être expliqués au client par le professionnel. ''Le risque aujourd'hui, c'est de voir des installations posées par des gens pas compétents'', note Xavier Hornung, de la CSEEE (chambre syndicale des entreprises d'équipement électrique de Paris et sa région).
Créer des ponts entre les métiers
Les enjeux actuels nécessitent de nouvelles compétences, mais pas seulement. Ils redessinent également les contours de certains métiers. ''Nous ne nous contentons pas de poser des panneaux photovoltaïques. Les professionnels du bâtiment conçoivent, réalisent, exploitent et garantissent le bon fonctionnement du matériel sur 20 ans'', explique Jean-Louis Estève, chef d'entreprise.
Les métiers du bâtiment, qui jusque-là étaient très cloisonnés, doivent évoluer vers une approche plus globale des travaux. ''Nous sommes passé d'un système vertical à une toile. Les entreprises doivent aujourd'hui et demain travailler sur l'offre globale. Nous sommes dépassés et débordés'', analyse Guy Bédier, chef d'entreprise. ''Il y a une réelle difficulté à concilier les différents métiers pour avoir une approche globale'', confirme Stéphane Jaillant, entrepreneur.
La formation continue s'adapte très vite…
La formation continue semble néanmoins avoir un temps d'avance sur la formation initiale concernant l'adaptation aux nouveaux enjeux. FEE Bat, QualiPV, Qualit'EnR… les initiatives se multiplient pour apporter aux professionnels de nouvelles compétences. ''Lorsqu'un besoin apparaît dans nos métiers, il est immédiat. Il faut donc monter des formations très rapidement'', analyse Yves Desportes, de la CSEEE.
L'adaptation des diplômes existants est plus longue. ''Nous devrions commencer par lancer des initiatives dans les filières existantes avant d'en créer de nouvelles'', analyse Guy Chaumel, directeur du CFA Délépine. Des expériences sont déjà menées dans ce sens-là. Depuis trois ans, la Fédération française des électriciens travaille à la mise en place d'une mention énergies renouvelables au bac pro électricien. Mais la procédure prend du temps. ''L'idéal était que cette mention soit installée dès la rentrée 2010 mais nous n'y parviendrons certainement pas'', note Gwenaëlle Pailleux, secrétaire générale de la Fédération française des électriciens.
''Nous avons besoin d'être plus réactifs, constate Valérie Létard en fin de réunion. Nous devons organiser la souplesse et l'adaptabilité des formations, sans toutefois brûler les étapes''.
La prise en main de cette question par les pouvoirs publics a été tardive. Les réflexions entamées récemment doivent aboutir fin janvier à une conférence nationale sur les métiers de la croissance verte. ''Le temps est contraint'', confirme Alain Liebard, président du comité de la filière énergies renouvelables.