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Actu-Environnement

“La fraude de Volkswagen n'est que la partie émergée de l'iceberg”

La fraude de Volkswagen aux tests d'émissions de polluants pour ses véhicules diesel produits aux Etats-Unis interroge sur la pertinence des cycles actuels. Explication de Julia Hildermeier, membre de la Fédération européenne pour le transport et l'environnement (T&E).

Interview  |  Transport  |    |  D. Laperche
Environnement & Technique N°352
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°352
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“La fraude de Volkswagen n'est que la partie émergée de l'iceberg”
Julia Hildermeier
Spécialisée dans les politiques environnementales de l'industrie automobile de la Fédération européenne pour le transport et l'environnement
   

Actu-environnement : Volkswagen aurait équipé certains de ses modèles diesel produits aux Etats-Unis de dispositif anti pollution ne s'activant que lors des phases de tests de pollution. Comment expliquer que le constructeur allemand puisse mettre en place un tel logiciel ?

Julia Hildermeier : Le problème n'est pas nouveau, depuis des années les constructeurs - et pas seulement Volkswagen - trichent lors des tests d'homologation.

Le cycle de l'examen est normé et facilement repérable par des algorithmes : il n'est pas étonnant qu'un logiciel puisse détecter lorsque la voiture est en cours d'examen. De plus, ce dispositif n'est pas la seule manière pour optimiser les valeurs d'émissions mesurées sur une voiture. Depuis quelques années, la différence entre les valeurs officielles et les émissions réelles a fortement augmenté : cela suggère que les constructeurs ont appris à mieux contourner ces tests en laboratoire.

AE : Quel est l'intérêt pour les constructeurs d'utiliser ces dispositifs anti-pollution uniquement lors des phases de test ?

JH : Les constructeurs ont intérêt à ce que les voitures durant les tests d'homologation aient des valeurs d'émissions les plus basses possibles. Ce type d'examen - et c'est pourquoi cette histoire est aussi importante - est en Europe à la base de réglementations sur les émissions des voitures. Par exemple, la norme Euro 6 limitant les oxydes d'azote (NOx) est entrée en vigueur depuis le 1er septembre 2015 pour tous les véhicules. Toutes les marques automobiles qui vendent des véhicules diesel ne respectent pas les limites d'émissions de polluants atmosphériques NOx en Europe : selon nos travaux, seulement un véhicule testé sur dix est conforme à la limite légale de cette norme. Des études de la Commission européenne montrent par ailleurs que les voitures diesel dépassent d'environ 7 fois les limites NOx. L'Europe est en train de réformer la procédure utilisée pour tester les émissions des véhicules dans les conditions réelles de conduite. Malheureusement, la nouvelle version ne répondra toujours qu'à une partie des problèmes et des manières de frauder des constructeurs.

AE : Les constructeurs semblent déployer des technologies sophistiquées pour contourner les tests. Sont-ils si difficiles à respecter ?

JH : Il est tout à fait possible pour un constructeur de respecter les normes environnementales actuelles. L'écart persistant entre les émissions officielles et réelles des véhicules diesel s'explique par l'utilisation, par les constructeurs, de systèmes de traitement des gaz d'échappement bon marché, moins efficaces pour les voitures vendues en Europe, où les procédures de test sont inefficaces. La différence de coût entre les logiciels utilisés pour tricher et les technologies permettant de respecter les normes est de 300 à 500 euros par véhicule. Ce n'est donc pas une question de technologie.

AE : Volkswagen a annoncé avoir vendu onze millions (1) de ce type de véhicules « optimisés » dans le monde : la fraude a pu être étendue au niveau européen ?

JH : Il est bien possible que ce type de logiciel ait été utilisé dans les tests européens, puisque la moitié des voitures vendues en Europe sont des diesels. Il est donc également fort probable que des voitures vendues en Europe dépassent les valeurs d'émissions mesurées en situation réelle du fait de la tricherie de différents constructeurs.

AE : Quelles différences y-a-t-il entre les réglementations européennes et américaines et quelles sont leurs conséquences ?

JH : La duperie de Volkswagen a pu être découverte aux États-Unis parce que les examens sont beaucoup plus strictement appliqués par rapport à ceux réalisés de l'autre côté de l'Atlantique. En Europe, les agences d'homologation sont les clients des constructeurs : ces derniers peuvent payer un laboratoire pour conduire cet examen. Nous aurions besoin en Europe de deux garanties : tout d'abord, d'une procédure d'examen indépendante sous surveillance européenne et non économiquement liée aux constructeurs. Ensuite, nous devrions pouvoir assurer la conformité des voitures produites, aux valeurs testées dans le laboratoire. Ces deux conditions sont déjà déployées aux États-Unis, c'est pour cela que le gouvernement américain a été capable de détecter le contournement des tests. Il faut réagir vite au niveau européen et réaliser comme le propose Michel Sapin une enquête à l'échelle européenne. La fraude de Volkswagen n'est que la partie émergée de l'iceberg.

1.  Lien vers le communiqué de presse Volkswagen<br /><br />
http://www.volkswagenag.com/content/vwcorp/info_center/en/news/2015/09/Volkswagen_AG_has_issued_the_following_information.html

Réactions1 réaction à cet article

OK et qu'en est-il pour les moteurs essence. On sait que les catalyseurs ne sont efficaces que pour ~50 000 km et après chauffage à plus de 400° soit après 10 km de route.
Les nouveaux tests se feront-ils aussi à froid?

VD69 | 10 octobre 2018 à 17h47 Signaler un contenu inapproprié

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