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L'environnement et la Gouvernance de droite et de gauche

Alors que le gouvernement prépare la seconde édition de la conférence environnementale, Gabriel Ullmann, nous propose un avis d'expert qui revient sur l'engagement des différents gouvernements en matière d'environnement depuis les grandes lois des années 70.

Publié le 16/09/2013

A l'heure de l'affichage sur la transition écologique, et aux déclarations d'intention à l'occasion d'une nouvelle conférence environnementale, il est apparu opportun de s'interroger sur l'engagement des différents gouvernements en matière d'environnement, depuis les grandes lois des années 1970.

Le présent constat se fonde sur l'adoption des lois, que nous considérons le moins subjectivement possible, comme majeures pour l'environnement, du début du septennat de Giscard d'Estaing jusqu'à la fin du quinquennat du président Sarkozy (période de 38 ans). Avec les réserves suivantes :

- on entend par lois "majeures", celles d'une portée significative avérée dans les faits : par exemple qu'elles aient marqué une rupture, qu'elles aient infléchi fortement ou durablement des comportements et/ou des politiques ; d'une façon générale des lois qui dénotent une volonté politique affirmée1 (au moins sur le moment) ;

- il n'est considéré ici que les incidences environnementales des lois et, ce, sur la base de leur bilan global : aucune n'est exempte de dispositions peu favorables à l'environnement (les lois "Grenelle" en sont une bonne démonstration) ;

- il ne s'agit, enfin, que d'une vision partielle, donc critiquable, d'un contexte politique par le seul prisme des lois. Il ne s'agit nullement de faire ici un bilan environnemental qui nécessiterait de détailler les mesures mises en œuvre par les différents gouvernements, et leurs effets ; mais aussi, de façon symétrique, de prendre en compte toutes les mesures (et pas seulement d'ordre légal) qui ont été prises en défaveur de notre environnement.

L'exemple du Grenelle est, là encore, éclairant, avec, dans le même temps, des lois qui détricotent ou déréglementent, comme la loi du 17 février 2009 "pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privé"2, la loi du 12 mai 2009 de "simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures", etc. Démarche tant calamiteuse qu'infructueuse, qui est reprise (parfois avec les mêmes termes…) par des lois actuellement en chantier.

Présidence Giscard d'Estaing

Gouvernements Lois majeures (ministre de l'environnement en fonction)
Chirac : 05/74 à 08/76 (2 ans)

Barre I, II, III : 08/76 à 05/81 (5 ans)

Politique d'essence libérale

- juillet 1975 : Déchets

- juillet 1975 : Conservatoire du Littoral (G. Péronnet)

- juillet 1976 : Protection de la nature

- juillet 1976 : ICPE (A. Fosset)

Présidence Mitterrand I

Mauroy I, II, III : 05/81 à 07/84 (3 ans) - juillet 83 : Enquête publique (H. Bouchardeau)
Fabius 07/84 à 03/86 (1, 5 an)

- janvier 85 : Montagne (H. Bouchardeau)

- janvier 86 : Littoral (H. Bouchardeau)
Chirac 03/86 à 05/88 (2 ans)*

Présidence Mitterrand II

Rocard I, II : 05/88 à 05/91 (3 ans)
Cresson 05/91 à 04/92 (1 an) - janvier 92 : Eau (B. Lalonde)

Bérégovoy 04/92 à 03/93 (1 an)

Politique d'essence libérale
- décembre 92 : Bruit (S. Royal)

Balladur 03/93 à 05/95 (2 ans)*

Politique d'essence libérale
- février 95 : Renforcement protection de l'environnement (M. Barnier)

Présidence Chirac I

Juppé I, II : 05/95 à 06/97 (2 ans)

Politique d'essence libérale
- (C. Lepage)
Jospin 06/97 à 05/2002 (5 ans)* - (D. Voynet : 4 ans ; Y. Cochet : 1 an)

Présidence Chirac II

Raffarin I, II : 05/2002 à 05/2005 (3 ans)

Politique d'essence libérale
- mars 2005 : Loi constitutionnelle (Charte) (S. Lepeltier)

Villepin 05/2005 à 05/2007 (2 ans)

Politique d'essence libérale
- juin 2006 : Nucléaire (loi TSN) (N. Olin)

Présidence Sarkozy

Fillon I, II, III : 05/2007 à 05/2012 (5 ans)

Politique d'essence libérale

- août 2009 : Grenelle I

- juillet 2010 : Grenelle II

(JL. Boorlo/N. Kosciusko-Morizet)

Présidence Hollande

Ayrault : depuis 05/2012

Politique d'essence libérale
-  (D. Batho : 1 an ; P. Martin : en cours)

* Gouvernements de cohabitation

Du début du septennat du président Giscard d'Estaing jusqu'à la fin du quinquennat du président Sarkozy (38 ans), la gauche a gouverné durant 15 ans soit 40 % du temps. Nous avons comptabilisé 14 lois majeures (soit en moyenne une tous les 3 ans, mais avec une nette décélération depuis 1995). La gauche a été à l'origine de 5 lois, soit : presque 40 %.

Enseignements liminaires :

1) La protection de la nature reste largement le parent pauvre (elle doit, partiellement, son salut, aux dispositions de l'Union européenne3).

2) Aucune différence significative entre la gouvernance de droite ou de gauche. Est-ce surprenant, quand les politiques sont restées constantes en matière d'énergie,  de fiscalité, d'infrastructures, d'agriculture, de politique industrielle, de chasse, etc. ?

3) La période la plus féconde fut incontestablement les années 1975-76 (4 lois majeures en 2 ans4).

4) Des ministres, qui se revendiquent de l'écologie, ont participé à différents gouvernements durant un total de 11 années. Seule une loi majeure a été promulguée au cours de toute cette période (loi sur l'eau de 1992 : Lalonde). La comparaison des deux témoignages suivants illustre le propos : "Le ministère du possible"5 de Huguette Bouchardeau (non écologiste, 3 lois majeures) et "On ne peut rien faire Madame le ministre"6 de Corinne Lepage ("écologiste" déclarée).

5) La cohabitation la plus longue, celle de Lionel Jospin (5 ans, soit l'équivalent d'un "quinquennat") a été la moins productive. Même le nucléaire, pourtant fer de lance des Verts, n'a conduit à une loi-cadre, certes imparfaite et critiquable, que plus tard et par un gouvernement sans écologiste7 (en 2006).

6) L'engagement personnel du chef de l'Etat et/ou du chef du gouvernement est déterminant, mais non pas la durée de la fonction de ce dernier.

7) Si une politique d'essence libérale est, dans son principe au moins, peu propice à des lois majeures sur l'environnement, elle ne semble pas être discriminante en la matière.

La politique du gouvernement Ayrault semble largement conforter, à ce jour, l'ensemble de cette analyse. Les nombreuses lois annoncées seront-elles suffisantes pour modifier la donne ?

Avis d'expert proposé par Gabriel Ullmann

1 C'est pourquoi il a été pris le parti de ne pas retenir les lois, et ordonnances, de plus en plus nombreuses (et importantes) prises pour la transposition de dispositions communautaires.
2 A l'origine notamment du régime régressif de l'enregistrement ICPE.
3 La loi sur la biodiversité (hors période étudiée) semble, d'ores et déjà, ne pas tenir ses promesses et risque, en pratique, de connaître le même sort que tous les engagements antérieurs, régulièrement renouvelés, de protection de la biodiversité, des milieux remarquables comme les zones humides, les pelouses sèches, etc.
4 Ces lois s'inscrivent dans tout un train de réformes durant les premières années du septennat (IVG, âge de la majorité, saisine du Conseil constitutionnel, réforme du Parlement, etc.).
5 Edité chez Alain Moreau (1986, 211 pages)
6 Edité chez Albin Michel (1998, 212 pages).
7 Le gouvernement et l'Assemblée nationale à majorité socialiste adoptent même, en 1999, la loi d'orientation agricole qui (outre des assouplissements pour le régime ICPE de carrières), autorise, par dérogation à la loi littoral, la construction d'installations classées agricoles (porcheries et poulaillers industriels) à proximité du rivage. En 2000, c'est le tour de la régularisation de paillotes construites sur le domaine public maritime.

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2 Commentaires

Claude_91

Le 17/09/2013 à 9h54

Bonjour,

Intéressant,... mais pourquoi ne pas citer la loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie de 1996 ? Elle me semble aussi importante que les lois sur l'eau ou le bruit.

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Jojo

Le 17/09/2013 à 10h42

Bonjour,
mon observation ne porte que sur le titre de l'article. J'ose penser qu'une bonne gouvernance ne fait pas de politique et que le système binaire gauche/droite "à la française" est bien dépassé au moins depuis la fin des années 80 et la mondialisation.

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