En projet depuis de nombreuses années, le remplacement de la centrale au fioul lourd de Dégrad-des-Cannes en Guyane, prend un nouveau tournant. Le ministère de la Transition écologique annonce que la nouvelle centrale qui la remplacera sera finalement alimentée par de la biomasse liquide, des biocarburants donc. Jusqu'à présent, la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de Guyane, adoptée en mars 2017, prévoyait de remplacer la centrale par une nouvelle centrale thermique d'une puissance de 120 mégawatts (MW) fonctionnant au fioul léger convertible au gaz naturel, associée à une centrale photovoltaïque de 10 MW. Ce projet de centrale "hybride" est prévu à Larivot, et est porté par EDF Production électrique insulaire (EDF PEI) et a fait l'objet d'un arrêté d'autorisation d'exploiter en juin 2017 pour une mise en service début 2024. Mais un nouveau dossier sera déposé.
En réflexion depuis plusieurs mois du côté d'EDF, ce fonctionnement à la biomasse semble désormais possible et serait effectif dès la mise en service de l'installation. L'énergéticien s'était engagé à réaliser des tests sur des centrales similaires de son parc de production, avec de l'huile de colza notamment. Il va désormais devoir trouver une filière d'approvisionnement capable de faire tourner sa centrale. En réponse à l'avis de l'Autorité environnementale de décembre 2019, l'énergéticien annonçait « faire sa priorité de la mise en place d'une filière d'approvisionnement respectueuse de l'environnement et cohérente avec le cadre réglementaire exigé par l'Union européenne et l'État ».
Si EDF n'a donné aucune information pour l'instant, le ministère, lui, confirme en lui demandant de ne pas s'approvisionner en biocarburants issus de matières premières présentant un risque élevé d'induire des changements dans l'affectation des sols. « L'utilisation d'huile de palme et de soja sera notamment exclue », explique le ministère. Un défi de taille dans cette région dominée par les productions brésiliennes et états-uniennes à partir de maïs, et sujette à la déforestation, à moins qu'EDF ne se tourne vers la métropole où Total notamment a prévu de renforcer sa production de biocarburants. Quant à la possibilité de créer une filière de production locale, la PPE Guyane n'a rien prévu en la matière à part de poursuivre les recherches. Elle prévoit toutefois l'indépendance énergétique de la Guyane en 2030, ce qui pousse pour une production locale, comme la rappelé l'avis de l'Autorité environnementale.
Révision de la PPE
EDF va également reconsidérer la puissance de l'installation afin qu'elle soit dimensionnée « au strict nécessaire » selon le ministère de la Transition écologique, qui souhaite que la puissance de la centrale soit adaptée en fonction du développement des projets d'électricité renouvelable et de l'équilibre offre-demande de la région. Barbara Pompili a d'ailleurs convenu avec Rodolphe Alexandre, président de la région, de la révision simplifiée de la PPE de Guyane, qui pourrait être adoptée fin 2020. « Cette démarche s'inscrit dans la préparation d'une révision plus approfondie qui sera enclenchée à brève échéance dans le cadre d'une concertation permettant de développer, en Guyane, les énergies renouvelables et d'y implanter les meilleures technologiques disponibles telles que le stockage de l'énergie », précise le ministère.