Harmoniser les consignes de tri des emballages ménagers et des papiers. Le sujet est en discussion depuis plus d'une décennie. Des avancées ont été enregistrées depuis 2016, mais les Français se plaignent toujours d'être confrontés à des schémas variés en différents endroits du territoire. Le gouvernement veut donc accélérer le pas : le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire prévoit d'achever l'harmonisation des schémas de tri d'ici 2023.
Le Grenelle puis la loi de Transition énergétique
En juillet 2010, la loi Grenelle 2 fixait un objectif clair : un dispositif harmonisé de consignes de tri des emballages ménagers devait être défini avant janvier 2011 pour être appliqué sur l'ensemble du territoire en janvier 2015.
Cette disposition (qui reste inscrite dans la loi, à l'article L. 541-10-5 du code de l'environnement) est complétée en août 2015 par la loi de Transition énergétique. Celle-ci prévoit que les collectivités locales veillent à ce que la collecte séparée des déchets d'emballages et de papiers graphiques soit organisée selon des modalités harmonisées sur l'ensemble du territoire national. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) est chargée de formuler des recommandations "fondées sur un nombre restreint de schémas types harmonisés d'organisation de la séparation des flux de déchets, de consignes de tri correspondantes et de couleurs des contenants associés". Le dispositif doit être déployé progressivement (en s'appuyant sur le renouvellement naturel des parcs de contenants de collecte, précise la loi) pour couvrir tout le territoire en 2025.
L'Ademe a présenté ses recommandations en juin 2016. A cette date, trois schémas de collecte dominaient : le schéma multimatériaux (1) (63 % de la population couverte), le schéma papiers/emballages (2) (19 % de la population), le schéma fibreux/non-fibreux (3) (6 % de la population). Les 12 % restant de la population étaient couverts, soit par des schémas atypiques (6% des Français, en forte baisse), soit par plusieurs schémas de collecte.
Des progrès jugés trop lents
En 2016, l'Ademe proposait de réduire les modalités de tri à deux schémas : le schéma multimatériaux et le schéma fibreux/non-fibreux. Un contenant jaune était recommandé pour le flux multimatériaux ou le non-fibreux (complété, le cas échéant, par un bac bleu pour le flux fibreux). En 2019, constate le ministère de la Transition écologique, "moins de 20 % des contenants du service public de gestion des déchets n'étaient pas en cohérence avec le référentiel national établi par l'Ademe". La mutation, déjà engagée en 2016, s'est accélérée avec le déploiement de l'extension des consignes de tri à tous les emballages. En effet, le cahier des charges de la filière de responsabilité élargie du producteur (REP) pour les emballages ménagers permet de conditionner le soutien financier accordé par l'éco-organisme pour la modernisation des centres de tri au respect des préconisations de l'Ademe.
Pour autant, les Français expliquent ne pas être satisfaits des avancées enregistrées : la consultation préalable à la Feuille de route économie circulaire (Frec) "a montré que [l'harmonisation de la couleur des poubelles] était attendue pour simplifier et harmoniser les règles de tri des déchets sur tout le territoire". La Frec prévoyait d'ailleurs d'aller plus loin en soutenant "un schéma de collecte systématique de type « bi-flux », c'est-à-dire en collectant les papiers et les emballages dans un même bac, lorsque la collecte est en porte à porte".
Coup de pouce à la communication des collectivités
Finalement, le projet de loi économie circulaire propose d'avancer au 31 décembre 2022 (au lieu du 31 décembre 2025) l'échéance d'harmonisation. L'objectif est de tendre vers "un nombre restreint de schémas" pour "assurer une harmonisation plus complète des couleurs des poubelles sur l'ensemble du territoire national dans les meilleurs délais". Pour le reste, le nouveau texte reprend les éléments déjà inscrits dans la loi : la transition s'appuie sur les recommandations de l'Ademe, elle s'effectue progressivement, en s'appuyant sur le renouvellement naturel des parcs de contenants de collecte, et elle peut être accompagnée par les éco-organismes des REP concernées.
En outre, le projet de loi prévoit aussi de faciliter la communication sur les nouvelles consignes de tri, lorsqu'elles entrent en vigueur. Pour cela, le projet de loi modifie la législation qui permet à la presse écrite de s'acquitter en nature de sa contribution à la REP papiers. Jusqu'à maintenant, les journaux et magazines pouvaient, sous certaines conditions, s'en acquitter en mettant gratuitement à disposition de l'éco-organisme des encarts publicitaires. Le projet ouvre l'accès au dispositif aux collectivités et à leurs groupements. Les encarts publicitaires "sont destinés à informer le consommateur sur le geste de tri et le recyclage de tous les déchets", précise le projet de loi. La mesure "aura un impact positif [pour les collectivités] puisqu'elles auront à disposition et sans frais, un outil de communication adaptable au contexte et priorités de leur territoire".