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Hydrogène : le fret routier sur la bonne voie

Constructeurs, transporteurs, chargeurs et producteurs s'associent pour s'approprier, perfectionner, puis massifier les solutions hydrogène. Un vecteur énergétique particulièrement adapté aux mobilités lourdes.

Transport  |    |  N. Gorbatko
Hydrogène : le fret routier sur la bonne voie

Bonnes capacités d'autonomie et temps de recharge très courts : ces atouts de l'hydrogène vert pourraient permettre au fret routier de s'engager sans trop de difficultés dans la voie de la décarbonation. C'est en tout cas le pari de grands groupes, comme le gazier Air Liquide ou le constructeur VDL, mais également de nouveaux venus, comme le producteur d'hydrogène Lhyfe ou la start-up Nikola, lancés dès 2020 dans la mise au point de camions et d'infrastructures adaptés à ce vecteur énergétique. Responsables de près de 3 % des émissions françaises de gaz à effet de serre, soit quelque 40 millions de tonnes de CO₂ par an, les transporteurs n'ont peut-être pas d'autre choix.

Dans son paquet « Fit-for-55 », la Commission européenne fixe en effet au secteur des objectifs de réduction de 15 % de ses émissions en 2025 et de 30 % en 2030, par rapport à 2019, avant d'atteindre la neutralité en 2050. Or, en termes de facilités d'usage, la solution hydrogène est celle qui se rapproche le plus du diesel. Bien plus que la mobilité électrique, par exemple, plus pertinente pour des trajets courts, avec des possibilités de temps de recharge plus longs ou des charges utiles plus limitées. En 2030, l'Union européenne vise la mise en circulation de 60 000 camions équipés d'une pile à combustible, alimentés par 1 500 stations.

Camions et stations déjà en phase de test

Hyzon, VDL, Gaussin, Daimler, Hyundai, Toyota ou Man : la majorité des grands constructeurs se sont investis dans la mise au point de ces nouveaux poids lourds pour répondre à cette demande. Man devrait tester ses premiers prototypes en 2024, mais d'autres sont déjà sur les routes, comme le camion Gaussin, engagé sur le Paris-Dakar 2022, le « Xcient Fuel Cell » de Hyundai livré en Suisse ou la trentaine de camions Hyzon partis pour la Chine. Après ces premières préséries, des gammes complètes devraient être proposées dès 2025 et leurs performances améliorées, avant un passage à la fabrication en série entre 2026 et 2028. La jeune société Nikola Motor a pris un peu d'avance puisqu'elle compte louer, dès l'année prochaine, à la société de transport PG, cent de ses camions « Tre », sensés être autonomes sur 800 km.

En parallèle, maillons clés pour le développement du marché de l'hydrogène, plusieurs dizaines de stations de distribution d'hydrogène, publiques ou privées, sont déjà en service en France. De nouvelles sont en construction ou en projet. La Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) en prévoit 100, publiques, d'ici à 2023, et entre 400 et 1 000 à l'horizon 2028, réservées ou non aux poids lourds.

Des alliances multifacettes

Sur ce secteur en devenir, difficile cependant de s'engager seul. Très vite, de multiples partenariats et autres consortiums se sont donc naturellement noués : comme Hyundai avec Shell ou Iveco avec Air Liquide pour leur approvisionnement en hydrogène ; l'équipementier Forvia (ex-Faurecia avec Man pour la conception des réservoirs ; ou encore Plastic Omnium avec McPhy pour l'amélioration des process de remplissage aux stations. Afin de disposer de toutes les briques nécessaires, Daimler Truck s'est, pour sa part, assuré la coopération d'une palette très large d'acteurs : Air Liquide, le producteur de gaz Linde pour ses solutions d'avitaillement, Shell pour le déploiement des stations, Volvo pour la fabrication des piles à combustible et même Bosch pour les équipements liés à ces piles.

Ces associations sont parfois très intégrées. Depuis 2019, Hyundai et le fournisseur d'hydrogène H2 Energy déroulent ainsi une offre complète, Hydrogen Mobility Solution, composée de 1 600 poids lourds électriques à piles à combustible, livrables d'ici à 2025, de stations et de production d'hydrogène. Créé fin 2020 afin de développer et de massifier le marché, H2Accelerate rassemble une dizaine de producteurs d'hydrogène, d'exploitants d'infrastructures et de constructeurs de véhicules : Shell, Linde, TotalEnergies, Iveco, Daimler Truck, OMV et Volvo Group.

Des stratégies au plus près des besoins

Carburer à l'hydrogène sans changer de moteur ?

La technologie n'est pas encore disponible sur le marché, mais l'hydrogène peut également s'utiliser comme carburant, sous forme gazeuse, dans un moteur thermique. Non émettrice de CO₂, cette alternative est étudiée par des constructeurs comme Iveco ou Volvo Trucks-Renault Trucks. Lorsqu'elle sera maîtrisée, les équipements seront alors très rapidement disponibles en série, puisque similaires aux modèles thermiques, et à des prix attractifs. Les moteurs
à combustion pourraient se révéler plus stables, plus tolérants aux contaminants et plus durables que les piles à combustible. En revanche, au-delà du rejet de vapeur d'eau, ils émettent des particules PM10 et de l'oxyde d'azote. Leur efficacité énergétique est bien moins bonne que la solution électrique à hydrogène.
En tant qu'utilisateurs des véhicules, les transporteurs-logisticiens et les chargeurs ont aussi un rôle clé à jouer dans l'adaptation de la technologie hydrogène à leurs propres besoins. Lancé dès 2017 et présenté le 24 mars dernier, le camion démonstrateur Cathyope est ainsi le fruit d'une alliance entre le développeur de systèmes propulseurs GreenGT, les Transports Chabas et Carrefour. Les transporteurs doivent aussi pouvoir s'appuyer sur un écosystème de stations d'avitaillement et d'ateliers de maintenance, bien aligné avec leurs caractéristiques opérationnelles. Une autre approche consiste donc à faire travailler ensemble tous les acteurs de la chaîne de valeur autour de bassins régionaux, avec l'aide des acteurs publics et d'opérateurs comme la Banque des territoires Objectif : identifier les flux pertinents, les spécificités des tournées, les besoins en maintenance des véhicules et le dimensionnement nécessaire des infrastructures de distribution, tester les solutions mises en place, puis séduire les futurs clients...

Porté par le pôle de compétitivité Capenergies et Air Liquide, dans la zone dense d'Aix-Marseille et les ports, le projet Hyammed, par exemple, associe le constructeur Iveco, des transporteurs (Jacky Perrenot, ID Logistic ou Blondel et Malherbe), des chargeurs (Carrefour, Coca-Cola ou Monoprix), le producteur d'hydrogène par électrolyse Kem One, à Fos-sur-Mer, et Air Liquide pour son transport et sa distribution. Le programme, qui atteint près de 15 M€, est financé par l'Europe, la France et la Région Paca. Cette dernière subventionne notamment une huitaine de camions et la station à hydrogène haute pression (700 bars). Celle-ci délivrera une tonne d'hydrogène par jour à raison d'une vingtaine de recharges. Elle est également conçue pour le ravitaillement de bus et autres véhicules utilitaires à l'horizon 2023.

Des projets à l'échelle européenne

D'autres initiatives se conçoivent au contraire à l'échelle européenne. Soutenu par la Région Occitanie et consacré au transport de marchandises comme de passagers (camions, groupes frigorifiques, autocars), le projet Corridor H2, par exemple, se déploiera de la Méditerranée à la mer du Nord, sur le réseau transeuropéen RTE-T. La démarche consiste à équiper d'abord les corridors régionaux en stations à hydrogène, par étapes, via un approvisionnement sécurisé à l'échelle locale, avant de généraliser cette démarche. Premier concerné, le corridor occitan devrait accueillir, d'ici à fin 2023, deux unités de production (de 5 à 20 MW) et huit stations de distribution d'une capacité de 600 à 1 200 kilos par jour. Ces équipements seront situés à moins de dix kilomètres des axes principaux ou secondaires du réseau, le long de l'autoroute A9, de l'A61 et de l'A68. La flotte sera constituée de 40 camions à propulsion, 22 unités réfrigérées, 40 remorques frigorifiques et 15 autocars en rétrofit. Prêtés par la Banque européenne d'investissement (BEI), la Région Occitanie consacre 40 M€ à cet investissement, sur un budget total estimé à près de 110 M€. La Commission européenne y participe à hauteur de 14,50 M€. Après toutes ces phases d'expérimentation, la filière devrait s'engager dès 2025 dans des projets à plus grande échelle, de commercialisation et de massification des commandes, pour devenir pleinement opérationnelle en 2030.

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