Maître d'ouvrage pour le raccordement des parcs éoliens en mer, RTE se prépare à relever le défi que le développement de l'éolien flottant va lui imposer. Aujourd'hui, l'éolien posé prédomine, avec des technologies éprouvées. L'augmentation du nombre de parcs à raccorder, ainsi que la puissance à exporter, ont conduit le gestionnaire de réseau à mettre en œuvre des plateformes émergées de postes de collecte et d'export de l'énergie vers le réseau terrestre. Ces nouveaux équipements sont des structures se composant d'un poste électrique à haute tension en courant alternatif sur une structure fixe ancrée dans le sol. Mais avec le développement de l'éolien flottant, les choses vont se corser.
Basculer sur un raccordement flottant
« Il y a un chiffre à avoir en tête à propos de la technologie de raccordement, a expliqué Régis Boigegrain, directeur exécutif chargé de la direction des affaires maritimes de RTE, devant les parlementaires de l'Opecst. On peut raccorder des parcs flottants à une plateforme électrique en mer posée jusqu'à environ 100 mètres de profondeur. Après, il faut basculer sur du flottant. » Avec deux conséquences pour RTE : la structure porteuse du poste électrique doit être flottante avec un ancrage au fond et subir les contraintes de vent et de houle, tandis que les câbles à haute tension (HT) et à très haute tension (THT) de collecte et d'export de l'électricité vont avoir une partie immergée « flottante » et subir des efforts dynamiques plus importants tout en offrant une plasticité aux courants.
Ces travaux dits d'atterrage consistent aussi à préparer l'infrastructure de raccordement des câbles sous-marins aux câbles souterrains. Il s'agit d'un coffre de béton maçonné enterré sous la plage. Le câble électrique sera, quant à lui, installé à l'intérieur du fourreau dans un second temps. Une trentaine de personnes sont mobilisées pour réaliser ces travaux.
Et c'est sans compter le « deuxième effet » de l'éolien flottant : la propension à l'augmentation de la puissance des parcs (pour des raisons d'optimum technico-économique) et à la mutualisation des postes électriques (pour limiter le nombre d'ancrages à terre), va conduire à basculer vers des technologies en courant continu. C'est déjà le cas en posé pour les parcs Centre Manche 1 (1 GW) et Centre Manche 2 (1,5 GW), prévus au large du Calvados, qui seront ainsi les premiers raccordés en courant continu. Mais le faire en flottant, c'est une autre histoire !
Passer à des technologies en courant continu
« Un certain nombre de difficultés devront être surmontées, car si l'on sait déjà concevoir un poste flottant pour le courant alternatif, on ignore si on pourra le faire – et comment – pour un courant continu de forte puissance, 1 GW voire davantage », explique Régis Boigegrain. Trois défis technologiques se dessinent ainsi pour les industriels : concevoir une station de conversion du courant continu en courant alternatif dans un environnement d'oscillation vibratoire ; concevoir des câbles dynamiques de forte puissance ; installer des transformateurs électriques sur des plateformes mouvantes. « On sait aujourd'hui fabriquer des câbles dynamiques à des niveaux de tension intermédiaires de l'ordre de 66 000 volts. Des recherches sont en cours pour un courant alternatif de 225 000 volts. Si l'on bascule en courant continu, il faudra prévoir des câbles dynamiques de plus forte puissance, de 320 000 voire 525 000 volts. »